ETUDE V – LE SOUVERAIN SACRIFICATEUR DE LA RECONCILIATION  “ RENDU SEMBLABLE A SES FRERES ” PEUT  “ COMPATIR A NOS INFIRMITES”

Listen to this article

   Qui sont « ses frères » ? — En quoi consista la ressemblance ? — Comment fut-il « tenté en toutes choses comme nous, sans commettre le péché » ? — Les tentations au désert. — Leur ressemblance aux nôtres. — Certaines d’entre elles « séduiraient, s’il était possible, les Élus mêmes ». — En quel sens notre Seigneur fut-il rendu parfait par les souffrances ? — Quoique Fils, il apprit l’obéissance. — Comment fut-il fait en ressemblance de chair de péché, et cependant sans péché ? — « Il s’est chargé de nos infirmités ». — Comment fut-il « touché » (de compassion) ?

            « C’est pourquoi il dut, en toutes choses, être rendu semblable à ses frères, afin qu’il fût un miséricordieux et fidèle Souverain Sacrificateur dans les choses qui concernent Dieu, pour faire propitiation (réconciliation) pour  les péchés du peuple ». — Héb. 2 : 17.

*  *  *

            Il existe deux conceptions populaires opposées, qui, toutes deux, entrent en conflit avec toutes les diverses déclarations de la Bible concernant les rapports de notre Seigneur avec l’humanité ; une troisième, savoir l’opinion de la Vérité, est seule capable de concilier les divers passages des Écritures, ou de satisfaire la raison sanctifiée. Des deux conceptions fausses, mais populaires, l’une prétend que notre Seigneur Jésus était le Dieu Tout-Puissant, Jéhovah, qui se revêtit simplement de chair humaine, sans éprouver réellement la sensibilité des épreuves, des tentations et des conditions ambiantes de la nature humaine. L’autre prétend qu’il était un pécheur, ayant part aux imperfections de notre race, comme les autres humains, mais qu’il combattit le péché et lui résista avec plus de succès que les autres humains. Nous allons essayer de montrer que ces deux conceptions sont erronées, et que la vérité se trouve entre les deux : en effet, le Logos « étant en forme de Dieu », un être-esprit, fut réellement un homme quand il fut « fait chair », « l’homme Christ Jésus », mais « séparé des pécheurs », un homme parfait préparé pour être le « prix correspondant » du premier homme parfait dont la chute engloba notre race, et dont la rédemption englobe également la race.

            Il est donc tout à fait convenable, sous ce rapport, en cherchant à démontrer la vue biblique exacte sur ce sujet, que nous examinions diverses citations des Écritures qui ont été faussées et mal employées pour prouver que notre Seigneur avait des défauts, et était sujet aux mêmes passions que les membres de la race déchue. Nous soutenons que s’il avait été dans cette condition, il lui aurait été impossible, comme il l’est pour nous, d’observer parfaitement chaque détail de la loi divine qui déterminait la pleine mesure des capacités de l’homme parfait ; cette loi ne pouvait donc être observée par des humains imparfaits. C’est pourquoi, le fait même qu’en notre Seigneur il n’y avait pas de péché, le fait même qu’il plaisait au Père, et fut acceptable comme offrande pour le péché, comme prix de la rançon d’Adam (et la race perdue en lui), prouvent indirectement sa perfection, comme nous soutenons que la Bible l’enseigne partout.

            Mais les « frères » de notre Seigneur n’étaient pas immaculés, ils n’étaient pas séparés des pécheurs. Comment, dans ces conditions, pouvait-il à la fois être « fait semblable à ses frères », et être séparé des pécheurs ? On trouve la réponse à cette question lorsque l’on reconnaît le fait que ce ne sont pas les humains, les pécheurs en général, qui sont visés comme étant « ses frères ». Adam, à la vérité, fut reconnu comme fils de Dieu à sa création, et jusqu’au moment de sa transgression (Luc 3 : 38), mais pas après. Tous les membres de sa race sont appelés dans les Écritures des « enfants de colère » (Eph. 2 : 3). Seuls, ceux qui ont « échappé à la condamnation qui est sur le monde », et qui sont rentrés en accord avec Dieu, par Christ, sont autorisés par les Écritures à se considérer des fils de Dieu (Jean 1 : 12). Des autres, notre Seigneur déclare : « Vous avez pour père le diable, et vous voulez faire les convoitises de votre père » (Jean 8 : 44). Notre Seigneur Jésus ne se compta jamais comme l’un des enfants du diable, ni comme un des « enfants de colère », mais il déclara qu’il « procédait et venait de Dieu ». Il ne reconnut pas non plus comme « ses frères » aucun de ceux qui étaient encore des « enfants de colère ». Les seuls considérés comme « les frères du Seigneur » sont ceux qui, ayant échappé à la condamnation qui pèse sur le monde, ont été rapprochés du Père par le sang de Christ, ont reçu « l’esprit d’adoption » (*) [« Sonship » — grec : huiothesias : « filiation » — Diaglott (Réference Strong N° 5206 — Trad.).] dans la famille de Dieu, et la promesse de la « filiation » complète à l’établissement du Royaume (Rom. 8 : 15, 23 ; Gal. 4 : 5). Puisqu’ils sont justifiés, considérés comme libérés de la culpabilité adamique, considérés comme rendus justes par le sang de Christ, ils sont semblables à notre Seigneur Jésus, « ses frères » dans tous les sens du mot, dans une position analogue de faveur divine et de séparation du monde. Des consacrés de cette classe, notre Seigneur déclare : « Ils ne sont pas du monde, comme je ne suis pas du monde ». « Je vous ai choisis du monde » (Jean 15 : 19 ; 17 : 16). On peut voir aisément de ce point de vue que notre Seigneur fut « fait semblable à ses frères », exactement, en tout point. Non pas que ses « frères » fussent dans cette condition au moment où il s’humilia et fut fait chair, car il n’avait aucun frère à cette époque, sauf que cette classe était préconnue de Dieu (Eph. 1 : 5, 11 ; Rom. 8 : 9) ; mais l’arrangement divin était tel que Dieu prévit qu’il pouvait être juste, et cependant justifier ceux de la race des pécheurs qui accepteraient sa grâce par Christ ; de ce fait leurs péchés seraient couverts, ne leur seraient plus imputés, mais seraient imputés à celui « qui porta nos péchés en son corps sur le bois ». Dieu arrangea d’avance, préconnut, son dessein d’appeler les membres de l’Église de l’Évangile pour être « cohéritiers avec Jésus-Christ, notre Seigneur », d’un héritage incorruptible, sans tache, immarcescible, réservé dans les cieux. C’est en considération de ce plan arrangé d’avance, que les prophètes parlèrent, par anticipation, de tous ceux qui constitueraient cette classe, comme étant les « frères » de Christ. Prophétiquement, notre Seigneur est représenté comme disant au Père : « J’annoncerai ton nom à mes frères ; je te louerai au milieu de l’Église » (Ps. 22 : 22 ; Héb. 2 : 12). Puisque le programme divin était que notre Seigneur fût non seulement le Rédempteur du monde, mais aussi un modèle pour les « frères » qui seraient ses cohéritiers, il était donc convenable en accomplissant le programme divin, que dans toutes ses épreuves et expériences, il fût « fait semblable à ses frères ».

« IL A ÉTÉ TENTÉ EN TOUTES CHOSES COMME NOUS,

A PART LE PÉCHÉ ».

— Héb. 4 : 15 —

            On remarquera que cette expression ne veut pas du tout dire que Jésus fut tenté en toutes choses comme le monde est tenté, mais bien comme nous, ses disciples, le sommes. Il ne fut pas tenté, dans le domaine des appétits dépravés pour des choses coupables, reçus par hérédité, d’une lignée terrestre ; mais étant saint, innocent, sans souillure et séparé des pécheurs, il fut tenté de la même manière que le sont ses disciples de cet Age de l’Évangile qui marchent non selon la chair, mais selon l’esprit, et qui sont jugés, non selon les infirmités de leur chair, mais selon l’esprit de leur entendement, selon leur nouvelle volonté, leur nouveau cœur. — Rom. 8 : 4 ; 2 Cor. 5 : 16 ; Jean 8 : 15.

            On voit cela très clairement à propos des tentations de notre Seigneur dans le désert, immédiatement après sa consécration et son baptême au Jourdain. — Matth. 4 : 1-11.

            (1) La première tentation fut la suggestion présentée par Satan qu’il fit usage du pouvoir divin qu’il venait de recevoir au Jourdain, pour satisfaire ses propres besoins, en changeant les pierres en pains. Ce n’était pas là une tentation imputable en aucun sens à l’hérédité ou à l’imperfection. Notre Seigneur avait passé quarante jours sans prendre de nourriture, étudiant le plan divin, cherchant à la lumière du saint Esprit qu’il venait de recevoir, à déterminer quelle serait sa propre ligne de conduite dans la vie, afin d’accomplir la grande mission pour laquelle il était venu dans le monde, savoir la rédemption du monde. La suggestion qui lui était faite d’employer le pouvoir spirituel qui lui avait été conféré et qu’il savait être en sa possession, pour satisfaire aux nécessités de sa chair, pouvait, à première réflexion, paraître raisonnable ; mais notre Seigneur discerna immédiatement qu’un tel usage de son don spirituel serait mauvais, ce don ayant une autre destination ; aussi repoussa-t-il la suggestion en disant : « Il est écrit : L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ». Les « frères » du Seigneur ont parfois de semblables tentations de l’Adversaire, des suggestions d’utiliser des dons spirituels pour la poursuite d’intérêts temporels. Des suggestions de ce genre sont insidieuses, et constituent des canaux par lesquels très souvent le peuple consacré de Dieu est détourné par l’Adversaire vers des abus de plus en plus grands de bénédictions divines.

            (2) L’Adversaire suggéra à notre Seigneur des moyens de fakir pour inaugurer sa mission envers le peuple : il se précipiterait du pinacle du temple au fond de la vallée, aux yeux de la multitude qui, le voyant sain et sauf, aurait ainsi la preuve de son pouvoir surhumain, serait amené à l’accepter comme Messie et à collaborer avec lui à l’œuvre à accomplir. Mais notre Seigneur vit de suite que de pareilles méthodes étaient entièrement en désaccord avec le plan divin ; il réfuta même l’emploi abusif d’un passage des Écritures cité par Satan (apparemment pour mieux insinuer le mal). Rien ne put faire dévier notre Seigneur des principes de justice. Il répliqua immédiatement qu’une telle manière de faire serait tenter la providence divine de façon totalement injustifiable, et partant, indigne de la moindre considération. Lorsque le devoir ou le danger l’appelait, le Maître n’hésitait pas, mais se rendait compte de la capacité du Père de préserver ses intérêts ; toutefois la vraie confiance en Dieu n’implique pas de s’exposer au danger, sans l’ordre divin, et uniquement pour une exhibition, et dans un esprit de fanfaronnade.

            Les frères du Seigneur ont aussi des tentations de cette nature ; ils ont besoin de se rappeler cette leçon et cet exemple donnés par le Prince de notre Salut. Nous ne devons pas nous précipiter sans réflexion dans le danger, et nous estimer ainsi de vaillants soldats de la croix. Des « exploits téméraires » peuvent ne pas paraître insensés aux enfants du malin, mais ils sont totalement inconvenants chez des enfants de Dieu. Ces derniers soutiennent une guerre qui exige un courage encore plus grand. Ils sont invités à accomplir des services auxquels le monde n’applaudit pas, qu’il n’apprécie même pas, mais souvent persécute. Ils sont appelés à endurer l’ignominie, les sarcasmes du monde ; et même à supporter que les incirconcis de cœur « disent toute sorte de mal » faussement contre eux, à cause de Christ. A cet égard, les disciples du Chef de notre salut suivent le même chemin que leur Maître, et marchent sur les traces de leur Chef. Il faut un plus grand courage pour surmonter la honte et l’ignominie subies dans le monde, où le service de Dieu est si peu en honneur, que pour quelque grand et merveilleux exploit qui provoquerait l’étonnement et l’admiration de l’homme naturel.

            L’un des plus importants combats de ceux qui marchent dans ce sentier étroit est celui qu’ils mènent contre leur propre volonté, afin de l’amener à la plus complète soumission à la volonté du Père céleste et de l’y maintenir ; c’est la lutte pour gouverner leur propre cœur, pour écraser les ambitions qui naissent et sont naturelles même chez un homme parfait, pour éteindre ces feux ardents, et pour présenter leur corps et tous les intérêts terrestres en sacrifices vivants au service de Dieu et de sa cause. Telles furent les épreuves dans lesquelles notre Chef gagna la victoire et ses lauriers, et telles sont également les épreuves de ses « frères ». « Qui gouverne son esprit [l’amenant en complète soumission à la volonté de Dieu] est plus fort que celui qui prend une ville » (*) [ Prov. 16 : 32.] ; il est aussi plus grand que celui qui, par une fausse conception de la foi, sauterait du pinacle d’un temple, ou ferait quelque autre chose d’une folle témérité. La véritable foi en Dieu ne consiste pas en une crédulité aveugle et en suppositions extravagantes touchant sa sollicitude providentielle ; mais elle consiste, au contraire, en une confiance tranquille dans les infiniment grandes et précieuses promesses que Dieu a faites, confiance qui rend les fidèles capables de résister aux divers efforts tentés par le monde, la chair et le diable pour détourner leur attention, confiance qui suit avec soin les lignes de la foi et de l’obéissance tracées pour nous dans la Parole divine.

            (3) La troisième tentation présentée à notre Seigneur par l’Adversaire avait trait à la domination terrestre qui lui était offerte avec la perspective d’un succès rapide dans l’établissement de son royaume, sans avoir à souffrir, ni à mourir — sans la croix, à la condition de passer un compromis avec l’Adversaire. Ce dernier prétendait — et sa prétention ne fut pas contestée — qu’il possédait le gouvernement du monde ; il offrait sa collaboration pour que le Royaume de Justice que notre Seigneur venait pour établir, puisse l’être rapidement. Satan sous-entendait qu’il était las de conduire le monde dans le péché, l’aveuglement, la superstition, l’ignorance ; que dès lors, il éprouvait de la sympathie pour la mission de notre Seigneur qui consistait à venir en aide à la pauvre race déchue. Ce qu’il désirait conserver, toutefois, c’était une influence maîtresse ou directrice dans le monde ; c’est pourquoi le prix à payer pour qu’il le ramenât dans la voie de la justice, le prix de sa collaboration avec Jésus dans une œuvre de bénédictions du rétablissement, était que Jésus le reconnût lui, Satan, comme le gouverneur suprême du monde, dans sa condition régénérée ; de ce fait, Satan voulait que notre Seigneur lui rendît hommage.

            Nous devons nous souvenir que la rébellion de Satan contre l’autorité divine avait eu pour cause l’ambition d’être lui-même un monarque — « semblable au Très-Haut » (Es. 14 : 14). Nous rappelons que ce fut là le principal mobile des assauts qu’il livra avec succès à nos premiers parents en Eden, en vue de les aliéner, de les séparer de Dieu, et d’en faire ainsi ses esclaves. Nous pouvons aisément supposer qu’il aurait préféré être le monarque de sujets plus heureux que « la création gémissante » : il aurait préféré des sujets ayant la vie éternelle. Il semblerait même que, jusqu’ici, il n’ait pas discerné le fait que la vie éternelle et le vrai bonheur ne sont possibles qu’en vivant en harmonie avec la loi divine. Satan voulait donc devenir un réformateur dans tous les domaines, à l’exception d’un seul ; il voulait satisfaire son ambition, il ne voulait rien de moins que d’être le maître suprême des hommes ; n’était-il pas déjà « le Prince de ce monde » et reconnu comme tel par l’Écriture Sainte ? (Jean 14 : 30 ; 12 : 31 ; 16 : 11 ; 2 Cor. 4 : 4). Non pas qu’il eût reçu une charge divine quelconque pour être « le prince de ce monde », mais il prit possession de l’humanité en faisant régner l’ignorance, en présentant l’erreur pour la vérité, les ténèbres pour la lumière, le mal pour le bien ; il avait si bien su déconcerter, égarer, aveugler les humains qu’il lui a été facile d’accaparer la position de maître ou « dieu de ce monde, agissant maintenant dans le cœur des enfants de la désobéissance » qui forment la grande majorité.

            Ainsi, la suggestion de Satan renfermait-elle une tentation particulière en paraissant offrir une nouvelle solution à la question du rétablissement de l’homme, par la délivrance de ce dernier de sa condition de péché. Et qui plus est, elle semblait impliquer au moins une repentance partielle chez Satan, et la possibilité d’un retour à une vie de justice, à la condition toutefois que son ambition fût satisfaite, qu’il pût régner sur des sujets plus heureux et plus prospères que lorsqu’il maintenait les hommes dans l’erreur et dans l’esclavage du péché pour conserver leur fidélité à sa cause. Il est certain que plus les humains rejettent le péché et apprécient la sainteté, et plus ils sont désireux de servir et d’adorer Dieu.

            Notre Seigneur Jésus n’hésita pas longtemps. Il avait une confiance absolue que la Sagesse du Père avait adopté le meilleur plan et le seul adéquat. C’est pourquoi, non seulement il ne discuta ni avec la chair ni avec le sang, mais il ne voulut pas davantage négocier avec l’Adversaire une collaboration dans l’œuvre de relèvement du monde.

            Nous voyons là aussi un des assauts spéciaux de l’Adversaire contre les « frères » du Seigneur. Il a réussi rapidement à tenter l’Église nominale, l’amenant à abandonner le chemin de la croix, le chemin étroit de la séparation d’avec le monde, et à s’associer avec les pouvoirs civils, à acquérir ainsi graduellement une influence dans la politique du monde. En collaboration avec les « princes de ce monde », encouragée et aidée secrètement par l’Adversaire, elle a cherché à établir le règne de Christ sur la terre, par le truchement d’un représentant, d’un pape qu’on prétendit être le vicaire de Christ. Nous avons vu quelles influences pernicieuses en résultèrent : comment cette contrefaçon du Royaume de Christ devint réellement un royaume du diable, accomplissant son œuvre. Nous avons vu les fruits, au cours des « siècles de ténèbres », de ce règne que Dieu appelle le système « Antichrist » (*) [Voir vol. II Chap. IX. Référence Strong N° 500 « antichristos », un adversaire du Messie — Trad.]

            Bien que la Réformation eût un départ énergique, nous trouvons que l’Adversaire présenta de nouveau la même tentation aux Réformateurs, qui ne résistèrent qu’en partie, étant disposés à compromettre la vérité pour gagner la protection et l’assistance des « royaumes de ce monde », dans l’espoir que ces royaumes deviendraient de quelque manière le Royaume de notre Seigneur. Mais nous constatons que la combinaison de l’Église et de l’influence du monde, telle qu’elle est représentée par le Protestantisme, bien que moins néfaste dans ses résultats que celle de la Papauté, est néanmoins très nuisible, et constitue une lourde entrave à tous ceux qui subissent son influence. Nous voyons que la lutte constante des « frères » a pour objet de vaincre cette tentation de l’Adversaire et de tenir ferme dans la liberté par laquelle Christ nous a rendus libres — n’étant pas du monde, mais séparés de lui.

            En outre, nous trouvons que, bien que la même tentation se présente à tous les « frères », elle vient de temps en temps sous une forme légèrement modifiée ; dans chaque cas, le grand Adversaire essaie avec une habileté très subtile de faire avec nous comme avec le Seigneur : il se présente comme un chef à propos de réformes qu’il défend ; il semble manifester une sympathie sincère pour l’œuvre qui doit bénir le monde. Sa dernière tentation de ce genre se présente sous la forme de « relèvement social » qu’il fait miroiter avec succès aux yeux de beaucoup de « frères ». Il suggère maintenant que, si nécessaire qu’il était autrefois de marcher dans le « sentier étroit », le sentier de la croix, il n’est plus nécessaire de le faire maintenant, mais que nous en sommes venus à un point où toute l’affaire peut être facilement et rapidement faite, et le monde en général élevé à un plus haut niveau ou « standing » social, intellectuel, moral et religieux. Toutefois, les plans qu’il propose entraînent toujours la coopération avec lui : ici, par exemple, il recommande à tous ceux qui voudraient être des collaborateurs dans le relèvement social de se joindre aux mouvements sociaux et politiques qui amèneront le résultat désiré. Il est devenu si hardi et si confiant dans l’appui de la majorité, qu’il ne préconise plus comme réforme la conversion individuelle des pécheurs, leur salut hors de la condamnation, et leur réconciliation avec le Père par une foi et une consécration personnelles au Seigneur Jésus Christ : sa proposition est un relèvement social qui ignore les responsabilités et les péchés individuels, qui ne considère seulement que les conditions sociales et l’édification d’une Société dont l’extérieur est « purifié ». Il voudrait que nous laissions de côté l’enseignement du Seigneur que seuls ceux qui viennent au Père par Jésus sont des « fils de Dieu », et ses « frères ». Au lieu de cela, il voudrait nous faire croire que tous les hommes sont frères, que Dieu est le Père de toute l’humanité, qu’il n’y a point d’ « enfants de colère », et qu’il est criminellement antichrétien et peu charitable d’ajouter foi aux paroles de notre Seigneur, savoir, que certains ont pour « père, le diable ». Satan voudrait ainsi, sans toujours le dire aussi formellement, nous faire ignorer et nier la chute de l’homme dans le péché, ignorer et nier la rançon pour le péché, et toute l’œuvre de la réconciliation en se servant d’expressions spécieuses et illusoires telles que : « la paternité de Dieu et la fraternité des hommes », et la Règle d’Or.

            Cette tentation de l’Adversaire qui assaille « les frères » aujourd’hui, en séduit beaucoup, et probablement les séduira tous, sauf les « vrais élus » (Matth. 24 : 24). Ces « frères » ces vrais élus sont ceux qui marchent fidèlement sur les traces du Maître et qui, au lieu de prêter l’oreille aux suggestions de l’Adversaire, s’en tiennent à la Parole de l’Éternel. Ces « frères » ces vrais élus, au lieu de se fier à leur propre intelligence et aux sophismes de Satan, ont foi en la sagesse supérieure de Dieu et en son divin plan des âges. C’est pourquoi ceux-là sont tous « enseignés de Dieu », et par là, savent que l’œuvre de l’Age actuel est la sélection des « frères » de Christ, leur mise à l’épreuve et finalement leur glorification avec le Seigneur dans le Royaume, en devenant la semence ou postérité d’Abraham pour bénir le monde ; ils savent que, dans l’Age prochain, viendra le « propre temps » de Dieu pour le relèvement mental, moral et physique du monde. Les élus ne peuvent donc être trompés par aucun des arguments spécieux ou des sophismes de leur ennemi rusé. De plus, les « frères » n’ignorent pas ses desseins, car ils ont été mis en garde à ce sujet, et ils regardent à Jésus qui, non seulement est l’Auteur de leur foi, par son sacrifice, mais doit en être aussi le consommateur, lorsqu’il leur accordera une part à la première résurrection, et les rendra participants de sa gloire sublime et de la nature divine.

            Tels sont les points essentiels de tentation des « frères », et tels furent ceux de leur chef. Il fut « tenté en toutes choses comme nous le sommes » ; il sait comment secourir ceux qui sont tentés, et qui désirent recevoir son secours sous la forme où il le donne, par les enseignements de sa Parole et par ses infiniment grandes et précieuses promesses. Aucune des tentations de notre Seigneur ne provint de faiblesses héréditaires analogues aux nôtres ; il n’eut pas les penchants d’un buveur, ni la passion d’un meurtrier, ni la cupidité d’un voleur ; il était saint, innocent, séparé des pécheurs. Ses « frères » n’ont pas non plus des tentations de cette nature. Ceux qui sont devenus ses « frères » par la foi, la consécration et l’engendrement du saint esprit de filiation, ont perdu la disposition qui les porte à nuire aux autres ; ils ont reçu à la place le nouvel esprit, la pensée de Christ, l’esprit de Christ, l’esprit de sobre bon sens, le saint Esprit — l’esprit d’amour, qui recherche avant tout la volonté du Père, et qui cherche ensuite à pratiquer le bien envers tous les hommes, en toute occasion, particulièrement à la maison de la foi. — Gal. 6 : 10.

            Ces « nouvelles–créatures », en possession de la nouvelle disposition ou nouvelle volonté, ont encore dans la chair certaines faiblesses héréditaires, une tendance à la passion ou à la querelle, de sorte que continuellement, ils ont besoin de s’en garder et peuvent occasionnellement être surpris en faute, contrairement à leur volonté ; néanmoins, ces faiblesses non intentionnelles ne leur sont pas comptées comme péchés, ni comme des actes de la « nouvelle-créature », mais simplement comme des imperfections de la vieille nature. Aussi longtemps que la nouvelle nature s’y oppose, ces imperfections sont considérées comme couvertes par le mérite de la rançon, la grande offrande pour le péché offerte par le Chef de notre Salut. C’est la « nouvelle-créature » seule qui est éprouvée, examinée, perfectionnée, polie et préparée pour l’héritage avec Christ dans son Royaume, et non le corps de chair qui, pour ceux-là, est considéré comme mort.

« RENDU PARFAIT PAR LA SOUFFRANCE »

            « Il convenait pour lui [le Père], à cause de qui sont toutes choses et par qui sont toutes choses que, amenant plusieurs fils à la gloire, il consommât (*) [« consommer » ; ou rendre parfait, dans l’épître aux Hébreux, c’est faire tout ce qui est nécessaire pour rendre propre à remplir un office » (Note D.).] le Chef de leur salut par la souffrance ». — Héb. 2 : 10.

            En se rappelant ce qui précède, il est facile de voir que Jésus ne fut pas rendu parfait comme homme par les choses qu’il souffrit comme homme, ni qu’il souffrit quoi que ce fût avant de devenir un homme. La pensée exprimée dans ce passage est que notre Seigneur, quand il était dans le monde alors qu’il était déjà parfait comme homme, l’image même du Père dans la chair, saint, innocent, sans souillure et séparé des pécheurs, atteignit par ses expériences et ses souffrances, une autre perfection, une perfection sur un autre plan d’existence, et qu’il réalisa complètement depuis lors. C’était une chose que le Logos fût parfait quand il était avec le Père avant que le monde fût, parfait dans son être, dans son cœur et dans sa volonté, parfaitement loyal envers le Père ; ce fut une autre chose que, lorsqu’il s’humilia volontairement pour être fait chair et prendre notre nature, une nature inférieure, il fût parfait comme homme, séparé des pécheurs et c’est encore une troisième chose qu’il soit maintenant parfait dans sa condition de haute exaltation, participant de la nature divine. C’est à cette dernière que notre texte se rapporte. Avant d’accorder une si haute élévation à « la gloire, l’honneur et l’immortalité » de « la nature divine », la sagesse divine trouva convenable d’appliquer certaines mises à l’épreuve dont l’ensemble rendrait parfait le titre de Fils Unique Engendré de Dieu pour participer à toutes les richesses de la grâce divine, « afin que tous les hommes honorent le Fils comme ils honorent le Père ».

            Nous devons nous souvenir qu’en regard de ces mises à l’épreuve de son obéissance au Père, il y avait aussi pour Jésus la perspective d’une certaine joie ou récompense, comme il est écrit : « A cause de la joie placée devant lui, a enduré la croix, ayant méprisé la honte » (Héb. 12 : 2). Nous pouvons raisonnablement supposer que cette joie offerte était :

            (1) La joie de rendre un service qui serait agréable au Père.

            (2) La joie de racheter l’humanité, et de rendre possible sa délivrance du péché et de la mort.

            (3) La joie à la pensée que, par l’accomplissement de cette rédemption, il serait estimé digne par le Père d’être le puissant gouverneur et bienfaiteur, le Roi et Sacrificateur du monde, de révéler au monde la connaissance du plan divin et d’élever de la condition du péché à la faveur divine quiconque accepterait les conditions de la Nouvelle Alliance.

            (4) La joie que le Père lui avait promise : non seulement un retour à la gloire de l’être-esprit qu’il avait auprès du Père avant que le monde fût, mais une gloire plus excellente, celle d’être élevé bien au-dessus des anges, principautés, puissances et de tout nom qui se nomme, et d’être fait associé dans le Royaume de l’Univers, auprès du Père, — à la droite de la majesté dans les cieux, et participant de la nature divine avec sa vie inhérente ou immortelle. Mais toute cette joie proposée à notre Seigneur était conditionnelle ; elle dépendait de son entière obéissance à la volonté du Père. En fait, il avait toujours été obéissant au Père, et avait trouvé ses délices dans les voies du Père, mais jamais auparavant, il n’avait été soumis à une telle épreuve. Jusque là il avait toujours estimé agréable et honorable de faire la volonté du Père ; à présent, l’épreuve était de savoir s’il ferait ou non cette volonté dans des conditions affligeantes, pénibles, humiliantes ; des conditions qui l’amèneraient finalement non seulement à mourir, mais à mourir ignominieusement sur la croix. Il sortit vainqueur de cette épreuve, et jamais il ne chancela, ni ne trembla, mais il manifesta dans tous les détails et jusqu’au bout, la foi dans la Justice, l’Amour, la Sagesse et la Puissance du Père ; il endura sans hésiter toutes les oppositions et les contradictions des pécheurs contre lui-même, avec toutes les autres attaques de l’Adversaire ; par ce moyen, par la souffrance, il « rendit parfait » son titre à toutes les joies placées devant lui, et, en conséquence, fut rendu parfait comme un être du plus élevé de tous les ordres, à savoir de « la nature divine ». Ainsi, fut-il vrai de l’Unique Engendré du Père que :

« QUOIQU’IL FUT FILS, IL A APPRIS L’OBÉISSANCE PAR LES CHOSES QU’IL A SOUFFERTES, ET AYANT ÉTÉ CONSOMMÉ (RENDU PARFAIT), IL EST DEVENU POUR TOUS CEUX QUI LUI OBÉISSENT, L’AUTEUR DU SALUT ÉTERNEL »

— Héb. 5 : 8-10 —

            C’est ainsi que l’Apôtre inspiré explique que notre Seigneur, déjà sans tache, parfait, qui était déjà un « Fils », qui obéissait déjà parfaitement au Père dans des conditions favorables, apprit ce qu’était l’obéissance dans les conditions les plus adverses. Après cette mise à l’épreuve, il fut jugé digne de recevoir la perfection sur le plan d’existence le plus élevé, la nature divine, qu’il obtint sur ce plan quand le Père le ressuscita d’entre les morts. Il eut la gloire excellente qui lui avait été promise, savoir d’être d’abord le Libérateur de l’Église qui est son corps, et, plus tard « au propre temps », le Libérateur de tous ceux qui, étant amenés à la connaissance de la Vérité, lui obéiront.

            Remarquez l’accord parfait entre ceci et le témoignage de L’Apôtre Pierre : « Le Dieu de nos pères a ressuscité Jésus… Lui que Dieu a exalté par sa droite, Prince et Sauveur ». — Actes 5 : 30, 31.

            Ainsi, notre Seigneur Jésus démontra devant le Père, devant les anges et devant nous ses « frères », sa fidélité au Père et aux principes du gouvernement du Père. Ce faisant, il magnifia la loi du Père et la rendit honorable, démontrant qu’elle n’était pas trop exigeante, qu’elle n’était pas au-dessus de la capacité d’un être parfait, même dans les conditions les plus défavorables. Nous, ses disciples, pouvons bien nous réjouir avec toutes les créatures obéissantes et intelligentes de Dieu, en disant : « Digne est l’Agneau qui a été immolé, de recevoir la puissance, et richesse, et sagesse, et force, et honneur, et gloire, et bénédiction ». — Apoc. 5 : 12.

            Notre Seigneur glorifié étant le Chef de notre Salut, cela implique que tous ceux qui veulent être des soldats de la croix, des disciples de ce Chef et ses cohéritiers dans le Royaume, doivent obligatoirement être rendus parfaits comme « nouvelles-créatures », par l’épreuve et la souffrance. De même que toutes les souffrances, par lesquelles le Chef fut rendu parfait comme nouvelle-créature, furent les choses qu’il endura à cause de l’opposition du monde, de la chair et du diable, et par le fait de la soumission de sa propre volonté à la volonté du Père, ainsi en est-il pour nous : nos souffrances ne sont pas les souffrances habituelles des maux de la « création gémissante » et que nous partageons dans une certaine mesure, comme membres du monde. Les souffrances qui comptent dans le développement de la « nouvelle-créature » sont celles endurées de propos délibéré à cause du Seigneur, de sa Parole et de son peuple — les difficultés que nous endurons comme de bons soldats du Seigneur Jésus Christ, tandis que nous cherchons à faire, non pas notre propre volonté, mais à rendre parfaite en nous, la volonté de notre Chef, la volonté de notre Père céleste. Ainsi, devons-nous marcher dans ses traces, nous rendant compte de ses soins vigilants, et recourant au trône de la grâce céleste pour y trouver du secours au cours de notre route ; nous avons confiance en Sa promesse que toutes choses concourront ensemble à notre bien, et qu’il ne permettra pas que nous soyons tentés au-delà de nos forces, mais qu’il pourvoira au moyen d’échapper dans chaque tentation, et nous accordera, dans chaque épreuve, la grâce suffisante, au moment du besoin. Ainsi, ses « frères » sont-ils aussi à l’épreuve maintenant pour être rendus parfaits comme nouvelles-créatures en Christ, « rendus capables de participer à l’héritage des saints dans la lumière ». — Col. 1 : 12 (S.)

« EN RESSEMBLANCE DE CHAIR DE PÉCHÉ »

            Ce que la Loi ne pouvait accomplir parce qu’elle était impuissante à cause de la chair [parce que la chair était dépravée par la chute et incapable de rendre une obéissance absolue à la Loi], Dieu l’a accompli en envoyant son propre Fils dans une chair semblable à celle de l’humanité [qui était tombée sous la domination du Péché] comme une offrande pour le péché, laquelle, bien qu’elle condamnât le péché dans la chair, ouvrit un nouveau chemin de vie dans lequel la justice de la Loi pût être accomplie en nous [qui marchons non selon la chair, mais selon l’Esprit]. Pour ceux-là, il n’y a donc maintenant aucune condamnation, parce que la Loi de l’esprit de vie en Christ Jésus [sous le précieux sang] nous a libérés de l’Alliance de la Loi qui convainquait tous les hommes imparfaits de péché, et les condamnait à mort. — Rom. 8 : 1-4, paraphrasé.

            Ceux qui sont plus ou moins disposés à considérer notre Seigneur comme un pécheur, un membre de la race déchue, se sont emparés de ce passage de l’Écriture, et ont essayé de prouver qu’il est en désaccord avec la raison et en contradiction avec les autres passages des Écritures pour appuyer leur théorie, pour prouver que Christ fut fait exactement « chair de péché », et non comme une chair qui n’avait pas péché, c’est-à-dire comme celle d’Adam avant sa transgression. Cependant, d’après le texte paraphrasé ci-dessus, la pensée de l’Apôtre est clairement exposée devant l’esprit du lecteur. Notre Seigneur quitta la gloire de la nature-esprit, et fut « fait chair », fait d’une nature semblable à celle de la race qu’il venait racheter ; cette race dont la nature ou la chair était tombée dans l’esclavage du péché, fut vendue au péché par la désobéissance de son premier parent, Adam. Rien ne laisse entendre ici (sauf dans l’interprétation qui est donnée par la traduction) que notre Seigneur était lui-même un pécheur. C’est, à la vérité, une des plus simples propositions imaginables que, s’il avait été un pécheur ou, en un sens quelconque, un participant de la malédiction qui pesait sur la famille humaine, il n’aurait pu être notre offrande pour le péché, car un pécheur ne peut être une offrande pour un autre pécheur. Sous la loi divine, le « salaire du péché, c’est la mort ». Si notre Seigneur avait été en un sens ou à un degré quelconque un pécheur, il aurait perdu sa propre vie, et aurait été sans valeur comme prix de rançon pour Adam ou pour tout autre pécheur.

« IL A PRIS NOS INFIRMITÉS »

— Matth. 8 : 17 (S.) —

            « Cependant, ce sont nos souffrances qu’il a portées. C’est de nos douleurs qu’il s’est chargé. Et nous l’avons considéré comme puni, frappé de Dieu et humilié. Mais il était blessé pour nos péchés ; brisé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui. Et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris ». — Es. 53 : 4, 5 (Segond).

            La perfection est l’opposé de l’infirmité, et le fait que Jésus avait des infirmités pourrait, logiquement, être invoqué comme une preuve qu’Il n’était pas parfait, qu’il avait hérité certaines des imperfections de la race déchue. On se souviendra que la nuit de son agonie, au Jardin de Gethsémané, notre Seigneur sua « comme des grumeaux de sang ». Ceci est considéré par certaines autorités médicales comme une maladie qui, bien que très rare, a été constatée chez d’autres membres de la famille humaine. Elle est la preuve d’une grande tension et d’une grande faiblesse nerveuses. La tradition rapporte aussi que, sur le chemin de Golgotha, notre Seigneur fut contraint de porter sa croix, qu’il fléchit sous son poids, et qu’à cause de cela Simon le Cyrénéen fut obligé de la porter sur le reste du parcours (Matth. 27 : 32). On prétend encore que la mort de notre Seigneur sur la croix, survenue beaucoup plus rapidement que d’ordinaire, fut occasionnée par une rupture littérale de son cœur, des muscles du cœur, et que cela est confirmé par l’écoulement à la fois de sang et d’eau sortant de la blessure faite à son côté par la lance, après sa mort. En tout cas, notre Seigneur ne manifesta pas cette plénitude de vigueur qui fut manifestée par Adam, le premier homme parfait, dont la vitalité était telle qu’elle lui permit de vivre neuf cent trente ans. La question se pose : Toutes ces preuves d’infirmité (*) [« infirmity (au pluriel : « — ties ») : « 1. faiblesse, 2. maladie » (dict. américain — Trad.).] chez notre Seigneur n’étaient-elles un indice d’imperfection, que, soit par hérédité, soit de toute autre manière, il manquait des forces d’un homme parfait et était donc un homme imparfait ?

            En apparence, il semble qu’il en soit ainsi, et ce n’est que sous la direction de la Parole divine qu’il nous est possible d’expliquer, d’une façon satisfaisante pour notre esprit ou pour celui des autres, l’harmonie entre ces faits et l’assurance de la Bible qu’il était « saint, innocent, sans souillure et séparé des pêcheurs ». La solution nous en est fournie dans le texte de l’Écriture que nous examinons. Le prophète déclare, comme nous et d’autres le penserions aussi à première vue que notre Seigneur, comme tout le reste de la race, fut battu, fut sous la sentence de mort, qu’il fut frappé de Dieu et affligé ; la sentence de mort semblait destinée autant à lui qu’au reste de la race humaine ; mais Esaïe nous montre ensuite que ces faits qui nous apparaissent ainsi ne sont pas la réalité ; il explique que ce fut pour nos péchés et non pour les siens propres que notre Sauveur souffrit ; que ses infirmités provenaient de ce qu’il portait nos afflictions et supportait le poids de nos douleurs ; qu’il mourut parce qu’il prit notre place devant la loi de Dieu et qu’il souffrit, lui le « juste pour les injustes, afin qu’il puisse nous amener à Dieu ». Parlant pour le peuple réel d’Israël au premier avènement, le Prophète déclare : «  Nous l’avons considéré comme battu frappé de Dieu et affligé », et expliquant qu’une telle opinion était inexacte, il ajoute : « Mais il a été blessé pour nos péchés, brisé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui. Et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris ».

            Matthieu attire I’attention sur l’accomplissement de cette même prophétie, déclarant : « On lui apporta beaucoup de démoniaques ; et il chassa les esprits par une parole, et guérit tous ceux qui se portaient mal ; en sorte que fût accompli ce qui a été dit par Esaïe le prophète, disant : « Lui-même a pris nos langueurs, et a porté nos maladies ». — Matth. 8 : 16, 17.

            La relation existant entre la guérison de la maladie, par notre Seigneur, et le fait qu’il prit sur lui le fardeau de nos infirmités, n’apparaît pas très clairement à la majorité de ceux qui lisent le récit. On suppose généralement que notre Seigneur exerça simplement un pouvoir de guérison qui ne lui coûtait rien, qu’il disposait d’un pouvoir inépuisable provenant d’une source spirituelle, invisible, permettant toutes sortes de miracles sans la moindre déperdition de sa propre force, de sa propre vitalité.

            Nous ne mettons pas en doute que « la puissance du Très-Haut », accordée sans mesure à notre Rédempteur lui aurait permis de faire beaucoup de choses tout à fait surnaturelles et, par conséquent, n’entraînant aucun épuisement de ses forces ; nous ne doutons pas davantage que notre Seigneur se servit de ce pouvoir surhumain, par exemple, lorsqu’il changea l’eau en vin et lorsqu’il nourrit miraculeusement des foules. Mais, d’après le récit des Écritures, nous comprenons que la guérison des malades, telle que l’opérait notre Seigneur n’avait pas lieu par le moyen du pouvoir surhumain mis à sa disposition, mais qu’au contraire, en guérissant les malades, il dépensait pour eux une partie de sa propre vitalité ; de sorte que plus il en guérissait, plus importante était sa perte de vitalité, de force. Comme preuve qu’il en fut bien ainsi, souvenez-vous comment, dans le récit, la pauvre femme qui avait « une perte de sang depuis douze ans, et qui avait beaucoup souffert d’un grand nombre de médecins, et avait dépensé tout son bien, et n’en avait retiré aucun profit, mais plutôt allait en empirant », etc. Rappelez-vous comment, avec foi, elle s’approcha de très près de notre Seigneur et toucha le bord de son vêtement, se disant : « Si je touche ne fût-ce que ses vêtements, je serai guérie ». Le récit dit : « aussitôt son flux de sang tarit, et elle connut en son corps qu’elle était guérie du fléau. Et aussitôt Jésus, connaissant en lui-même la puissance [vitalité] qui était sortie de lui, se retournant dans la foule, dit : Qui a touché mes vêtements ? Et Ses disciples lui dirent : Tu vois la foule qui te presse et tu dis : Qui m’a touché ? Et il regardait tout à l’entour pour voir celle qui avait fait cela… et il lui dit : « Ma fille, ta foi t’a guérie ; va en paix et sois guérie de ton fléau ». — Marc 5 : 25-34.

            Notez aussi le récit de Luc (6 :19) qui déclare « et toute la foule cherchait à le toucher, car il sortait de lui de la puissance [vitalité] et elle les guérissait tous ». C’est donc dans ce sens que notre cher Rédempteur prit les infirmités de l’humanité, se chargeant de nos maladies. Le don de sa propre vitalité, jour après jour, pour la guérison des autres, ne pouvait avoir pour résultat qu’un effet débilitant sur sa propre force, sa propre vitalité. Nous devons nous rappeler que cette œuvre de guérisons, cette dépense de vitalité à profusion, se faisait en même temps que ses prédications et ses voyages, et que ce fut là l’œuvre presque continuelle de notre Seigneur durant les trois ans et demi de son ministère.

            Ceci ne nous semble pas tellement étrange non plus lorsque nous considérons nos propres expériences : quel est celui qui, ayant une nature profondément compatissante, n’a pas, à certaines occasions, constaté qu’il est possible de partager les difficultés d’un ami, et de soulager dans une certaine mesure l’affligé par la sympathie, de lui communiquer à un certain degré, une nouvelle vitalité et de ranimer son moral ? Mais une telle influence bienfaisante et un tel sentiment des infirmités des autres, dépendent très largement de l’intensité de la compassion qui anime celui qui visite le malade ou l’affligé. Non seulement cela, mais certains animaux éprouvent de la sympathie à des degrés divers ; la colombe, par exemple, étant un des oiseaux les plus doux et les plus sympathiques, fut une des représentations types de notre Rédempteur dans la dispensation mosaïque. On a remarqué qu’il a été utile, en de nombreux cas, d’introduire des colombes dans la chambre de malades qui y ont trouvé quelque soulagement. Peut-être qu’en raison de sa nature sympathique, la colombe prend une certaine part de la maladie et communique en retour une certaine mesure de sa propre vitalité. On constate cela du fait que les oiseaux deviennent malades (leurs membres se raidissent comme s’ils avaient des rhumatismes, etc.), tandis que le malade est soulagé dans une mesure correspondante.

            Quand nous nous souvenons que notre amour et notre sympathie ne sont que ce qui a survécu de ces sentiments-là, au cours de six mille ans de chute, et sachant, par contre, que notre Rédempteur était parfait et que, de ce fait, cette qualité d’amour compatissant abondait en Lui dans la plus grande mesure, nous pouvons comprendre, faiblement, il est vrai, comment il « était ému de compassion à la vue de nos infirmités ». Sa compassion était émue, parce qu’il était de nature distinguée, parfaite, sensible, douce ; elle n’avait pas été endurcie par l’égoïsme et le péché, que ce fût par hérédité, ou par acquisition personnelle. Nous lisons encore à son sujet qu’il était « ému de compassion » et « qu’il eut compassion de la foule » et ailleurs quand il vit les Juifs pleurer et Marthe et Marie en larmes, il fut profondément ému : « Jésus pleura ». Loin que cette sympathie eût été un signe de faiblesse de caractère, elle indiquait le contraire, car le véritable caractère de l’homme, à l’image et à la ressemblance du Créateur, n’est pas dur, sans pitié et insensible, mais tendre, aimable, affectueux, sympathique. Toutes ces choses concourent donc à nous montrer que celui qui parla « comme jamais homme n’a parlé », compatissait aux conditions de déchéance, aux détresses et aux afflictions de l’humanité, comme aucun des membres de la race déchue ne pourrait le faire.

            Indépendamment de cela, nous devons nous rappeler l’objet même de la venue de notre Seigneur dans le monde. Ce ne fut pas seulement pour manifester une puissance sans qu’il ne lui en coûtât rien, mais, ainsi qu’il l’expliqua lui-même, le Fils de l’Homme vint pour servir les autres et pour donner sa vie en rançon pour beaucoup. En vérité, le salaire du péché n’était pas la souffrance, mais la mort ; c’est pourquoi souffrir de la part de notre Seigneur n’aurait pas payé pour nous le salaire du péché ; il était absolument nécessaire qu’il « goûtât la mort pour tous ». C’est pourquoi nous lisons que « Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures » (1 Cor. 15 : 3). Néanmoins, il convenait que, prenant la place du pécheur, notre Seigneur fît l’expérience de tout ce qu’impliquait la malédiction, la peine de mort ; et étant donné que la famille humaine meurt par un processus de perte graduelle de la vie, par suite de faiblesses, de maladies, d’infirmités, il était approprié que, d’une manière correspondante, notre cher Rédempteur passât aussi par cette expérience. Puisqu’il n’était pas lui-même le pécheur, tous les châtiments du péché qui pouvaient tomber sur lui, devaient l’être du fait qu’il prenait la place du pécheur et supportait pour nous les coups de la Justice.

            Notre Seigneur fit cela, en ce qui concerne la maladie, la douleur et la faiblesse, de la manière la meilleure et la plus utile, c’est-à-dire en répandant volontairement sa vie, jour après jour, durant les trois ans et demi de son ministère, faisant le don de sa vitalité à ceux qui n’appréciaient pas ses mobiles (sa grâce, son amour). Ainsi est-il écrit : « Il a livré son âme [son être, son existence] à la mort ». « Il a livré son âme [son être] en sacrifice pour le péché » (Es. 53 : 10, 12). Nous pouvons voir rapidement que depuis le moment de sa consécration, à l’âge de trente ans lorsqu’il fut baptisé par Jean dans le Jourdain, jusqu’au Calvaire, il répandit constamment son âme ; sa vitalité sortait continuellement de lui pour aider et guérir ceux qu’il servait. Et bien que tout cela n’aurait pas été suffisant pour payer le prix de nos péchés, toute fois cela faisait partie de l’action graduelle de la mort s’exerçant sur notre cher Rédempteur, action qui atteignit son point culminant au Calvaire lorsqu’il s’écria : « Tout est accompli », et que sa dernière étincelle de vie S’éteignit.

            Il semblerait qu’il fût tout aussi nécessaire que Jésus sacrifiât, dépensât ses forces vives et fût touché par les expériences de notre processus de mort, qu’il fût, d’autre part, obligé d’expérimenter, ne fût-ce qu’un instant, la condition de séparation complète du pécheur d’avec le Père Céleste, sans aucun secours divin, lorsqu’il s’écria : « Mon Dieu ! Mon Dieu ! Pourquoi m’as-tu abandonné ? » S’étant substitué au pécheur, il devait supporter le châtiment infligé à celui-ci dans tous ses détails ; sa mission de sacrifice ne pouvait être achevée avant que tout cela eût été accompli — avant qu’il ait passé par toutes les épreuves estimées nécessaires par le Père Céleste pour son élévation au-dessus des anges, principautés et puissances et son association avec le Père sur le trône de l’Univers.

            Toutes ces expériences par lesquelles le Père Céleste fit passer son Fils Bien-aimé avant de l’élever à la droite de sa majesté et de lui confier la grande œuvre de bénir toutes les familles de la terre, n’étaient pas simplement des épreuves (« tests ») de la fidélité de l’Unique Engendré, du Logos. Les Écritures nous assurent qu’elles étaient également nécessaires afin que notre Seigneur pût compatir aux faiblesses de ceux qu’il rachetait ainsi, afin qu’il pût éprouver de la compassion pour tous ceux qui voudraient revenir à une pleine communion avec Dieu par lui, et les « secourir » : l’Église durant l’Age actuel, et le monde pendant l’Age millénaire : « Afin qu’il fût un miséricordieux et fidèle souverain sacrificateur dans les choses qui concernent Dieu », « qui a été tenté en toutes choses comme nous le sommes », « quelqu’un qui pût avoir compassion des ignorants et de ceux qui sont égarés ; puisque lui-même a été assiégé de faiblesses ». « C’est aussi pour cela qu’il peut sauver parfaitement ceux qui s’approchent de Dieu par lui ». Vraiment, « il nous convenait, en effet, d’avoir un Souverain Sacrificateur comme lui », — saint, innocent, sans souillure, séparé des pécheurs et plus élevé que les cieux ». — Héb. 2 : 17, 18 ; 4 : 15, 16 ; 5 : 2 ; 7 : 25, 26. — (D. et S.)

Échec aux  doutes

Christ est ton sûr Rocher ;

De ce bon fondement pas un instant ne doute.

Ne crains pas la fureur des vagues en déroute,

De ce Roc aucun vent ne saurait t’arracher.

Christ est ton seul Ami.

Il connaît ta faiblesse et fait Sa force tienne.

Crois ! En son nom puissant la victoire est certaine ;

Il combattra pour toi, tu gagneras par Lui.

Christ est ta douce Paix :

C’est Lui qui te sauva de la mort et du vice,

Et qui, par le manteau de sa haute justice,

T’épargne le courroux des célestes décrets.

Christ est ta SURETTE,

Renonce donc à toi et fais-Lui confiance,

Et tu pourras entrer contre toute émergence,

Dans les lieux bienheureux de la félicité.

                                (Extraits du Poème de l’Aurore N° 25)