D’aucuns trouveront étrange que l’ambition religieuse de nos jours puisse constituer un élément favorable à une guerre. Souvenons-nous cependant que des mouvements de ce genre ont joué leurs rôles dans les temps passés et ont valu des guerres à l’humanité [Croisades, guerre de Trente—Ans etc., le trad.]. Aujourd’hui les peuples dits chrétiens sont devenus tellement indifférents à l’endroit de la religion et tellement préoccupés, des intérêts commerciaux, tellement avides d’argent que les hommes pieux ont cherché autre chose que la repentance, la foi en le sang précieux et la consécration au service de Dieu pour le prêcher et attirer l’attention du monde. Ils y ont réussi plus ou moins avec les bonnes œuvres pour le soulagement et l’élévation des classes et des peuples souffrants. Et maintenant l’idée de faire parvenir la civilisation aux extrémités de la terre, est devenue leur projet le plus chéri. Ils annoncent que la conversion du monde n’est plus qu’une question d’argent, mais ne nous disent pas pourquoi dans les pays riches le mécontentement, les crimes, les suicides etc. sont plus répandus que dans les autres. Un évêque de l’Eglise méthodiste en Amérique, dans un sermon sur la christianisation du monde, n’a pas reculé devant la pensée que les nations parlant l’anglais à elles seules pourraient soutenir victorieusement une lutte sanglante contre la Russie, une lutte pour délivrer l’humanité du cauchemar de l’absolutisme russe et lui acquérir à jamais la liberté politique et religieuse. Il pensait que la Providence avait rendu puissante la race anglaise, afin que ce but puisse être atteint. “A nous de faire usage de cette puissance !” s’écriait-il.
Mais en attendant il assigne une tâche à l’Eglise méthodiste. Celle-ci n’a fait, jusqu’ici, que jouer au salut du monde. Elle pourrait, au lieu de collecter péniblement 1 ½ millions pour les missions, en trouver plus de 300 par an. “Mais avec 100 millions déjà que ne pourrions-nous pas accomplir? Nous avons le sang de la réconciliation; nous avons la résurrection du Fils de Dieu nous avons l’Evangile: nous avons fait l’expérience que la grâce sauve; nous avons la théologie et une
56 Juillet 1904
troupe de croyants instruits; nous avons le matériel nécessaire ; des Bibles, des imprimeries, des vapeurs, des chemins de fer. Le monde est ouvert devant nous; il est prêt à nous recevoir, il nous attend. Il n’y a que l’argent qui nous manque. ”
Néanmoins, dans sa péroraison, l’orateur affirmait que notre génération de croyants verra le salut de notre génération de pécheurs et que les royaumes de ce monde deviendront les royaumes de notre Dieu et de son Oint.
Trad. par E. P.