La prédestination divine ou ce qui concerne l’humanité.

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“ Ceux que Dieu a connus d’avance il les a aussi prédestinés.”

  • Rom. 8: 29. —

Nous prenons ce sujet parce que nous croyons qu’il est susceptible d’une explication scripturaire raisonnable et tout à fait satisfaisante pour les chrétiens consacrés. Nous espérons démontrer que les difficultés qui entourent la question ne reposent pas tant dans les exposés de l’Ecriture, mais dans les erreurs des divers credo et des traditions, qui non seulement annulent l’enseigne­ment de la parole de Dieu, mais embrouillent le peuple de Dieu sur ceci comme sur tant d’autres sujets. La doctrine de la prédestination est scripturaire, raisonnable et belle, elle confirme la foi en Dieu, en sa parole et en ses plans qui restent encore à accomplir: “Mes pen­sées ne sont pas vos pensées et vos voies ne sont pas mes voies, dit l’Eternel. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies, et mes pensées au-dessus de vos pensées. ” — Esaïe 55 : 8—9.

Les difficultés de la soi-disant orthodoxie.

Avant d’aborder plus profondément notre sujet, il est utile que nous jetions un coup d’œil sur l’idée communément acceptée de la prédestination et sur les difficultés qu’elle présente, pour que, nous en détournant, nous puissions voir la beauté et la justesse de l’exposé biblique. Nos amis méthodistes et quelques autres ignorent le sujet de la prédestination, mais non sans difficulté pour eux; car ils ne peuvent éviter ce dilemme: ou bien le Tout-Puissant savait d’avance ce qu’il allait faire et ce qu’il fait, ou bien il travaille à l’aventure, à un plan de pur hasard dont il ne connaît pas même les résultats. Penser que nous avons affaire à un Dieu qui n’est pas om­niscient cela amènerait nécessairement une diminution sérieuse de notre foi, de notre confiance et de notre espérance en Lui. Nous pourrions nous représenter Dieu comme bien intentionné, bien disposé; mais si nous n’avions confiance en sa prescience — en sa connais­sance de la fin comme du commencement — l’apparente faillite du plan divin dans les six mille ans écoulés, découragerait sérieusement notre foi et notre espérance concernant l’avenir.

D’autre part, nos amis presbytériens, luthériens, con­grégationalistes et baptistes, avec d’autres qui, comme eux, soutiennent la doctrine de la prédestination, ont aussi leurs difficultés.

Soutenir que Dieu prévit et prédestina toute chose qui arrive, semble aboutir à la conclusion que Dieu lui-même a été l’auteur et l’instigateur du péché — que c’est lui le coupable — et à la conclusion naturelle que tous ceux qui furent saints, furent prédestinés à l’être, de même que tous les méchants furent prédestinés à être méchants; cela étant stipulé ainsi dans le plan de Dieu avant la fondation du monde et partant avant la création du premier couple, ce qui augmente encore la difficulté. Si à cela nous ajoutons encore les credo écrits ou non écrits de toutes ces dénominations, montrant le petit troupeau allant dans le coin du ciel prédestiné pour lui, pendant que la grande multitude de l’humanité ira dans un vaste lieu appelé enfer, préparé avec soin, pour­vu d’un corps complet de diables cornus à l’épreuve du feu et d’un combustible extra qui dura et durera de toute éternité, cette doctrine devient tout à fait monstru­euse. Croire que c’est là ce que Dieu a préparé pour la grande majorité de la race, — fait avant que la création ait commencée — rien d’étonnant à ce que cela ébranle nos chers amis. Tant mieux pour eux s’ils commencent à renoncer à leur théorie païenne et si quelques-uns ouvrent les yeux de leur intelligence pour avoir un meilleur éclaircissement sur ce sujet!

Leur ”Enfer ” voilà la difficulté.

La difficulté pour ceux qui soutiennent l’idée dite orthodoxe de la prédestination réside en leur enfer imaginé — en leur idée fausse sur ce qui constitue le salaire du péché: la mort. S’ils pouvaient se débarrasser de l’enfer de feu, de la théorie des tourments éternels, de moyenâgeuse mémoire, quand les hommes s’imagi­naient rendre service à Dieu en torturant et en brû­lant leurs semblables; et si, à la place de cette idée fausse et répugnante, ils pouvaient comprendre la véri­table idée scripturaire — que la mort, l’annihilation est le salaire du péché — ils banniraient ainsi de leur esprit le grand obstacle qui les empêche de voir la pré­destination sous son véritable jour.

Il est un fait positif c’est que dans les Ecritures le mot prédestination n’est jamais employé à l’égard des méchants, ni même à l’égard de tous les bons. Il n’est appliqué qu’à l’Eglise et à ses intérêts; jamais au monde. Nous ne voudrions pas suggérer la pensée qu’en faisant usage de son omniscience Dieu n’ait pu savoir à avance tout ce qui concerne le monde, mais nous voulons simplement

107 Janvier 1908

indiquer que tous les Passages y ayant rapport sont pour l’Eglise et à l’égard de l’Eglise seule.

Prescience et Prédestination.

C’est une erreur très répandue de confondre pres­cience et prédestination. Le sens n’est pas du tout le même; il y a une nuance très appréciable. Dieu, un être omniscient, sait toutes choses et pendant les 6000 ans écoulés depuis la chute d’Adam, il a permis au péché de se manifester sous diverses formes, mais ne l’a pas préordonné.

“Toutes les œuvres de Dieu lui sont connues de toute éternité” (Act. 15 :18). Savoir d’avance que la dégra­dation morale, mentale et physique suivrait le péché d’Adam; que la mort serait la conséquence de sa dé­sobéissance et qu’ainsi toute la famille humaine serait plongée dans la dégradation et la mort et deviendrait une création gémissante, est une chose: mais prédestiner, décréter ou provoquer l’arrivée de toutes ces choses, c’est une toute autre affaire.

Dieu nie qu’il soit en aucun sens du mot, l’auteur du mal. Il admet qu’il est l’auteur de beaucoup de choses appelées maux dans le monde, qui sont des ca­lamités et qu’il les a permises et même ordonnées pour le châtiment du péché et de la méchanceté. Mais il se déclare contre tout péché, se pose lui-même comme la perfection de la justice, de la pureté et de la vérité et exhorte le pêcheur en tout lieu à se repentir et se réformer — a cesser de faire le mal et à faire le bien. La prescience divine vit d’avance Adam parfait et vi­vant dans un milieu parfait, mais doué de connais­sances imparfaites et de ce fait encore sujet à la ten­tation: il prévit sa chute dans le péché, toutes les conséquences telles qu’elles sont arrivées; il les permit sans pour cela qu’elles fussent prédestinées. La pré­destination ne vint que lorsque Dieu se proposa le salut d’Adam et de sa race. Il prédestina détermina d’avance, ce qu’il ferait. Il produirait un Rédempteur qui donnerait aux anges comme aux hommes, une leçon, un exemple non seulement par sa miséricorde et ses compassions envers nous pécheurs mais aussi par sa propre justice en démontrant l’invariabilité de la loi divine en ce que la sentence de mort une fois prononcée ne pouvait être annulée: sauf pour relever Adam de cette condamnation, à le remplacer par un autre qui prit sa place et mourut pour lui et sa postérité.

Le Père prédestina, préétablit que son Fils unique qui était bien au-dessus des anges et des hommes, serait le Rédempteur. Pour cela il fallut que Jésus se dévêtit de la gloire qu’il avait alors auprès du Père et qu’il revêtît la nature humaine terrestre. Dieu prédétermina que cela s’accomplirait au temps par lui marqué; nous savons que ce temps fut de plus de 4000 ans, après que le péché fut commis.

Il y a plus; le Père prédestina que son Fils ne per­drait rien, mais gagnerait à une telle obéissance au plan divin; que la récompense serait une exaltation à un rang plus élevé que celui qu’il occupait déjà au-dessus de toute autre créature: le plus proche du Père.

Il prédestina qu’au moment de sa consécration, quand il aurait 30 ans, il serait engendré par le Saint-Esprit à une nouvelle nature; dans cet état il vaqua à son ministère terrestre pendent trois ans et demi — mort selon la chair, mais vivant selon l’esprit — il prévit que le Cal­vaire serait la fin de son ministère. Dieu prédestina aussi que trois jours après Jésus ressusciterait comme nouvelle créature, être spirituel de nature divine, souve­rainement élevé au-dessus des anges, des principautés et des puissances et de tout nom qui puisse être nommé, pour ne plus mourir, mais au contraire dans un temps futur et fixé, posséder la royauté de la terre et bénir Adam (et toute sa race) qu’il a racheté par sa vie, par son précieux sang.

La prédestination inclut le Règne glorieux de l’âge millénaire dans lequel le Messie sera Roi sur toute la terre et exercera son autorité en empêchant Satan et le mal d’agir et en amenant l’humanité à la connaissance de la vérité en vue de la vie éternelle pour tout homme qui voudra y parvenir.

La prédestination de l’Eglise.

D’un bout à l’autre des Ecritures, l’Eglise, les membres du petit troupeau sont mentionnés comme “les élus” de Dieu; ceux-là mêmes qui disputent sur la doctrine de l’élection, ne peuvent contredire ce fait. Comme nous venons de le montrer leurs objections contre cette doc­trine, leur désir de la nier, provient de la croyance en ce que la minorité des hommes est élue pour le ciel, tandis que la majorité est prédestinée aux tourments éternels; mais les Ecritures nous le répétons n’annoncent rien de semblable. Elles enseignent que le monde entier fut racheté par le sang versé de Jésus et qu’il doit re­cevoir une bénédiction au temps arrêté d’avance des mains de ce Rédempteur: que ce temps sera la période de l’âge du Millénium, le temps du Règne du Messie; mais qu’avant cela, pendant l’âge de l’Evangile, le Sei­gneur a élu ou choisi d’entre les rachetés du monde un “ petit troupeau”, une sacrificature royale qui sera associée au Rédempteur dans son œuvre de bénédiction de toutes les familles de la terre.

Cette idée que l’élection de l’Eglise n’entraîne pas essentiellement la réprobation du monde, mais au contraire la bénédiction du monde par l’Eglise élue, est sans ob­jection à tous points de vue. Une telle élection est avantageuse et désirable dans toute l’acception du mot. C’est une élection semblable à celle que le monde ap­plique à ses formes de gouvernement. Les législateurs et les gouverneurs du peuple sont choisis ou élus d’entre tous dans le but de servir et de bénir la totalité. Les élus sont peu nombreux, les non-élus sont nombreux, cependant la nécessité de l’élection et les avantages qui en résultent sont pleinement appréciés. Mais il ne vient à personne l’idée de supposer que ceux qui ne sont pas élus comme représentants du peuple soient de ce fait condamnés aux galères à perpétuité ou même à la peine de mort.

D’OÙ vient donc l’interprétation ridiculement absurde que l’on attribue faussement à l’Ecriture sur l’élection — cette supposition que tous à l’exception des élus devront souffrir des tortures éternelles parce qu’ils ne furent pas des élus’?

Prévu est prédestiné.

Nous pourrions citer de nombreux passages des Ecri­tures, en dehors de notre texte pour prouver que l’Eglise fut préconnue et prédestinée de Dieu comme une classe

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destinée à occuper une certaine position glorieuse en rapport avec le plan divin pour le salut du monde. Par exemple St. Paul (Eph. 1 : 5) parle du Seigneur comme nous ayant prédestinés a être adoptés comme fils; il ajoute (v. 11) que nous sommes “prédestinés ” selon le dessein de Dieu. St. Pierre aussi parle de l’Eglise élue selon la prescience de Dieu. — 1 Pierre 1 : 27.

Une erreur qui semble obscurcir l’esprit de beaucoup de personnes, c’est la supposition que cette prédestination de l’Eternel concernant les élus était une prédestination individuelle de chacun; que le Seigneur nous avait pré connus, vous et moi; qu’il détermina avant la fondation du monde que nous ferions partie de l’Eglise élue. Rien de pareil ne se trouve dans les Ecritures sacrées. Nous y trouvons une déclaration que l’Eglise en bloc, comme épouse ou associée du Seigneur Jésus, fut pré connue et prédestinée du Père; et en harmonie avec cette prédes­tination Dieu a appelé hors du monde des individualités particulières, zélées pour les bonnes œuvres et pleines de foi en ses promesses, à condition que celles-ci affermissent leur vocation et leur élection et puissent par obéissance et accomplissement de leur vœu de consécration entrer dans le cadre des vrais élus, qui forment l’Epouse glorifiée du Christ. Ce sont ceux-là que le Père voulut et prédestina.

Il ne nous appartient pas de dire que Dieu aurait pu savoir par avance, s’il l’avait voulu, comment chacun de ceux qui entendent l’appel et y répondent se con­duiront dans la suite de leur course, en s’efforçant de gagner le grand prix de cohéritiers avec son Fils, mais il nous appartient de savoir que Dieu n’a indiqué nulle part une telle élection individuelle et une telle prédes­tination. Et il nous convient de remarquer que tout ce qui y a trait appartient à l’Eglise dans son ensemble et non à ses membres individuellement avant que chacun ait pour lui-même affermi son appel et son élection selon la grâce de Dieu, par l’obéissance aux termes de son alliance.

Ainsi le sujet est magnifiquement clair à la lumière de notre texte, après que notre esprit a été libéré des absurdités qui l’a si longtemps faussé. L’apôtre com­mente ce qui concerne l’Eglise élue. Il nous assure que Dieu est pour nous et non contre nous; que si les diffi­cultés et les épreuves rencontrées sur notre chemin peuvent paraître contraires à nos intérêts, néanmoins nous avons l’assurance de la parole de Dieu, que si nous sommes vraiment siens, il gouvernera toutes nos affaires pour que toutes choses concourent à notre bien, parce que nous l’aimons et avons été appelés selon son dessein, en harmonie avec sa prédestination.

Il prédestina qu’il y aurait une Eglise et il a eu soin que le message, l’invitation ou l’appel à être membres de cette Eglise nous fut adressé. Le fait que nous avons entendu et apprécié cet appel est une certitude que Dieu est pour nous et désire que nous l’affermissions en prenant place dans cette glorieuse élite prédestinée.

Voilà les “appelés” selon sa prescience, qu’il voudrait encourager, auxquels l’apôtre explique la méthode de leur prédestination, disant: Ceux qu’il a connus d’a­vance, il les a aussi prédestinés à être semblables à l’image de son Fils, afin que son Fils soit le premier-né d’entre plusieurs frères. L’Eternel prédestina donc avant la création de l’homme que pour accomplir l’œuvre de la Rédemption, il choisirait parmi les hommes la classe de l’Epouse, et il préétablit aussi que chacun de ceux de cette élite serait “une image de son Fils ”, aurait la ressemblance du caractère de Jésus.

Fut-ce là une prédestination certaine? Oui, véri­tablement! Cette prédestination permet-elle à n’importe qui d’entrer dans la classe de l’Epouse, s’il possède un caractère différent de celui de son Seigneur et Rédemp­teur? Non, point du tout! Elle fixe et limite absolument la classe et tous comprendront que les limites sont tout ce qu’il y a de juste et raisonnable. Le Tout-Puissant a une grande faveur à accorder et il la propose à un certain nombre limité disant que quiconque veut faire partie de cette élite doit ressembler au Sei­gneur Jésus. Nos cœurs disent amen à une telle glo­rieuse prédestination. Voilà le sujet en entier. Il n’est fait mention d’aucune autre prédestination.

Les Ecritures nous montrent diverses classes de gens sauvés, en des degrés d’existence plus ou moins élevés: mais la classe élue occupe le plus haut degré: les mem­bres sont faits “participants de la nature divine”.

(Suite et fin au prochain numéro.)