A TIMOTHEE

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“Plusieurs disent : Qui nous fera voir le bonheur ?

Fais lever sur nous la lumière de ta face, Ô Eternel !

Tu mets dans mon coeur plus de joie qu’ils n’en ont

Quand abondent leur froment et leur moût.

Je me couche et je m’endors en paix, car toi seul,

Ô Eternel ! tu me donnes la sécurité dans ma demeure.”

Psaume 4:7-9.

Par les paroles de ce Psaume et au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, je vous salue tous rassemblés ici dans cette salle ; je salue particulièrement tout ceux avec lesquels je ne serais pas en mesure de parler aisément de notre grande joie et de notre espérance à cause de la barrière de la langue. Par groupes plus ou moins grands, nous nous rencontrons de temps en temps dans des lieux divers, à des époques et jours différents de l’année, une seule chose reste cependant inchangée : le livre qu’on tient à la main, notre espérance, source de la puissance et de l’autorité. Ce livre nous unit, il est le meilleur interprète dans nos conversations. Il permet d’accomplir ce qui est impossible dans le monde d’aujourd’hui : se comprendre. Nous ferons toujours appel à ce livre et au travers de celui-ci, nous examinerons notre caractère.

Le sujet que j’ai choisi ne sera pas une profonde analyse ou explication de la vérité biblique. Chers frères et soeurs je vais vous lire un testament. Nous passerons en revue les paroles, les pensées et les opinions d’un homme conscient de la fin proche de son pèlerinage terrestre. L’introduction ainsi que l’une des premières phrases de l’épître du grand Apôtre des païens, notre Apôtre, sera le titre de notre méditation.

“. . . . . . .à Timothée mon enfant bien-aimé” (2 Timothée 1:2).

Paul, apôtre de Jésus-Christ, était un pharisien orthodoxe, blasphémateur, persécuteur, calomniateur. Sans toit, sans proches, sans affection, certes, mais pas seul ! Certainement pas délaissé, ni dépouillé de l’amour précieux d’une autre personne. Timothée, jeune évêque, à la santé fragile, était un disciple, un fils bien-aimé dans la foi, un ami. Unis par une sympathie réciproque et par la volonté de Celui qu’ils serviront désormais ensemble dans le combat pour la foi donnée aux Saints une fois pour toutes.

Peu de temps après la séparation inattendue avec Barnabas, dans la vie étrange et difficile de Paul, Dieu lui donne un autre homme, un disciple discret, qui deviendra bientôt le soutien du grand Apôtre de Christ … parce que Paul a besoin d’un soutien. Pendant toute sa vie consacrée à Dieu, il a combattu. Il n’a pas eu de moments pour lui-même ni de ce que nous appelons une vie privée. Il s’est donné à des dizaines et des centaines de personnes qui l’entouraient et à des milliers de ses imitateurs dans les années à venir. C’est avec conviction que ces paroles résonnent. « Nous portons ce trésor dans des vases de terre, afin que cette grande puissance soit attribuée à Dieu, et non pas à nous. Nous sommes pressés de toute manière, mais non réduits à l’extrémité ; dans la détresse, mais non dans le désespoir, persécutés mais non abandonnés, abattus mais non perdus, portant toujours avec nous dans notre corps la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus soit aussi manifestée dans notre corps. Ainsi la mort agit en nous, et la vie agit en nous ». 2 Corinthiens 4:7-10, 12.

Paul a besoin de soutien. « ..Le moment de mon départ approche » écrit-il à Timothée, « …Je sers déjà de libation ». La « couronne de justice » qui lui est réservée est proche et pourtant, il y a encore beaucoup à faire, tant de choses commencées, tant d’inachevées, des lettres qui demandent réponses, de l’inquiétude pour l’assemblée d’Ephèse, et aussi pour l’inconstance de celle de Corinthe. Il y a encore cette très grande épreuve, afin qu’aucune des souffrances de son Maître ne lui soient épargnées. « Dans ma première défense, personne ne m’a assisté, mais tous m’ont abandonné. Que cela ne leur soit point imputé ! » 2 Timothée 4:16.

De ses proches fidèles il ne reste que Luc. Les autres, sentant la fin prochaine du prisonnier, se sont dispersés. Les visites se font de plus en plus rares, de moins en moins de chaleur, de plus en plus de doutes. Dans la maison louée à Rome, c’est le vide. Dans son épître précédente il avait encore un espoir de revoir bientôt Timothée : « Je t’écris ces choses, avec l’espérance d’aller bientôt vers toi » 1 Timothée 3:14. « Je t’écris afin que tu saches, si je tarde, comment il faut se conduire dans la maison de Dieu…. ». Il n’a plus l’espérance qu’il avait auparavant, Paul rédige sa dernière épître, il fait son testament. « Viens au plus tôt vers moi, nuit et jour je désire te voir – me rappelant tes larmes….. » (2 Timothée 1:3), « …et la foi sincère qui est en toi. ». J’ai envoyé les nôtres travailler, les autres sont partis … et avec une grande douleur il ajoute encore, encore une chose : « Démas m’a abandonné, par amour pour ce siècle présent ». Lorsque le parchemin parviendra à Timothée les larmes de Paul auront eu le temps de sécher, seul son ami pourra les voir et entendre son appel à l’aide : Dépêche-toi … !

Parmi les phrases, encore un désir, ajouté comme en passant, « apporte le manteau que j’ai laissé à Troas chez Carpus » – il fait froid à Rome – de plus en plus froid … et les livres, surtout les parchemins … ce qu’il a le plus aimé dans sa vie, ce qui était sa force quand il démolissait l’Eglise de Dieu et plus tard lorsqu’il la rassemblait et la bâtissait. Passionné depuis son enfance pour les Ecritures, élève de Gamaliel, il forgeait son épée, qu’il mania si parfaitement pendant toute sa vie. Les Ecritures, c’est la Parole de Dieu, c’est un guide. Maintenant, à la fin de sa vie, c’est la réponse aux doutes qui ne manquaient pas dans le service pour Christ.

Paul écrit. De toutes ces paroles adressées à son ami découle une instruction pour toutes les générations de ses imitateurs. Ce ne sont plus de vifs et énergiques discours, mais des prières, des recommandations. Le ton de la dernière épître est sérieux, calme. Difficile de retenir son émotion, lorsqu’on s’imagine l’Apôtre occupé à écrire ces paroles qui témoignent de sa courageuse attente du martyre, avec le sentiment d’un devoir bien accompli, et la certitude que le Seigneur lui accordera la récompense.

Ces paroles sont pour nous tous un enseignement. Instruisons-nous ! « Je t’en conjure devant Dieu et devant Jésus-Christ, qui doit juger les vivants et les morts et au nom de son apparition et de son royaume, prêche la parole, insiste en toute occasion, favorable ou non, reprends, censure, exhorte, avec toute douceur et en instruisant … ». Il est encore temps Timothée, il est encore temps. « Car il viendra un temps où les hommes ne supporteront pas la saine doctrine; mais, ayant la démangeaison d’entendre des choses agréables ils se donneront une foule de docteurs selon leurs propres désirs, détourneront l’oreille de la vérité, et se tourneront vers les fables » 2 Timothée 4:1-4. Quelque part dans les profondeurs de notre intérieur se cache une question pertinente que nous étouffons si souvent par crainte d’une réponse honnête. Il est difficile d’échapper aux regards du vieux Paul qui exhorte ainsi : « C’est pourquoi je t’exhorte à ranimer le don de Dieu que tu as reçu par l’imposition de mes mains. Car ce n’est pas un esprit de timidité que Dieu nous a donné mais un esprit de force, d’amour et de sagesse. N’aie donc point honte du témoignage à rendre à notre Seigneur, ni de moi, son prisonnier, mais souffre avec moi pour l’Evangile, par la puissance de Dieu » (2 Timothée 1:6). Je t’exhorte à ranimer le don en toi, regarde ! Ta lampe s’éteint !

Pourquoi tant de lectures, de méditations, de kilomètres parcourus pour quelques jours ? Pourquoi tant de poignées de mains, de sourires ? Est-ce pour croître, pour approfondir notre connaissance des Ecritures ? Certainement pas cela seulement, mais pour quitter notre fauteuil confortable, le bureau de nos affaires quotidiennes et nous mettre de nouveau dans les rangs avec toutes les armes, pour reprendre des forces. Afin de s’encourager réciproquement à mettre la Parole de Dieu en pratique, et pour être à la fin fortifiés dans la foi.

Notre foi.

Dans le livre de Job, Satan s’informe précisément à son sujet : « Est-ce d’une manière désintéressée que Job craint Dieu ? Ne l’as-tu pas protégé, lui, sa maison, et tout ce qui est à lui ? » C’est un des passages les plus classiques des Ecritures, qui nous montre le problème des chrétiens dans le monde. Est-ce que j’aime le Seigneur parce qu’Il est bon, miséricordieux ? Est-ce que je lui fait confiance, parce qu’Il est mon Père Céleste ? Croyons-nous en Lui, parce que nous désirons être sauvés ? Nous réjouissons-nous en Jésus-Christ, parce que nous voyons en Lui la seule lumière qui conduit au Père, notre seule joie ? Toutefois si nous servons le Seigneur parce que tout va bien, parce que nous espérons qu’il nous protégera de tout le mal de ce siècle, qu’Il nous comblera de richesses, de joie, d’amis, si nous possédons quelques-unes de ces choses, alors notre foi n’est pas véritable. Satan suggère : « Mais, étends ta main, touche à tout ce qui lui appartient, et je suis sûr qu’il te maudit en face ». C’est là une citation purement et simplement satanique.

La foi et l’amour – les deux plus grandes forces positives qui animent notre histoire – ont un trait commun – ils agissent en dépit de tout. Savons-nous croire et aimer quoi qu’il arrive ?

« Qu’est-ce que la foi ? » demanda une fillette un jour à son père. Celui-ci ne lui répondit pas aussitôt. Quelques jours plus tard il travaillait dans la cave, dans laquelle on accédait au moyen d’une échelle par une ouverture dans le plancher. La petite fille s’approcha de l’ouverture et cria !

« Papa, je peux descendre vers toi ? » Elle entendit la voix qui venait du fond de la cave :

« Oui, viens ! » Aussitôt elle voulut descendre, mais tout à coup cela lui parut impossible car l’échelle avait été enlevée.

« Je ne peux pas descendre – il n’y a pas d’échelle. »

« Saute dans le vide » lui dit son père.

« Mais, je ne vois rien ! »

« Je t’attraperai ! Saute! »

« Si seulement je te voyais ! »

« Moi je te vois ! Mes bras sont ouverts ! Saute ! »

Vous me demanderez comment s’est terminée cette histoire ? Je ne sais même pas si elle est authentique. Je sais par contre qu’elle répond parfaitement à la question de savoir ce qu’est la foi. Quelle devrait être notre foi ? Des milliers de gens sont inscrits dans les registres des différentes églises. Ils assistent aux offices quand cela leur convient, donnent de l’argent pour l’église et soutiennent son activité. Après le culte, ils saluent le prédicateur et le félicitent pour le beau sermon qu’il a dit. Ils emploient un vocabulaire religieux et savent citer de mémoire de nombreux passages des Ecritures, mais sans jamais avoir réfléchi à leurs véritables significations. Leurs relations avec la religion sont dans un certain sens indifférentes. Ils adressent des prières à Dieu seulement lorsqu’ils sont dans des situations difficiles, mais ils y attachent peu d’importance dans leur vie normale.

Aucun verset des Ecritures ne dit qu’on peut être chrétien et mener une vie à sa propre convenance. Lorsque Christ entre dans le coeur d’un homme, Il veut être le Seigneur et Maître. Il exige une abnégation totale. Il te demande de veiller sur ton développement intellectuel. Il exige que tu Lui donnes ton corps, et uniquement à Lui. Il veut tes talents et tes facultés. Il exige que toutes tes activités et ton travail soient exécutés en Son Nom. Il exige la confiance. La foi, précisément, c’est ça ! Mais, nous ne sommes pas dans cette condition ! Evidemment, nous savons nous justifier par notre bonne disposition, par notre effort, toutefois le fait est toujours là. Nous savons parfaitement combien il y a dans notre vie de consécration véritable, le progrès que nous avons réellement fait. Nous le savons parfaitement, c’est cela qui fait peur.

Nous ne pouvons pas traiter notre acceptation de Christ comme une expérience. C’est une décision qui doit être claire, suivie d’une abnégation totale. Comme un bon soldat, appelé pour servir la défense de son pays, qui ne prend pas garde aux dangers qui le menacent, nous devons toujours aller de l’avant et ne jamais regarder en arrière. Le soldat de Dieu brûle tous les ponts derrière lui et marche sur le chemin duquel ne le détourneront ni les malheurs ni les vicissitudes de la vie. Jésus déclare : « Quiconque met la main à la charrue, et regarde en arrière, n’est pas propre au royaume de Dieu. » (Luc 9:62).

Sur le chemin de Damas, la gloire de Jésus fait tomber Paul de son cheval, et bouleverse aussi sa vie entière. Il se relève mais aveugle. Lui, instruit, sage, versé dans les écrits de la loi il avait commis une erreur effroyable. Lui qui donnait lecture, qui expliquait, qui enseignait et … , ce Messie, annoncé pourtant par de nombreuses prophéties, il n’a pas pu le reconnaître, celui qui était si évident … et tellement désiré.

Sur le chemin désertique, Paul est pour nous un exemple de la conversion. Lorsque le Seigneur Jésus bouleversa avec intransigeance notre vie en cours, devenus aveugles, nous cherchons une main qui pourrait nous relever de terre. Mais déjà sur ce chemin le futur Apôtre nous dépasse décidément. Quoique brisé, il change complètement. Il ne se retourne pas, il n’essaye pas de sauver ce qui est en arrière. Il change tout. Il n’est pas difficile de comprendre son amour pour Timothée, lorsqu’on lit ses dernières paroles : « Pour toi, tu as suivi de près mon enseignement, ma conduite, mes résolutions, ma foi, ma douceur, ma charité, ma constance … » (2 Timothée 3:10). Paul s’adresse-t-il aussi à nous ? Nous nous sommes peut-être mis d’accord pour dire que nous ne savons pas donner plus de nous-mêmes. Nous prions : Pardonne-nous Seigneur Dieu, pardonne-nous … et les paroles qui doivent nous justifier, nous manquent. Et le Seigneur ? Il pardonne constamment, comprend et pardonne même lorsque nous L’abandonnons dans notre irritation, dans notre indifférence, quand nous nous plaignons, Il attend toujours. Il sait attendre des années, souvent une vie entière, comme Il a attendu un pharisien qui s’appelait Saul.

« … Comme il était encore loin, son père le vit et fut ému de compassion, il courut se jeter à son cou et le baisa ». (Luc 15:20). Nous lisons une des plus émouvantes paraboles du Seigneur Jésus. Bien que nous la connaissions tous comme étant la parabole de l’enfant prodigue, nous sentons pourtant dans notre subconscient, que le héros principal n’est pas le fils mais le père. Ce père qui ne l’a pas oublié, ni maudit, ne lui fit pas faire le baisemain, mais lui pardonna sans conditions … « il courut se jeter à son cou … et le baisa … »

Un écrivain raconta l’histoire d’un jeune homme, qu’il avait rencontré dans le train. Ce jeune homme paraissait très affligé et énervé. Au début, il ne montrait aucune envie de rompre le silence. Après un certain temps, alors que le voyage se prolongeait, en quelques mots, il fit part de ses problèmes à son voisin : il menait une vie insouciante et rebelle, donnait à ses parents beaucoup de soucis et pour finir il devint la cause de leur accablement.

Lorsque ses parents, par amour, l’encourageaient à changer sa façon de vivre, dans une montée de colère, il décida de les quitter. Quand il s’apprêta à sortir il leur signifia qu’il ne mettrait plus jamais les pieds dans leur maison et il ferma la porte familiale.

Pendant quelques années, comme le fils prodigue, il vivait à son propre compte, il profitait des nombreux plaisirs, il satisfaisait comme bon lui semblait ses rêveries retenues jusqu’alors. Comme dans la parabole de la Bible, il connut des jours difficiles et pleins de solitude. Il commença alors à penser à son retour, à sa maison, à ses parents déjà vieux. Il songeait de plus en plus à refaire une nouvelle vie. En rêve, il voyait toujours plus le grand pré verdoyant, les arbres, le chemin avec ses ornières, deux visages tristes et ridés … Ces souvenirs qui torturent, qui accusent. Et cette question si difficile qui revient toujours: comment retourner ?

Torturé aussi par la pensée que ses parents pouvaient ne pas être d’accord avec son retour, vu la manière dont il les avait traités, il résolut de leur écrire une lettre. Dans cette lettre, il leur dit tout. Pour terminer, il leur proposa son retour qui dépendrait uniquement de leur accord. Il les informa aussi par quel train il passerait devant la maison, cependant il acheta un billet pour descendre à la gare suivante. Comme la maison était située près du chemin de fer, il leur demanda d’accrocher un mouchoir à l’arbre qui se trouvait entre la maison et la voie ferrée, afin qu’il puisse le voir de la fenêtre du train. Le mouchoir devait être, bien entendu, un signe de bienvenue. Sinon il comprendrait et poursuivrait son voyage.

Lorsqu’il termina son récit, le train approchait de la ville, le jeune homme se rappela qu’il pouvait voir sa maison lorsque le train aura passé la courbe. Il serra la main de l’écrivain : « Je vous en prie, Monsieur, regardez pour moi ! … Moi, je ne peux pas. Jetez un regard, et dites-moi ce que vous voyez ». L’écrivain regarda par la fenêtre et dit: : « Jeune homme, je vois la maison que tu m’as décrite, je vois aussi deux personnes âgées, debout sur l’escalier, qui regardent de ce côté ». « Oui mais, voyez-vous le mouchoir ? »

L’écrivain le saisit par l’épaule et l’invita à se retourner vers la fenêtre. Sur l’arbre des mouchoirs flottaient en grand nombre, même plusieurs sur chaque branche. De loin, on aurait dit que l’arbre avait fleuri avec de curieuses fleurs exotiques. Le jeune homme pleura.

Revenons à Paul. Penché sur sa lettre, penché sur sa vie, il lègue à son fils ce qui est le plus précieux, acquis après de nombreuses épreuves. « Fuis les passions de la jeunesse et recherche la justice, la foi, la charité, la paix avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un coeur pur ». 2 Timothée 2:22. Paul sait que le jeune Timothée doit endurer plus de tentations et d’épreuves et qu’il a encore si peu expérimenté la fausseté et les cruautés de la vie. Il lui donne un moyen de lutte simple, efficace, mais exigeant une grande formation de caractère. Fuis les passions de la jeunesse, ne les contourne pas, ne te pose pas de questions, ne t’arrête pas, mais fuis ! Tu n’es gagnant qu’à partir du moment où tu es capable de te détacher aussitôt d’une convoitise qui caresse tes pieds. Toute autre façon d’agir conduit finalement au désastre, petit d’abord et plus grand ensuite.

« Démas m’a abandonné par amour pour ce siècle présent … » … Timothée tu dois être ferme et dur. Nous devons tous être fermes et durs avec nous-mêmes, seulement avec nous-mêmes.

Quelques lignes plus loin, dans cette même épître, ce même Apôtre nous enseigne la douceur, la patience et l’humilité: « Or, il ne faut pas qu’un serviteur du Seigneur ait des querelles ; il doit, au contraire, avoir de la douceur pour tous, être propre à enseigner, doué de patience ; il doit redresser avec douceur les adversaires, dans l’espérance que Dieu leur donnera la repentance pour arriver à la connaissance de la vérité, et que, revenus à leur bon sens, ils se dégageront des pièges du diable» (2 Timothée 2:24-26). Nous devons apprendre à marcher dans l’amour avec les autres. Mais pour marcher dans l’amour, l’homme doit apprendre à pardonner.

Nous vivons dans un monde où les gens nous outragent et nous font du tort. Tous les jours nous sommes devant une décision à prendre: Devons-nous pardonner à ceux qui ont péché contre nous ? Nous leur pardonnerons indépendamment de ce qu’ils font si nous voulons être obéissants à Dieu. Imiter Dieu signifie marcher sur les traces de son pardon. Dieu est celui qui pardonne, Il est plein de compassion et miséricordieux. Il nous a pardonné comme l’Apôtre le dit en Hébreux 8:12, nos péchés quand ils ne méritaient pas la miséricorde. Notre inimitié pour Lui ne l’a pas empêché d’agir en notre faveur, pour notre pardon. Il nous invite à agir de même envers les autres. « Soyez donc miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux ». (Luc 6:36). Et Saint Paul ajoute : «Veillez à ce que nul ne se prive de la grâce de Dieu ; à ce qu’aucune racine d’amertume, poussant des rejetons, ne produise du trouble, et que plusieurs n’en soient infectés ». (Hébreux 12:15). Lorsque nous laissons persister le manque de pardon, à ce moment-là pousse de la racine d’amertume, un rejeton ; à ce stade, il peut paraître inoffensif, mais si nous lui permettons de se développer, il deviendra un arbre de haine et de rancoeur, difficile à déraciner, ce qui affectera non seulement la personne concernée, mais aussi tous ceux qui vivent autour d’elle. Par conséquent, déployons plus de pardon, de miséricorde et d’humilité. Montrons toujours plus ces marques profondes, qui n’apparaissent trop souvent que lorsque nous devenons âgés, quand le crible et les épreuves de la vie mettent en évidence les moments d’énervement, de colère, et d’agressivité inutiles.

C’est précisément cet esprit qui rayonne de la dernière épître de Paul. De cette lettre émane une grande sagesse de la vie appuyée par le Saint-Esprit. La plupart de nos conflits, de nos rancoeurs ou de nos scandales ont la futilité pour cause. C’est ce que l’Apôtre n’a d’ailleurs pas omis de mentionner: « Rappelle ces choses, en conjurant devant Dieu qu’on évite les disputes de mots, qui ne servent qu’à la ruine de ceux qui écoutent. Efforce-toi de te présenter devant Dieu comme un homme éprouvé, un ouvrier qui n’a point à rougir, qui dispense droitement la parole de la vérité » (2 Timothée 2:14,15).

Nous nous combattons uniquement pour des mots, nous en arrivons à ne pas nous donner la main seulement à cause des mots. Nous savons lutter à mort, pour un nom que nous avons donné, arrangé et inventé nous-mêmes. Nous ne discernons chez les autres, ni leur vie ni leur consécration, ni le caractère qu’ils se sont forgé. Nous ne luttons souvent que pour des mots. Fréquemment, dans nos études, dans nos recherches, nous savons perdre toute la beauté de l’Evangile parce que notre vie se compose plus souvent de paroles que d’actes.

Je donnerai un exemple. Considérons l’image suivante : Imaginons-nous que, pour la prochaine réunion, je me sois proposé de faire un discours sur le thème de la joie. J’ouvre pour commencer la concordance à la page du mot “joie” ; ensuite, dans un carnet de notes je dresse une liste de citations bibliques. On peut d’ailleurs constater avec étonnement que la Bible parle beaucoup à ce sujet. Puis, soucieux de ma responsabilité, j’en choisis plusieurs, à mon avis, les plus appropriées et les plus convaincantes. Ensuite, j’utilise un dictionnaire des mots grecs, duquel je tire éventuellement la signification plus large du mot se rapportant au sujet à traiter ; si quelqu’un en a la possibilité, on peut aussi faire usage d’un dictionnaire-lexique chaldeo-hébraïque etc… Et ainsi la forme et le contenu de la méditation commencent à prendre les mesures souhaitées. Pour être plus attrayant, on peut rechercher, par exemple, ce que Luther a dit à ce sujet, et éventuellement quelqu’un qui représente la littérature du monde et, en principe, cela devrait être suffisant.

Lorsque le moment de servir est arrivé, debout derrière le pupitre, je commence : “Chers frères et soeurs, le mot joie a une signification plus large dans l’original grec que dans notre langue usuelle… Au sujet de la joie, Abraham a dit … Jésus a dit … L’Apôtre a dit … Luther a dit … Amen”!

Maintenant, si l’on passe dans l’assistance sans attirer les regards, on constatera vraisemblablement que la méditation a été à la satisfaction quasi générale, il se peut aussi que quelqu’un soulignera que l’analyse de la Parole de Dieu a même été profonde. Certes, mais vraisemblablement personne n’a reçu en plus cette joie à laquelle faisaient allusion les citations des Ecritures.

Le Seigneur Jésus n’est pas venu pour faire découvrir au monde de nouvelles conceptions de la vie, mais Il est venu offrir sa propre vie. Son message ne consistait pas à faire un récit de la vie, mais Il était la vie même. Nous devrions donc chercher le dénouement de ce problème, dans la préparation de nos sujets, dans notre comportement ou dans nos conversations, pour qu’ils exhalent la vie qui vient de Dieu à ceux qui nous entourent, afin qu’ils constituent une indication permettant aux auditeurs d’évoluer dans la vie spirituelle et les inspirer à mettre la parole de Dieu en pratique. Ce n’est pas un devoir facile. Il y a des gens qui possèdent des qualités innées pour soutenir spirituellement les autres. L’Apôtre Paul les appelle « les forts» ; il souligne même qu’ils devraient supporter les faiblesses de ceux qui ne le sont pas. Les autres ne sont pas pour autant excusés car personne n’est dispensé de son devoir de servir. Avec quelle grande joie Paul écrit à Timothée : « Que le Seigneur répande sa miséricorde sur la maison d’Onésiphore, car il m’a souvent consolé, et il n’a pas eu honte de mes chaînes » (2 Timothée 1:16).

Ce proverbial “verre d’eau fraîche”, nous le retrouvons très souvent dans les pages de l’Evangile. Il est à l’origine de plusieurs paraboles; nous le retrouvons aussi dans la difficile parabole des brebis et des boucs :

Seigneur, quand T’avons-nous vu ayant soif ?

Quand T’avons-nous vu ayant faim ?

Quand es-Tu passé devant notre porte cherchant un gîte ?

Nous ne T’avons jamais vu.

Nous, gens tièdes, indifférents, sans yeux, sans oreilles ni mains.

Gens sans coeur.

Cette condition est aussi le plus grand souci du vieux Paul, non pas sa mort, ni sa souffrance, mais cette constante inquiétude pour ceux qui sont tièdes, pour ceux qui sont superficiels et instables. Paul sait non seulement par des révélations directes, mais aussi en observant ce qu’il avait semé, il sait que ce grand et merveilleux élan ne durera pas longtemps après ses visites et ses prédications.

Les émotions se refroidissent, le grain tombé “le long du chemin” meurt et ne donne plus son fruit, et apporte souvent à l’Evangile et à lui-même de l’opposition. Il fait part de son grand souci à Timothée : « Tu sais que tous ceux qui sont en Asie m’ont abandonné, entre autres Phygelle et Hermogène… » (2 Timothée 1:15). Paul attire l’attention de Timothée « Tu sais », ce n’est pas une information. Ces paroles en disent beaucoup. Il y a dans cette seule phrase une grande douleur, celle qui l’accompagne chaque fois qu’il fait ses adieux avec ceux qu’il avait amenés à Christ, qui étaient si proches, à une portée de main du Royaume à venir. Timothée, « sais-tu ce qui s’est passé. Moi je ne peux pas comprendre, je ne peux pas consentir ». Paul se sentait comme si on lui avait coupé la main. Car c’est l’Eglise qui s’écroule, le corps de son Maître. Comme s’il était étonné que tout ce qu’il avait semé ne sera pas glorifié par le Seigneur en dépit de ce qu’il enseigne précisément voire même que l’apostasie est un des signes avant-coureurs du Royaume. Néanmoins la douleur reste chaque fois que quelqu’un “abandonne son premier amour“.

Asseyons-nous à table avec Paul, et essayons encore une fois dans notre vie de briser notre coeur. Essayons de comprendre que l’Evangile n’est pas un récit de gens et de faits lointains. “Je te recommande, devant Dieu qui donne la vie à toutes choses, et devant Jésus-Christ qui fit une belle confession devant Ponce Pilate, de garder le commandement, et de vivre sans tache, sans reproche, jusqu’à l’apparition de notre Seigneur Jésus-Christ”(1 Timothée 6:13,14). Je te recommande ! “J’exhorte donc, avant toutes choses, à faire des prières, des supplications des requêtes, des actions da grâces, pour tous les hommes, pour les rois et pour tous ceux qui sont élevés en dignité, afin que nous menions une vie paisible et tranquille, en toute piété et honnêteté”. (1 Timothée 2:l, 2).

Il n’y a aucun doute. La vie du chrétien devrait être en toute piété et dignité. Le monde entier lutte actuellement pour cette dignité qui est encore impensable dans beaucoup d’endroits de notre planète. Chez le chrétien, la dignité de l’homme doit venir de la piété. Nous avons dans notre coeur le plus grand Seigneur et sa Loi. Malgré la fragilité et la faible valeur de notre vase, il contient pourtant un trésor. Ce trésor nous appartient à la condition de ne pas nous laisser emporter par les flots du monde qui nous entoure, et de garder notre dignité en toute piété. Paul recommande de prier, pour recevoir l’aide nécessaire afin d’accomplir la Loi divine et réussir à vivre dans la paix et le calme. L’un et l’autre ne vont pas de pair. La volonté de Dieu ne se réfléchit pas dans les lois des hommes, et pourtant elle rend la domination, l’exploitation et l’avilissement de l’homme par l’homme impossible. Nous ne serons jamais populaires et on ne nous mettra jamais sur un piédestal. Et même s’ils le font, ils nous enfonceront un couteau dans le dos, au nom d’une toute autre dignité. Nous ne parviendrons jamais à clamer ou à prouver dans ce monde que nous avions raison, que l’Apôtre avait raison, et pour finir que Jésus-Christ avait raison.

Approchons-nous donc de la table du grand Apôtre, écoutons et regardons, efforçons-nous de ne laisser échapper aucune de ses dernières paroles et permettons-lui de diriger notre coeur, afin que nous puissions perdre tout désir en dehors de Christ et devenir déjà maintenant des citoyens de son Royaume. Osons déterrer l’étendard enfoui profondément, le déployer devant le monde et dire enfin haut et clair: Oui, tout pour Jésus-Christ ! Alors, les paroles du testament de l’Apôtre se rapporteront également à nous: « Le Seigneur me délivrera de toute oeuvre mauvaise, et il me sauvera pour me faire entrer dans son royaume céleste. A lui soit la gloire aux siècles des siècles ! Amen. » (2 Timothée 4:18).

Fr. M. T. (De Bron)