VOIR DES CHOSES ET ETRE TROUBLE

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Peu de personnes réalisent le prodigieux change­ment qui s’est produit dans l’opinion publique durant les quarante dernières années – le temps de la Mois­son de cet âge (écrit en 1914, trad.). L’accroissement de la connaissance, prophétisé pour notre époque, commença au moment opportun et effectue son oeu­vre. Il ouvre les yeux de la compréhension longtemps aveuglés par l’ignorance, la superstition et les fausses doctrines. Ce n’est pas seulement vrai en ce qui concerne le peuple consacré de Dieu, qui comprend maintenant tellement mieux la Bible et son message, mais c’est également vrai, dans une grande mesure, à propos de personnes intelligentes de ce monde, qui ne sont pas chrétiennes, mais qui respectent les principes de droiture, de justice et de miséricorde.

Trompés par les erreurs qui ont souillé la chré­tienté, ces gens bien disposés se sont demandé dans quelle mesure les prétentions de l’église pourraient être vraies, à savoir que les royaumes présents cons­tituent la Chrétienté – le Royaume de Christ. Naturel­lement, ils en doutaient, se demandant pourquoi le Royaume du Messie aurait accompli si peu de progrès sur la terre et manifesté si peu de pouvoir. Cela conduit à une double confusion :

1) Ils se demandent pourquoi tous les chrétiens ne s’engagent pas dans les problèmes politiques, sociaux et financiers du monde, pour amener l’harmonie, à la place de la confusion et pour accomplir un redresse­ment mondial, auquel on s’attendrait, si le Royaume de Christ contrôlait le monde et si les chrétiens avaient reçu du Seigneur l’autorité de le convertir et de le re­dresser, d’un point de vue social, etc.

De la même manière, beaucoup de prédicateurs et de prétendus chrétiens s’éloignent pareillement de la véritable mission de l’église, à cause de ces erreurs, et ils abandonnent la prédication de l’Évangile pour prê­cher la sociologie, etc.

De ce fait, le peu de chrétiens qui suivent attenti­vement les recommandations scripturales, et prêchent le véritable Évangile de Christ, sont discrédités, empê­chés d’agir, critiqués, signalés au monde comme per­sonnes négligeant leur mission.

D’un autre côté, comme la Bible présente claire­ment le sujet ! La véritable Eglise a reçu comme mis­sion de la part du Seigneur, non pas de convertir le monde, mais de tirer du monde un Petit Troupeau de fidèles disciples du Seigneur. Ceux-ci doivent subir de grandes tribulations, afin d’entrer dans le Royaume, qui est toujours futur. Ils ne doivent pas se mêler à la politique, etc. mais employer toute leur influence pour prêcher l’Évangile à tous ceux qui ont des oreilles pour entendre ; ainsi attirée, appelée et sanctifiée par la Vé­rité, cette classe élue de 144 000 personnes doit fina­lement être complétée ; par le « changement » de la première résurrection, elle passe de la nature terrestre à la nature céleste, afin de devenir l’Epouse de Christ, qui Lui sera associée dans le merveilleux Royaume qu’Il établira dans le monde entier, pour bénir et ins­truire toutes les familles de la terre.

2) La deuxième difficulté qu’éprouve le monde, en relation avec la croissance de la souillure de la doc­trine chrétienne, ne pourrait être mieux illustrée que par l’article suivant, tiré du « The New York Call » [L’Appel de New York, trad.]. De toute évidence, l’au­teur est sincèrement déconcerté, tout comme des mil­liers de chrétiens, par la présente guerre et par le fait que de prétendus chrétiens combattent sur tous les fronts, sous tous les gouvernements, à l’exception de la Turquie. Pourquoi combattent-ils, et contre quoi combattent-ils, si tous ces royaumes sont des Royau­mes de Christ, constituant la Chrétienté ? Certaine­ment, cette guerre, ainsi que ses suites terribles an­noncées par la Bible, ouvriront graduellement, et de plus en plus, les yeux des hommes. Tout doucement, quand le « feu » de l’anarchie aura balayé le monde, tous comprendront l’énorme erreur des crédo qui, pen­dant un certain temps, nous ont tous induits en erreur. Les yeux des hommes verront au travers de ces trou­bles et, graduellement, ils comprendront ces événe­ments et la grande leçon, qui est que tous les royau­mes de ce monde sont humains et, dans une grande mesure, associés à l’empire du « prince de ce monde » ; ils sont en train d’être renversés, afin que le Royaume du Messie soit établi sous les cieux. L’article en question dit la chose suivante :

L’effondrement du salut

« Ce n’est pas seulement le Socialisme qui a suc­combé dans le fracas européen, mais l’Armée du Salut a également disparu du continent. Dix milles de ses membres les plus actifs, et de ses ouvriers, combattent maintenant sous les bannières littérales du ‘Sang et du Feu’, au lieu de combattre sous le symbole métaphysi­que connu du même nom, sous lequel l’armée (du Sa­lut, trad.) conduisait sa bataille contre ‘le diable’.

« L’organisation et le système se sont complète­ment effondrés sur le continent, et dans les pays neu­tres ; l’armée est financièrement brisée. Une recons­truction intégrale sera nécessaire, dit-on, après que la guerre sera terminée. Ses officiers déclarent qu’elle a souffert plus que toutes les organisations religieuses existantes, à l’exception de l’église catholique. Dans ce pays-ci, les gens aisés cessent de faire des dons et les églises ne donnent rien ; les industries, desquelles provenait la majorité des fonds, ont presque toutes fait faillite et les collectes, à l’occasion de réunions publi­ques, ne donnent plus rien.

« Le rapport semble montrer que cette affaire n’était pas différente de milliers d’autres, basées franchement sur des considérations matérielles. Une fois touchée du point de vue économique, l’organisation en question disparut, comme disparurent les autres. Les symboles métaphysiques et les marques déposées sous les­quels elle exerçait son activité, devinrent totalement inutiles et impotents devant l’effondrement matériel. La guerre, physique et réelle, n’a fait que masquer le conflit abstrait entre ‘le Péché et la Sainteté’, que l’ar­mée était sensée mener continuellement, et le ‘salut’ devint une drogue sur le marché. Ceux à qui ce salut est donné sans argent et sans fixation de prix, n’en ont aucune utilité, et ceux qui précédemment en fixaient le prix afin de pouvoir toucher les ‘pécheurs en perdition’ sont quittes ; et tant les pécheurs que ceux qui leur apportaient la Bonne Nouvelle périssent de la même manière sur les champs de bataille européen, com­battant la ‘bataille du Seigneur’, dans des camps ad­verses.

Mais dans ce domaine, l’armée (du Salut, trad.) n’est en rien un cas isolé. Rien de ce qui voudrait être considéré comme ‘religion’ ne tient debout, face à la guerre, depuis les religions d’état établies, ultra-res­pectables et hautaines, jusqu’à la ‘religion’ de bas éta­ges. L’impuissance universelle de tous suggère que tous devraient être également jetés au tas de ferraille, au même titre que le ‘militarisme’. Si le monde a besoin d’une quelconque ‘religion’, il en a besoin d’une qui soit totalement nouvelle et différente, au lieu d’une qui serve ‘le Diable’ en temps de guerre, et qui prétende s’opposer à lui en temps de paix. »

WT 1914 p5586