Quel est le vrai Evangile?

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“ Je n’ai  point honte de l’Evangde de Christ.” — Rom 1 : 16.

Point n’est besoin de présenter des excuses, si nous allons examiner la question: “Quel est le vrai Evangile dont l’apôtre n’avait pas honte ?” Puisqu’on trouve tout naturel de con­sacrer beaucoup de temps et d’intelligence à l’étude de sciences terrestres, en particulier des sciences appliquées telles que l’économie politique, par exemple, dont les bases sont, pour la plus grande part, des conjectures et des conclusions humaines, l’on ne pourra point mettre en doute l’utilité que présente l’étude de l’économie divine, révélée dans le merveilleux plan de Dieu. S’il y a avantage à rechercher les causes des mala­dies et les moyens de les guérir ou de les prévenir, il est incontestable que l’Evangile offert par Dieu comme remède contre les maladies et la mort de l’âme équivaut à une science dont l’application procure la vie éternelle et mérite donc plus d’attention et une étude plus approfondie encore.

Les esprits les plus élevés et les plus nobles parmi les hom­mes ont admis l’importance hors ligne de la question que nous allons étudier. Ils l’ont pesée soigneusement, et ensuite de leurs études les uns ont accepté, les autres ont rejeté l’Evangile. Nous n’allons point discuter ici le poids des arguments mis en ligne contre l’Evangile ou en sa faveur; nous voulions seulement, en passant, noter le fait que tous les hommes in­telligents considéraient notre question comme digne d’un examen sérieux et lui accordaient autant d’attention qu’à bien des autres ou même qu’à toutes. Il demeure dorénavant établi que quiconque n’a point étudier la question religieuse, est ou bien un novice dans l’art de penser, ou bien un proche parent des “insensés qui disent dans leur cœur: il n’y a point de Dieu” ou bien un lâche, en proie aux peurs superstitieuses que Satan a mises dans le cœur des hommes dans le but d’empêcher les hommes d’étudier sans préjugés le divin mes­sage d’amour et de pitié.

Aussi longtemps que nos investigations à l’endroit de l’Evangile ne nous ont point conduit à un résultat absolument satisfaisant notre foi en Dieu, notre amour pour Dieu, notre zèle pour l’Evangile ne sont pas aussi fervents que nous le désirerions. Espérons qu’après l’examen, auquel nous allons nous livrer dans ces pages, nous verrons plus clairement qu’aupara­vant quel est le vrai Evangile, l’Evangile dont l’apôtre n’avait point honte et dont nous, par conséquent, n’avons pas besoin d’avoir honte, l’Evangile qui de plus en plus aura en nous en sa qualité de puissance de Dieu pour notre salut.

Nul homme jouissant du bon sens niera que le mot grec “Evangile” signifie “bonne nouvelle”, “bon message”. Néan­moins on est généralement tombé d’accord — nous ne savons comment — de considérer comme “sermon évangélique” une allocution annonçant la mauvaise nouvelle que des tourments éternels attendent la plus grande partie de l’humanité, voir même tous sauf le petit troupeau de ceux qui croient en Dieu. En conséquence on attend d’un prédicateur évangélique qu’il fasse voir à ses auditeurs un lieu tout imaginaire, un abîme rempli de flammes inextinguibles, afin d’effrayer les pécheurs, de les pousser à se repentir et à devenir meilleurs pour échap­per à un avenir si terrible.

Ajoutons de suite que, nonobstant les vues “orthodoxes” à cet égard, cette “mauvaise nouvelle des tourments éternels” est moins généralement annoncée maintenant qu’autrefois, parce que l’esprit des gens cultivés la répudie, la considérant comme un fétiche des temps passés. Néanmoins on l’entendra à l’occasion dans les petites églises rurales, dans des réunions en plein air, de temps à autre dans un temple de ville et géné­ralement dans les assemblées salutistes. Nous n’avons pas l’intention de mettre en doute la bonne foi et l’honnêteté des intentions de ceux qui prêchent ainsi. Nous n’avons pas mis­sion de juger des personnes et de leurs motifs, mais nous considérons, que nous avons le privilège et le devoir d’examiner des doctrines, pourvu qu’en ce faisant nous ne soyons malintentionnés envers personne et charitables envers tous. Notre unique but est d’établir ce qui est vrai et de discréditer l’erreur.

Nous estimons qu’il sera utile de faire précéder notre examen de la bonne nouvelle dont l’apôtre n’avait pas honte, d’un aperçu rapide des différentes croyances annoncées par les dif­férentes dénominations de la chrétienté. Nous ne pensons pas que chaque dénomination représente une croyance différente de celles de toutes les autres. Bien souvent ce ne sont entre elles que des différences de cérémonies, de méthodes, de constitutions, voir même de noms simplement et non point des différences à l’endroit du message, de l’Evangile qu’elles annoncent. Néanmoins il y a trois croyances essen­tiellement différentes entre elles, trois “Evangiles” considérés chacun comme “ orthodoxes”, parce que tous trois déclarent comme point capital, comme base de leur foi, la doctrine des tourments éternels attendant tous les hommes sauf le petit nombre de “sauvés”. Chacun de ces trois “Evangiles” compte ses fidèles par millions groupés en un grand nombre de dénominations.

Ces trois groupes sont:

(1)    l’Eglise catholique romaine, avec l’église catholique grecque, l’église arménienne et quelques épiscopaliens de l’église anglicane.

(2)    l’Evangile calviniste, annoncé par les diverses nuances

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 des presbytériens, les congrégationalistes, les baptistes et une bonne partie des luthériens et des épiscopaliens.

(3) l’Evangile arminien, autour duquel se groupent les différentes sectes méthodistes et les baptistes de la libre vo­lonté, ainsi qu’un grand nombre de personnes appartenant à des églises qui ont souscrit à l’évangile calviniste. Nous pou­vons donc dire que l’arminianisme et le calvinisme partici­pent à parts à peu près égales au monde protestant.

Il ne nous sera pas possible de traiter notre sujet utilement et à fond, sans présenter quelques critiques à l’adresse de ces trois évangiles, enracinés depuis des siècles dans les cœurs des chrétiens. Les différents synodes les ont, hélas, trop souvent confirmés et les facultés théologiques les ont appuyés de gros volumes. Mais nous pouvons — et ferons tout notre possible pour respecter cette ligne de conduite — éviter de proférer le moindre blâme à l’adresse de ceux que nous croyons être de bonne foi dans leur fidélité à ces évangiles con­tradictoires. L’Ecriture enjoint, comme nos lecteurs le savent, de “combattre [sérieusement] pour la foi qui a été transmise une fois aux saints” (le vrai Evangile) et en même temps de “ne dire du mal de personne”. Nous tâcherons de nous maintenir entre ces deux lignes reconnues légitimes et de suivre l’ex­hortation de l’apôtre: Dites la vérité dans l’amour.” —Jude v. 3; Eph. 4:15.

L’Eglise romaine enseigne que tout homme est pécheur et, partant, condamné aux tourments éternels, que Christ commença l’œuvre de rédemption, que cette œuvre est complétée par la messe, par des prières et des pénitences, qu’ainsi complétée la rédemption permet à tous les fidèles (catholiques romains) d’échapper aux tourments éternels qui sont la part sûre de tous les hérétiques, que leurs œuvres soient bonnes ou mauvaises. Les fidèles, les papes et les évêques y compris, passent par le purgatoire pour y être sanctifiés, et y séjournent plus ou moins longtemps, suivant la peine que se donnent leurs amis pour prier, faire lire des messes pour eux après leur mort. Mais à la fin des fins le purgatoire ne sera plus, quand il aura purifié tous les milliers de millions d’hommes qui y auront passé, et les aura rendus dignes d’une meilleure et plus heureuse condition. L’enfer par contre persistera et sera le lieu, où tous les protestants, tous ceux qui répudient les doctrines papales, souffriront les tourments éternels.

Voilà l’“Evangile” romain, comme nous le comprenons. Il n’a point l’aspect d’une bonne nouvelle, pas même pour ceux qui, selon lui, auront le moins à souffrir, à plus forte raison pas pour tous ceux qui ne sont pas catholiques romains.

L’Evangile protestant est présenté sous deux formes diffé­rentes, l’une et l’autre absolument fausses. Prenons d’abord celui annoncé par le calvinisme, auquel se rattachent les bap­tistes, les presbytériens (les luthériens) et les congrégationalistes. A son point de vue, c’est la foi en Christ qui est seule nécessaire pour être sauvé et cette foi vous vient en écoutant la parole de Dieu. La doctrine calviniste exige plus qu’une simple connaissance plus ou moins superficielle du Christ; elle n’exige pas seulement de croire en Jésus-Christ, homme. Elle exige que la vie et la conduite d’un homme démontre qu’il aime la justice, alors seulement il sera reconnu membre de l’Eglise des élus. Par conséquent l’Eglise des élus ne peut comprendre les païens des temps présents ni ceux des siècles passés, ceux-ci n’ayant jamais entendu parler du seul et unique nom par lequel l’humanité puisse être sauvée. Ce serait indiquer un maximum que d’admettre que la ving­tième partie des êtres humains depuis Adam jusqu’à nos jours ait jamais entendu parler du Christ et puisse ainsi faire partie de l’Eglise. Or, comme on peut estimer à 50 milliards le nombre des individus qui ont séjourné sur cette terre en y comprenant les 1500 millions de la génération actuelle, les dix neuf vingtièmes, soit 47 ½  milliards d’êtres humains ne sont pas élus et ne comptent pour rien dans les intentions de Dieu. Voyons un peu en quoi conduit cette supposition.

Cela signifierait, que Dieu, connaissant la fin dès le commen­cement, aurait, avant de créer le monde et l’humanité, été décidé à ne compter pour rien et à ne pas élire 47 ½  mil­liards de ses créatures, pour leur accorder vie et bonheur éternels, mais à les torturer éternellement en un lieu, qu’il aurait créé tout exprès à cet effet, un lieu, ou il aurait réuni suffisamment de combustible pour produire le feu nécessaire et l’entretenir éternellement. Et, bien entendu, Dieu aurait préparé un tel lieu en se rendant parfaitement compte de ses épouvantables conséquences.

Mais ce n’est pas tout. Le calvinisme enseigne, que Dieu n’élit pas tel et tel homme, parce qu’il aurait quelque mérite, mais uniquement par sa grâce souveraine. C’est par celle-ci que 2 ½  milliards d’hommes sans mérites seraient rendus à la vie et au bonheur éternels et c’est par le manque de cette grâce souveraine que 47 ½  milliards seraient torturés éternelle­ment. Mais alors nous ne comprenons pas pourquoi, puisque le mérite n’y est pour rien, Dieu n’accorde pas sa grâce souveraine à tous. Il pourrait le faire sans violer en quoi que ce soit les principes de la justice, puisque ce n’est pas le mérite de l’homme, mais la libre volonté de Dieu qui assure l’élection, suivant la doctrine calviniste. Et puis le spectacle des milliards torturés éternellement, ne troublerait-il pas le bonheur des élus? Non, répond le calvinisme; les élus seront doués d’une nature toute différente de la nature humaine; ils pourront contempler les tortures de leurs semblables, de leurs anciens amis ou voisins, de leurs parents, de leurs enfants et, s’en détournant, louer Dieu pour la manifestation de sa justice.

Maintenant, mes chers amis, je n’accuse aucun d’entre vous d’avoir une idée aussi fausse que cela du caractère et des in­tentions de Dieu. Au contraire, je suis heureux de savoir que nos amis parmi les calvinistes répudient généralement cette doctrine contraire non seulement à l’amour, mais encore à la justice de Dieu. C’est avec un vif plaisir que j’ai vu naître dans les églises calvinistes un mouvement tendant à retrancher de leur credo cette épouvantable doctrine, mais j’ai eu la douleur aussi d’assister au triste spectacle du rejet d’une proposition à cet effet, faite dans le milieu de l’église presbytérienne et de la soumission de la minorité qui avait demandé la révision du credo. Comment ces chers amis ont-ils pu consentir à ce que cette croyance abominable et blasphéma­toire soit de nouveau considérée comme la leur? J’aime à croire que le troupeau presbytérien, si jamais il était appelé à trancher la question qui a trouvé une solution si lamentable dans l’assemblée de ses mandataires, renverserait à une forte majorité la décision de ces derniers et aurait à cœur de mani­fester son respect de Jéhovah et sa foi en son amour et en sa justice, en sa puissance et en sa sagesse souveraines. La doctrine calviniste a cherché à bien établir la sagesse et la puissance de Dieu, sa connaissance de l’avenir et son pouvoir pour arriver à ses fins, mais elle a oublié de prendre en con­sidération l’amour et la justice de Dieu et c’est ainsi qu’elle s’est égarée loin, bien loin du but qu’elle voulait atteindre.

On a beau dire que l’amour est un don de grâce et non pas un devoir de la part de Jéhovah, que nous ne pouvons prétendre à autre chose qu’à être traités avec justice et que le sort qui atteint les 47 ½  milliards de condamnés n’est que justice. Ceci est inadmissible. Le pouvoir de créer les hom­mes, ne justifie nullement leur création, si le Créateur savait d’avance (ne fût ce) qu’une seule de ses créatures soit torturée éternellement. La justice exige que le pouvoir ne soit pas exercé au détriment d’un autre, et, exercer son pouvoir en pleine connaissance des terribles conséquences qui en résul­teraient, aurait été une injustice de la part de Dieu. Et la sagesse s’unissant à la justice proclamerait hautement: Mieux, cent fois mieux ne pas créer un être du tout que de le créer en le destinant à souffrir éternellement.

Voici, mes chers amis, ce qu’était l’Evangile pour notre frère Jean Calvin et ce qu’il est pour ceux qu1 se rattachent

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à la confession de Westminster. Mais ce n’est certainement pas l’Evangile dont l’apôtre Paul disait qu’il n’en avait pas honte. Paul aurait certainement eu honte d’un pareil évan­gile, et tous les vrais chrétiens qui ont le vrai esprit de cha­rité et de justice en ont honte; il en est certainement de même de ceux qui malheureusement , grâce au milieu où ils sont nés et n’ayant jamais fixé leurs pensées sur ce sujet, ont consenti jusqu’ici à maintenir et à répandre cette doctrine injurieuse pour le caractère de Dieu.

Nous arrivons maintenant au troisième point de vue faux, qui est la base de la doctrine arminienne, à laquelle se rat­tachent les différentes églises méthodistes et reformées, et les baptistes dissidents. C’est la doctrine qui tend à l’emporter de nos jours. Voici son Evangile: Dieu est amour, il vous aime il aime tout le monde, il fait tout ce qu’il peut pour sauver tout le monde ; si vous vous perdez, c’est votre faute et non pas celle de Dieu.

A première vue, cet évangile parait plus charitable et plus juste que les deux précédents, mais il ne tient pas debout devant un examen tant soit peu sérieux. Il est contraire à l’Evangile scripturaire et il se contredit lui-même. Il est vrai que cela sonne bien de dire que “Dieu fait tout ce qu’il peut” pour sauver le monde dans le temps présent. Mais chacun sait que cela n’est pas vrai, que bien au contraire si vous ou moi ou qui que ce soit possédions la millième partie seule­ment de la sagesse et de la puissance divines, le monde serait bien vite entièrement évangélisé. On ne peut pas avancer non plus que Dieu se soit lié à ne procéder que d’une certaine façon, pour sauver le monde par son église et que si l’église ne fournit pas l’argent et les missionnaires nécessaires, les païens n’en­tendront pas “le seul nom par lequel nous puissions être sauvés”, mais seront condamnés aux tourments éternels. On ne peut pas dire que Dieu fait tout ce qu’il peut, mais que ses efforts restent vains parce que l’Eglise ne s’applique pas à la tâche qu’il lui aurait confiée. Car dans sa sagesse et par sa con­naissance de l’avenir il devait prévoir ce manque d’intérêt de la part de l’église et ne pourrait donc décliner la responsabilité des résultats de son procédé, puisqu’il est le Créateur et qu’il personnifie la Toute Puissance et la Sagesse souveraine. Main­tenir ce point de vue, c’est admettre que Dieu se soit trompé en confiant à l’Eglise la tâche de convertir le monde, tout en sachant d’avance qu’elle ne l’accomplirait pas. C’est plutôt vouloir excuser Dieu de ce qu’il ne fasse pas tout ce qui est en son pouvoir, que de prouver qu’il fait tout ce qu’il peut.

Mais regardons y encore de plus prés. Si vraiment Dieu fait et a fait tout ce qui est et ce qui était en son pouvoir pour sauver le monde, quel est donc notre espoir? Comment espérer qu’un jour les choses changeraient, puisqu’elles n’ont point changé malgré tous les efforts de Dieu? Ce point de vue présume une lutte entre le Tout-Puissant et Satan, dans laquelle chaque combattant tâche de gagner le genre humain. Mais puisque jusqu’ici Satan a eu je dessus, comment Dieu resterait-il le Tout-Puissant ? Au moment de leur création, Adam et Eve étaient certainement du côté de Dieu; mais 1656 ans plus tard, tous leurs descendants, à l’exception de 8 personnes, furent anéantis dans le déluge, Dieu les avant jugés trop mauvais pour continuer à vivre. Puis Dieu régénéra l’humanité par les huit personnes jugés dignes, suffisamment Justes pour vivre encore, qu’est alors devenue leur descendance? L’histoire de Sodome et de Gomorrhe nous en donne un exemple; et de nos jurs, où la terre est peuplée de 1500 millions de descendants de Noé, il n’y pas plus de 100 mil­lions de catholiques et 100 millions de protestants, auxquels la parole de Dieu est accessible, mais dont un très petit nombre seulement peut être considéré comme vraiment éclairé par cette parole. Que cela signifierait-il si vraiment le point de vue arménien était juste, ce que Dieu ait fait tout ce qu’il pouvait pour  sauver le monde? Il s’en suivrait, que malgré toutes ses intentions d’amour et de grâce, Dieu ne serait pas a même de suffire à la tâche qu’il aurait entreprise. Et si tel est le résultat des 60 siècles passés, que pouvons-nous espérer pour l’avenir? Combien faudrait-il de millions d’années pour la conversion du monde? La statistique nous renseigne à ce sujet d’une façon positive. L’augmentation naturelle du genre humain est de beaucoup supérieure chaque année à l’augmen­tation du nombre des croyants, même en comptant toutes les naissances en pays chrétiens et toutes les conversions obtenues  en  pays païens par les efforts des missionnaires comme acquises pour la partie convertie de l’humanité. Ainsi le pour cent de chrétiens va diminuant d’année en année. Qui maintiendra en face de ces faits que Dieu ait fait tout ce qu’il pouvait pour la conversion du monde? S’il y en a quand même, qui croient à ces efforts de Dieu, qu’ils abandonnent tout espoir pour l’avenir!

Nous voyons donc que d’une part le calvinisme, tout en croyant à la toute-puissance et à la sagesse de Dieu, le fait au détriment de sa justice, et que d’autre part l’arminianisme admet bien l’amour infini de Dieu, mais au détriment de sa toute- puissance et de sa sagesse. Or le vrai Evangile doit faire voir que la toute-puissance et la sagesse de Dieu sont en plein accord avec sa justice et son amour. Les deux soi-disant évangiles protestants ne diffèrent d’ailleurs pas dans leur résultat. L’un et l’autre condamnent aux tourments éternels 47 ½  milliards d’êtres humains et n’annoncent que des méthodes différentes pour sauver le reste de l’humanité de cet horrible sort. Seulement certains arminiens déclarent que ses tourments ne sont pas des flammes, mais le désespoir des con­sciences réveillées trop tard ; mais cette peine-là ne serait en rien inférieure aux flammes réelles et ne constituerait aucune consolation pour ceux qui se débattent désespérément contre de si épouvantables croyances. Que les tourments frappent les hommes, parce que Dieu manquerait d’amour et de justice ou qu’ils les frappent parce que Dieu serait incapable de les en préserver, ceci ne serait d’aucune importance pour les condamnés. Nous pensons donc qu’aucun vrai chrétien, après avoir examiné la question jusqu’à ce point, ne puisse approu­ver l’une ou l’autre de ces doctrines, mais qu’il en aurait honte.

Examinons donc maintenant le Vrai Evangile, tel qu’il nous est révélé par la parole de Dieu, l’Evangile dont l’apôtre Paul n’avait pas honte.

Le mot “évangile” nous donne la clef de cette énigme et son étymologie mettra tout chrétien à l’abri des erreurs répandues sous cette belle étiquette. “Evangile” signifie, c’est un fait bien connu, ,,bonne nouvelle” et si quelqu’un peut con­sidérer sérieusement comme une bonne nouvelle que la plus grande partie de l’humanité est condamnée à d’horribles tour­ments éternels, physiques ou moraux, il n’est pas chrétien du tout ou alors son caractère de chrétien, sa charité, son équité ne sont pas développés du tout. Nous le considérons comme un tout petit enfant ayant encore besoin du lait de la Parole afin de grandir et de développer les forces nécessaires pour supporter la nourriture des adultes (en Christ), qui lui fera voir comme à tous les saints la longueur et la largeur, la hauteur et la profondeur de l’amour de Dieu qui dépasse tout ce que nous pouvons comprendre.

Si occasionnellement nous trouvions sur notre chemin un homme qui aime la religion chrétienne et qui maintienne quand même des opinions si hideusement blasphématoires à l’égard de Dieu, notre Père céleste, nous lui citerions la parole que le Seigneur nous adresse par son salut prophète “ Esaie 55 : 8, 9): “ Mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne sont pas mes voies; autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies et mes pensées au-dessus de vos pensées ” Et dans mon al­locution d’aujourd’hui je désirerais pouvoir faire voir à ceux d’entre vous, mes chers amis, auxquels Dieu a oint les yeux afin de les rendre capables de discerner les choses spirituelles quelques-unes des voies et, des intentions sublimes de notre Seigneur, voies et intentions que sa parole désigne sous le nom d’Evangile, soit bonne nouvelle.

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 L’apôtre nous affirme que Dieu annonça “ d’avance ” cette bonne nouvelle à Abraham, c’est à dire avant que la nouvelle dis­pensation commençât, car celle-ci ne date pas d’Abraham, mais de notre Seigneur Jésus-Christ. L’apôtre l’affirme par les paroles que nous lisons (Héb. 2 :3): ,,Le salut fut première­ment annoncé par notre Seigneur et nous fut confirmé par ceux qui l’ont entendu.” Ce qui précéda la prédication de notre Seigneur n’a donc pu être que types et promesses, don­nant une idée peu claire encore de ce qui arriverait en son propre temps. L’apôtre nous dit lui-même (Gal. 3 : 16, 29) en quoi consistait la bonne nouvelle annoncée à Abraham; c’était la promesse: “ En toi seront bénies toutes les nations.” Notez-le bien, la promesse ne dit pas: En toi sera bénie la millième partie de toutes les familles de la terre et le reste sera condamné à la plus épouvantable existence éternelle. Non, la bonne nouvelle annoncée à Abraham intéresse l’humanité entière: ce sont toutes les familles de la terre qui seront bénies par le Christ, la vraie descendance d’Abraham.

Lorsque notre Seigneur Jésus naquit sur cette terre, le Père céleste fit annoncer cet événement, et les anges qui furent chargés de ce message, se déclarèrent porteurs d’une bonne nouvelle. Ecoutons-le bien ce message, il ne dit rien à propos des tourments éternels qui attendent soi-disant l’énorme ma­jorité du genre humain. N’ayez point de peur, dit l’ange aux bergers; ,,je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera pour tout le peuple [tout le monde] le sujet d’une grand joie” (Luc 2 : 10). Remarquez bien que ni la bonne nouvelle annoncée par les anges ni la bonne nouvelle communiquée à Abraham ne parlait de condamnation et de misère éternelles ne fût-ce que pour une seule créature du Seigneur. Il s’en suit que nos amis salutistes et autres, prêchant dans leur aveuglement les tourments éternels et nommant leur doctrine l’évangile (la bonne nouvelle), le font a l’encontre non seulement de la signi­fication du mot “ évangile ”, mais encore en opposition à ce que l’Ecriture déclare être le contenu de l’Evangile. Il va de soi qu’ils sont absolument de bonne foi dans leur prédication, mais cela n’empêche pas qu’ils se trouvent dans l’erreur, dans une grosse erreur et nous espérons toujours, qu’un jour la lumière provenant de la connaissance de la bonté de Dieu éclairera leur cœur et les guérira de leur aveuglement qui ne vient point de Dieu ni de Sa précieuse parole, mais du prince des ténèbres. —          2 Cor. 4 : 4.

Il faudra tout l’âge millénaire (qui fera suite à l’âge évan­gélique, à la fin duquel nous vivons) pour faire parvenir à toutes les familles de la terre le bonheur qui résulte de la connaissance de la grâce de Dieu en Christ. Les 47 ½  milliards descendus dans la tombe sans avoir entendu parler du Sau­veur, sans avoir eu l’occasion d’obtenir une connaissance par­faite de la vérité, la bonne nouvelle de la grand joie n’étant jamais parvenue jusqu’à leurs oreilles, reviendront ou ,,sor­tiront” tous afin d’avoir l’occasion de l’entendre et d’y croire, afin d’être trouves dignes de la vie éternelle, si non pour être détruits à tout jamais par la seconde mort. Leur résurrection pour être instruits est aussi sûre que leur mort dans l’igno­rance, pour trois raisons: 1) Parce que l’Evangile annoncé à Abraham dit que toutes les familles de la terre seront bénies (rendues heureuses), parce que les 47 ½  milliards d’êtres hu­mains font partie de “ toutes ces familles ” et parce qu’ils n’ont point encore eu le privilège de connaître l’unique nom en le­quel ils seront bénis; 2) parce que le message des anges lors de la naissance de notre Seigneur à Béthléhem annonçait une grande joie pour ,,tout le peuple”, tout le genre humain dont les 47 ½  milliards font certainement aussi partie; 3) parce que Christ est mort pour les injustes et a passé par la mort pour tout homme et qu’il est donc absolument nécessaire que tout homme ait l’occasion de profiter de cette mort et de devenir digne de la vie éternelle que la mort et la résurrection de notre Seigneur lui ont acquise.

Dira-t-on que Christ n’est mort que pour les péchés des élus et non pas pour ceux du monde, ceux-ci ne pourra eut donc être pardonnés? Non! L’Ecriture ne dit pas seulement d’une façon catégorique que Jésus, par la grâce de Dieu, souffrit la mort pour tous les hommes” (Héb. 2 : 9); mais l’apôtre (1 Jean 2 : 2) ajoute: ,,Il est lui-même une victime expiatoire [la propitiation ou satisfaction] pour nos péchés (ceux de l’Eglise) et non seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux du monde entier”. Peut-on être plus clair et positif? Puisque la rançon pour le péché de tout le monde a été payée à la Justice, nous pouvons être tout à fait sûrs que la Justice fournira, par le Rédempteur, une occasion à tout le monde, de connaître le Christ et son œuvre, et d’accepter la grâce divine, la vie éternelle.

Dira-t-on: ,,Pourquoi Dieu prit-il un parti qui nécessite une résurrection des morts? Pourquoi l’occasion de se rendre digne de la vie éternelle par la soumission aux commandements de Dieu n’est-elle pas fournie dans cette vie, mais dans la vie après la résurrection?” Nous y répondrons que, tout d’abord nous n’avons pas à nous enquérir des raisons, pour lesquelles notre Seigneur suit des procédés différents de ceux que nous jugerions convenables pour lui. Nous faisons mieux de recon­naître que notre sagesse à nous ne suffirait pas à cette tâche et d’écouter humblement ce qu’il veut bien nous révéler à pro­pos de ses plans. Alors seulement nous jouirons du privilège de voir la vérité et de nous rendre compte avec tous les saints de la longueur et de la largeur, de la hauteur et de la pro­fondeur de l’amour de Dieu. — Eph. 3 : 18.

Dieu, en effet, a bien voulu nous révéler quelques-unes des raisons qui l’ont engagé à suivre la méthode que nous voyons. Il nous affirme sa sagesse souveraine, son pouvoir de régler ,chaque détail de son œuvre comme il l’entend, il nous dit, qu’il connaît la fin dès le commencement et que le résultat justifiera pleinement toutes les mesures prises. La Bible et l’histoire générale nous montrent que pendant les 6000 ans l’humanité a eu l’occasion de voir et de comprendre la portée du péché, son salaire consistant en la souffrance et en la mort. Sa parole nous apprend que dans l’âge à venir, dans le Millénium, tout le monde sera amené à connaître la voie de la justice, de l’amour et de la paix et pourra consta­ter de ses propres yeux la bénédiction qui découlera de cette voie sur l’humanité entière. Ainsi celle-ci apprend d’abord à savoir ce que c’est que le mal et son résultat, puis ce que c’est que le bien et ce que la providence divine peut faire de ce bien. Ce sont les Rois et Prêtres (la sacrificature royale), les membres du Christ qui fourniront ces dernières connaissances aux hommes et les rendront capables de subir l’examen auquel le Seigneur Jésus les soumettra afin de savoir les­quels seront obéissants et fidèles et, partant, dignes de vivre éternellement et lesquels, par contre, seront restés désobéissants, auront persisté dans leur résistance et seront donc ,,exterminés du milieu du peuple”. — Actes 3 : 23.

La parole de Dieu nous l’affirme formellement, car elle nous dit que la “ semence (la postérité) d’Abraham” qui bénira toutes les familles de la terre, n’est point une personne, mais une classe, car cette descendance est le Christ chef de l’Eglise et 1’Eglise elle-même en sa qualité de corps du Christ. Non pas l’Eglise nominale, l’Eglise du grand nombre qui fait pro­fession de christianisme, mais la véritable Eglise, composée de ceux dont les noms sont inscrits dans les cieux, qui mar­chent dans les traces de leur Seigneur et qui, pour avoir été trouvés fidèles jusqu’à la mort, recevront avec leur Seigneur la couronne de la vie: l’immortalité. L’âge de l’Evangile, placé entre le grand sacrifice pour les péchés du monde et le com­mencement des bénédictions a répandre sur les milliers de millions qui jamais ont habité cette terre, a été destiné par Dieu à la recherche et à l’élection du corps de Christ, de l’Eglise, de l’Epouse, du petit troupeau, des prêtres-rois, des cohéritiers de Christ en son Royaume. L’appel adressé à ceux-ci est “ supérieur ”, “ céleste ”, et le salut, qui sera leur part est de beaucoup supérieur à celui que Dieu réserve au monde en général. Il choisit maintenant ce petit troupeau, le purifie, le met à l’épreuve, le rend apte à recevoir la Royauté céleste, la nature spirituelle, divine, et c’est ce petit troupeau, dont l’apôtre Pierre déclare que Dieu lui a donné “ les plus grandes et les plus précieuses promesses (supérieures bien au delà de toutes autres promesses données à toute autre créature), afin que par elles (par ces promesses) il devienne participant de la nature divine”. C’est l’appel céleste en opposition avec le salut terrestre préparé à tous ceux qui au “ propre temps ” de Dieu voudront l’accepter.

C’est précisément ce qui est nommé la destination pour le ciel en opposition au salut terrestre destiné à tous ceux qui voudront bien l’accepter quand il leur sera offert en son temps.

Vous voyez donc, chers frères et sœurs, que l’Evangile est plein de parfaites beautés. Il ne suffit pas à Dieu de nous assurer que, le temps venu, toutes les familles de la

    85 Novembre 1904

à devenir membres du Christ, du corps de Christ. L’apôtre n’a-t-il pas raison de nommer cela notre appel supérieur, notre appel céleste et de nous exhorter à nous libérer de toutes chaînes et à parcourir avec patience le chemin que 1’Evangile nous trace, en fixant nos regards sur Jésus, l’auteur de notre foi jusqu’à ce qu’il puisse en devenir le consommateur?

Voilà, chers amis, la bonne nouvelle que l’Ecriture annonce, que Paul annonce et dont il n’avait point honte. Cette bonne nouvelle fait apparaître sous un jour resplendissant de beauté le caractère de notre Créateur. Sa sagesse lui permet­tant de connaître la fin dés le début, sa puissance lui permet­tant d’arriver toujours à ses dernières fins, sa justice, base de son plan sublime étant en plein accord avec tous les principes de l’équité, son amour, dont nous n’avons point encore pu explorer l’étendue dans toutes les directions. Cet amour a pitié de ses créatures déchues, cet amour nous donna un grand Sauveur, cet amour poussa ce Sauveur jusqu’à donner Sa vie comme rançon du péché et de la mort, cet amour sut et voulut satisfaire à toutes les exigences de la justice suprême à notre place, cet amour entoure encore l’humanité de nos jours et nous offre d’être cohéritiers de son Fils, d’une nature et d’une dignité de beaucoup supérieures a celles des anges et de toutes les puissances de la terre et du monde spirituel. L’apôtre Jean dit de cet amour: ,,Voyez de quel amour pour nous Dieu a fait preuve de vouloir que nous soyons appelés les fils de Dieu.” Cet amour, toujours à l’œuvre, réserve aux fils de Dieu pour le jour où ils seront le corps glorifié du Christ, une participation au grand œuvre à accom­plir, celui de bénir toutes les familles de la terre, c’est à dire de leur fournir toutes les connaissances et de les assister dans leur marche sur 1e grand chemin” qui conduit à la sainteté (Esaïe 35 : 8), afin que tous ceux qui le voudront bien puissent retrouver tout ce qui a été perdu par la chute d’Adam, en se mettant d’accord avec Dieu par le moyen du grand Médiateur. — Actes 3 :19—21.

Voici mes chers amis, une bonne nouvelle dont nous n’a­vons point honte! Car elle annonce le pouvoir de Dieu de sauver chacun qui croit. Elle transforme et renouvelle nos cœurs, elle nous sanctifie, alors que jamais aucune erreur ne pourrait nous sanctifier; elle est bien plus efficace que la théorie des tourments éternels que bien des chrétiens dans un zèle aveugle déclarent être indispensable pour amener les âmes au Sauveur. Faisons voir de plus en plus tous les traits sublimes de notre Dieu qui nous a appelés hors des ténèbres et nous fait habiter dans sa merveilleuse lumière; renonçons à toutes les théories, toutes les croyances qui déshonorent Dieu et annonçons la Parole de vie, soyons des témoins de la vé­rité, de la grande joie réservée à tout le monde.

Mais tous ceux qui voudront annoncer le vrai Evangile auront grand besoin de l’esprit de paix, de douceur, de patience; car ils auront à affronter l’opposition exaspérée des chrétiens de nom, qui sont aveuglés et remplis de préjugés par l’évangile défiguré que Satan a su leur faire accepter. Car Satan sait parfaitement que par la défiguration de l’Evangile il em­pêche tous ceux qui ne renoncent pas à la raison en matière religieuse, de venir à Dieu. Quiconque a des oreilles pour écouter et entend le vrai Evangile, le distinguera sans peine des misérables contrefaçons qui pendant si longtemps ont joui de tout le crédit auprès du peuple de Dieu. Que ceux-ci se souviennent, qu’être capables de voir est un don de la grâce divine; qu’ils n’aient donc point honte, mais qu’ils louent Dieu à ce sujet Qu’ils se souviennent que l’opposition qu’ils rencontrent de ce chef de la part du grand nombre, est là pour les mettre à l’épreuve. Le plan, la parole de Dieu sont les représentants de Dieu, et c’est d’eux que le Seigneur parle dans Marc 8 :38, où nous lisons: ,,Quiconque a honte de moi et de mes paroles, . . . le Fils de l’homme aura honte de Lui quand il viendra dans la gloire de son Père avec les saints anges.”

“ Une bonne nouvelle de grande joie qui sera pour tout le peuple.”