«L’amour n’est pas envieux.» — 1 Cor. 13:4.
L’histoire de Joseph et de ses frères, récit admirable dans sa simplicité, est profondément intéressante et instructive à différents points de vue. Une des leçons à en retirer est l’imprudence d’un père de montrer une plus grande préférence pour un enfant que pour un autre et de cultiver ainsi, parmi les enfants, un esprit d’envie. Une autre leçon est l’imprudence de raconter, même nos songes, à des auditeurs peu sympatiques, comme l’étaient les frères de Joseph lorsqu’il leur raconta les siens. Dans l’un de ses songes, il vit onze gerbes de froment prosternées devant une gerbe qui était la sienne. Dans l’autre il vit le soleil, la lune et onze étoiles lui rendant tous hommage.
Joseph ne pouvait pas être blâmé pour avoir eu ces visions. Contrairement à la majorité des rêves, elles ne provenaient pas apparemment d’une indigestion, mais de l’Eternel. Joseph ne pouvait même pas être blâmé parce qu’il en fit naïvement le récit à ses frères, si c’était la chose que Dieu s’était proposé de faire. L’Eternel pré-connut la jalousie des frères de Joseph, comment l’envie serait cultivée dans leurs coeurs et il leur donna l’occasion de la cultiver, car il avait déjà tracé les expériences subséquentes de Joseph, que l’envie de ses frères aida simplement à accomplir.
Nous pouvons apprendre la leçon qu’en général, il est sage de conserver pour soi des vérités, qu’il n’est pas nécessaire à un autre de connaître, et qui ne pourraient que soulever de l’opposition. Jésus encouragea cette même pensée disant: « Ne jetez pas vos perles devant les pourceaux, de peur… qu’ils ne se retournent et ne vous déchirent. »
Il serait préférable de ne pas raconter des vérités très profondes, se rattachant du plan divin et aux expériences chrétiennes, à d’autres qu’à ceux pour lesquels le Seigneur les destine, à savoir aux humbles.
JOSEPH TYPE DU MESSIE
Le point le plus important de cette étude biblique, à part ceux que nous avons indiqués, est celui qui reconnaît Joseph comme un type, une figure prophétique de Christ, le Messie. Joseph était plein de bonté pour ses frères, il leur porta un message de compassion lorsque, par leur envie, ils complotèrent sa mort et enfin le vendirent pour être esclave en Egypte. Ses frères le haïssaient sans cause, simplement parce qu’il était bon, parce que son père l’aimait, et parce que, dans les visions qu’il eut, Dieu préfigurait son élévation future.
Les frères de Joseph auraient dû dire: Réjouissons-nous de ce que nous avons un frère aussi noble! Réjouissons-nous, si c’est la volonté de Dieu qu’il soit si hautement élevé; la promesse de Dieu faite à nos grands-pères Abraham et Isaac et à notre père Jacob pourrait ainsi avoir un accomplissement. Que les bénédictions de Dieu viennent de la manière qu’il juge la meilleure! Nous voulons nous réjouir avec notre frère, voyant que celui-ci plaît à Dieu et à notre père Jacob. Nous chercherons de plus en plus à imiter son caractère, mais ils furent, au contraire, envieux jusqu’à la cruauté, décidant de le faire mourir et ensuite, simplement comme alternative, de le vendre comme esclave.
« ILS M’ONT HAï SANS CAUSE »
La providence de Dieu continuait à être avec Joseph et le bénissait en tant qu’esclave et finalement, par beaucoup de tribulations, l’amena au trône d’Egypte, le premier après Pharaon en influence et en puissance. Ce fut alors que la famine du pays attira les frères de Joseph en Egypte pour y acheter du froment; ainsi fut accomplie sa vision, — ses frères se prosternèrent, comme l’avaient illustré les onze gerbes qui s’inclinaient devant la sienne.
Plus tard, lorsque son père et toute la famille vinrent en Egypte pour vivre dans le pays de Gosen, ils durent obéir à Joseph, représentant du gouvernement égyptien, accomplissant ainsi la deuxième vision. Tout fut bien sombre en traversant ces expériences, il semblait que l’Eternel avait moins d’amour pour Joseph que pour les autres membres de sa famille, jusqu’à ce que vînt le temps de son exaltation au trône; alors tout changea.
CES CHOSES SONT ALLÉGORIQUES
La signification allégorique de ces faits en ce qui concerne Joseph est qu’il fut aussi haï sans cause. Nous lisons
72 Septembre 1913
dans le Psaume 69 : 5: «Ils sont plus nombreux que les cheveux de ma tête ceux qui me haïssent sans cause. » Jésus cita ces paroles et se les appliqua disant : «Ils m’ont haï sans cause » (Jean 15: 25). Les frères de Jésus étaient les Juifs qui le crucifièrent, mais il ne se trouva aucune cause de mort en lui.
C’était par envie, nous le voyons, qu’ils le livrèrent et demandèrent son crucifiement, parce que ses oeuvres étaient bonnes et que les leurs étaient mauvaises, parce qu’il enseignait les voies de Dieu plus parfaitement qu’eux, parce qu’il déclarait que le temps viendrait où eux-mêmes et les autres le reconnaîtraient comme le Messie — venant sur les nuées des cieux en puissance et en grande gloire — et qu’ils fléchiraient le genou devant lui.
Comme pour Joseph, le malheur, la trahison et la honte préparèrent la voie pour la gloire et l’honneur sur le trône d’Egypte, ainsi en est-il pour Jésus. Ses expériences pénibles prouvèrent sa fidélité à Dieu et l’élevèrent à la droite de la majesté divine. St. Paul y fait allusion disant de Jésus: «…En vue de la joie qui était placée devant lui, a souffert la croix, méprisé l’ignominie et s’est assis à la droite du trône de Dieu » (Héb. 12 : 2). Il dit encore « qui pour vous s’est fait pauvre, de riche qu’il était, afin que, par sa pauvreté, vous fussiez enrichis » (2 Cor. 8 : 9). Il en est de même des expériences de Joseph — de toute son humiliation — qui lui préparèrent le chemin afin qu’il soit secouru et honoré de Pharaon. Nous lisons aussi de Jésus, qu’il «a appris l’obéissance par les choses qu’il a souffertes et, qu’après avoir été élevé à la perfection [par la souffrance], il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent, l’auteur d’un salut éternel». — Héb. 5 : 9.
« SI NOUS SOUFFRONS AVEC LUI »
Les Ecritures nous disent que, dans le grand plan de Dieu, Jésus n’est pas le seul qui doive être élevé au trône comme Messie du monde, mais qu’il doit y avoir avec lui une grande compagnie de frères participant à la même gloire, au même honneur et à l’immortalité. Dans le grand plan de Dieu, il est exigé de ces frères qu’ils passent par des expériences semblables à celles de leur frère aîné, Jésus. Leurs expériences, par conséquent, sont aussi illustrées dans celles de Joseph. Ils ne sont pas sur le pied d’égalité avec leur frère aîné; il est appelé leur tête, leur chef, le prince de leur salut, ainsi nous lisons : « Dieu éleva à la perfection par les souffrances, le Prince de leur salut ». — Héb. 2:10.
Tous ceux de la compagnie des fils reçus sous ce grand Prince doivent, d’une façon semblable, être rendus parfaits par les souffrances.
Ceci n’explique-t-il pas les expériences pénibles de l’Eglise pendant les dix-neuf siècles passés? L’apôtre Jean dit: « Tel il est, tel nous sommes aussi dans le monde », et encore: « Si le monde ne nous connaît pas c’est qu’il ne l’a pas connu. » De même que les frères de Joseph ne pouvaient pas voir, au moment de la famine, le fait que leur frère serait leur sauveur, aussi bien que le sauveur des Egyptiens, de même, le monde ne comprend pas que ce n’est que par le Messie qu’il aura la vie éternelle.
Dans un même ordre d’idées, Jésus dit qu’il était haï sans cause, et il dit à ses disciples élus que, d’une manière semblable, ils doivent s’attendre à être injustement trahis. Nous lisons: «Si le monde vous hait, sachez qu’il m’a haï avant vous. Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui est à lui; mais parce que vous n’êtes pas du monde et que je vous ai choisis du milieu du monde, à cause de cela le monde vous hait. Souvenez-vous de la parole que je vous ai dite : « Le serviteur n’est pas plus grand que son maître. S’ils m’ont persécuté il vous persécuteront aussi: s’ils ont gardé ma parole, ils garderont aussi la vôtre. Mais ils vous feront toutes ces choses à cause de mon nom, parce qu’ils ne connaissent pas celui qui m’a envoyé… Mais cela est arrivé afin que s’accomplît la parole qui est écrite dans leur loi : Ils m’ont haï sans cause. » — Jean 15 :18-25.
Nous donnons en entier le texte même où se trouvent les paroles que notre Seigneur cita : « Ceux qui me haïssent sans cause sont plus nombreux que les cheveux de ma tête… Que ceux qui s’attendent à toi ne soient pas rendus honteux à cause de moi, Seigneur, Eternel des armées! Que ceux qui te cherchent ne soient pas rendus confus à cause de moi, ô Dieu d’Israël! Car à cause de toi j’ai porté l’opprobre, la confusion a couvert mon visage. Je suis devenu un étranger à mes frères et un inconnu aux fils de ma mère. Car le zèle de ta maison m’a dévoré, et les outrages de ceux qui t’outragent sont tombés sur moi. L’opprobre m’a brisé le coeur et je suis accablé et j’ai attendu que quelqu’un eût compassion de moi, mais il n’y a eu personne… et des consolateurs mais je n’en ai pas trouvé. Ils ont mis du fiel dans ma nourriture et dans ma soif ils m’ont abreuvé de vinaigre. — Ps. 69: 4, 9, 20, 21.
LA PHILOSOPHIE DES FAITS
Nons avons considéré le fait, que Jésus et tous ses disciples, selon l’intention divine, ont souffert la honte et le mépris. Nous remarquons que, dans le cas de Jésus et de l’église primitive, la persécution vint de la part de leurs frères selon la chair — des Juifs. Dès lors, durant tout l’âge de l’Evangile, les persécutions de l’Eglise, des frères de Jésus, la maison de la foi, sont aussi venues de leurs frères, Ces frères ne sont pas des Juifs, mais des chrétiens. Les Juifs religieux, au temps de notre Seigneur, persécutaient leurs frères plus justes, de même dès lors, les chrétiens nominaux ont été les principaux persécuteurs des disciples fidèles du Seigneur.
Cette persécution est venue sur les âmes fidèles de presque toutes les dénominations et, chose triste à dire, les persécuteurs ont été les âmes infidèles de ces dénominations: presbytériens, épiscopaux, catholiques romains, méthodistes et baptistes, ont enduré des persécutions de leurs frères aveuglés et, les aveuglés parmi eux, ont aussi pris part à l’oeuvre persécutrice. Dans presque tous les cas, on a prétendu que la persécution était faite pour la gloire de Dieu. Dieu explique la chose par le prophète, disant: « Vos frères qui vous haïssaient qui vous rejetaient à cause de mon nom, disaient: Que l’Eternel soit glorifié et que nous voyions votre joie, et eux seront confus. » — Esaïe 66:5. (D.)
Le monde en général, y compris les Juifs, comprennent déjà qu’une grande erreur fut commise en persécutant Jésus et en le mettant à mort. Déjà, à quelque degré, de semblables transgressions contre les fidèles disciples de Jésus ont été reconnues; cependant le même aveuglement, provenant de la même disposition envieuse, conduit à la persécution encore de nos jours.
La majorité d’entre eux admettent qu’ils ne connaissent pas grand chose en ce qui concerne Dieu ou la Bible. Ils prient pour avoir de la lumière mais, si quelque lumière paraît, si une voix d’amour ou de tendresse se fait entendre, les dirigeant vers l’aurore du nouveau jour, montrant avec clarté les richesses de la gloire de Dieu la longueur et la largeur de sa clémence, immédiatement leurs chants pour obtenir plus de lumière cessent et ils lancent leurs pierres de ridicule et de calomnie. Pourquoi? De crainte qu’il n’y ait un changement, de crainte que quelqu’un n’obtienne plus de lumières, de peur que ne s’accomplisse la promesse divine et que ne soit introduite une nouvelle aurore, une connaissance spirituelle.
Quelle est la philosophie de ces faits de l’histoire? Pourquoi Dieu a-t-il permis, arrangé que Christ souffrirait et que tous ceux qui voudraient marcher sur ses traces doivent avoir part à ses expériences d’ignominie, de honte et d’opprobre, de souffrance avec lui? Dans le
73 Septembre 1913
cas de Jésus, le Père employa ces pénibles expériences pour éprouver l’amour et la fidélité de son s, pour démontrer son obéissance aux anges et aux hommes. Ayant projeté de lui conférer une gloire et un honneur très grands, le Père voulait que tous, comme lui, voient la dignité du Logos, subséquemment Jésus.
Dans une image symbolique les armées célestes sont représentées comme reconnaissant la convenance de la haute élévation de Jésus, à cause de sa fidélité jusqu’à la mort, disant: « L’Agneau qui a été immolé est digne de recevoir la puissance, la richesse, la sagesse, la force, l’honneur, la gloire et la louange. » Si une telle démonstration de la dignité de Jésus, le Logos, était nécessaire ou convenable, combien est-il plus nécessaire qu’une église élue, étant rassemblée d’entre les membres d’une race déchue, soit prouvée fidèle à Dieu, même jusqu’à la mort. Il y a cependant une différence.
Dans le cas du Maître, c’était la démonstration qu’il était parfait avant qu’il quittât la gloire céleste et parfait aussi lorsqu’il devint l’homme Jésus-Christ « saint, innocent, sans tache et séparé des pécheurs ». « Il n’y avait pas de péché en lui. » Dans le cas de ses disciples, l’imperfection de la chair demeure encore, mais ils sont jugés non selon les faiblesses de leur chair, faiblesses d’hérédité — mais selon l’amour et le zèle de leur coeur. Ce zèle aimant est témoigné par leurs efforts pour marcher fidèlement sur les traces de leur Conducteur et Sauveur, étant vainqueurs au mieux de leur capacité, des faiblesses de leur chair et « annonçant les vertus de celui qui les a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière »