JOSEPH (3ème partie)

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(3ème partie)

Nous allons au cours de cet exposé poursuivre l’histoire d’un homme remarquable à beaucoup d’égards, dont nous avons parlé lors de nos précé­dentes leçons. Sa vie est riche d’enseignements et de­vrait nous profiter sur le plan du développement chré­tien. Cette histoire est résumée en très peu de mots dans le Psaume 105 : 16-23, que nous avons déjà cité :

« Il appela sur le pays la famine, il coupa tout moyen de subsistance. Il envoya devant eux un homme : Joseph fut vendu comme esclave. On serra ses pieds dans des liens, on le mit aux fers, jusqu’au temps où arriva ce qu’il avait annoncé, et où la parole de l’Eternel l’éprouva. Le roi fit ôter ses liens, et le do­minateur des peuples le délivra. Il l’établit seigneur sur sa maison, et gouverneur sur tous ses biens, afin qu’il pût enchaîner ses princes et qu’il enseignât la sagesse à ses anciens. Alors Israël vint en Egypte et Jacob sé­journa dans le pays de Cham. »

Il s’agit de JOSEPH. Dans les chapitres 37 à 40 du livre de la Genèse, que nous avons considérés précé­demment, nous avons analysé la période de sa vie qui fut en fait une période d’humiliation. Ce fut pour lui l’école de l’adversité, où il apprit les leçons nécessaires pour le conduire à l’élévation, qui a fait l’objet d’une seconde analyse, en considérant alors les chapitres 41 à 43. Aujourd’hui, nous prendrons en compte les cha­pitres 44 et suivants de la Genèse, qui traitent de cette élévation et nous conduisent jusqu’au terme de sa vie.

Chapitre 44 : Joseph met ses frères à l’épreuve.

Ce chapitre nous montre que les frères de Joseph n’étaient plus aussi durs de cœur qu’ils l’étaient à l’époque où ils projetèrent de le tuer, le laissant dans une fosse puis finalement, le vendant comme esclave.

D’une part ce chapitre nous montre comment les expériences de Joseph produisirent en lui, grâce à sa foi, un grand caractère, plein de sympathie et entière­ment obéissant à Dieu.

D’autre part, qu’un autre procédé, différent de celui appliqué à Joseph, fut utilisé à l’égard de ses dix frè­res. Ils furent éprouvés par le remord et devinrent plus compréhensifs, plus affectueux, plus fidèles à leur père Jacob. En effet, sous la direction divine, toutes les ex­périences de la vie et leurs résultats, l’amertume et la douceur, les bonnes ou les mauvaises actions ont pour but de corriger et sont salutaires. La confiance en Dieu est cependant nécessaire comme base de chaque bé­nédiction semblable.

Nous avons pu apprécier la confiance de Joseph et ce chapitre nous montre que ses frères, quoique d’un caractère différent, reconnaissaient le Tout-Puissant, Le révéraient et comprenaient que l’on doive s’attendre à une juste rétribution de sa part pour chaque mau­vaise action.

Nous voyons qu’après le festin qu’offrit Joseph au cours duquel Benjamin obtint cinq parts, les onze frè­res repartirent, très contents de leurs expériences et de la faveur du gouverneur égyptien.

Avant leur départ, et désirant éprouver les senti­ments de ses frères pour leur père et pour Benjamin, Joseph fit placer sa propre coupe d’argent à l’entrée du sac de blé de Benjamin. Après qu’ils eurent repris leur voyage vers Canaan, Joseph envoya ses serviteurs à leur poursuite pour leur dire « Pourquoi avez-vous été si peu aimables envers votre bienfaiteur ? Pourquoi avez-vous pris sa coupe d’argent ? Quels hommes déloyaux vous êtes ! ». Ils protestèrent de leur innocence, et déclarèrent que si la coupe était trouvée en leur possession, ils deviendraient tous volontairement ses esclaves. La recherche de la coupe, selon l’ordre de Joseph, commença par le sac de l’aîné et se termina par celui de Benjamin où elle fut trouvée. Toute la troupe retourna au palais dans une grande affliction.

De nouveau Joseph fut grave et les réprimanda, afin de tester leurs sentiments et voir s’ils abandonne­raient Benjamin. Ils clamèrent encore leur innocence, néanmoins ils se déclarèrent prêts à devenir ses escla­ves. Mais il leur répondit : « Dieu m’en préserve ! Seu­lement celui qui est coupable – Benjamin – sera mon esclave, pour vous, retournez vers vos familles et votre père avec la nourriture et continuez à jouir des faveurs de l’Egypte ».

Il savait que cette proposition les éprouverait. Se­raient-ils contents d’échapper égoïstement à la servi­tude et retourner chez eux, laissant Benjamin en escla­vage ? Auraient-ils la même froideur de cœur qu’ils lui avaient manifestée, quand ils le vendirent comme es­clave ? Auraient-ils le même manque d’égards pour leur pauvre vieux père, quant à ses intérêts et son bonheur ?

Juda, qui s’était porté garant auprès de son père du retour de Benjamin, fit appel à Joseph. Il lui raconta les circonstances dans lesquelles eut lieu le départ de Benjamin – comment le pauvre vieux père s’était atta­ché à Benjamin et comment il s’était porté caution pour le retour de l’enfant. Dans un éloquent plaidoyer, il de­manda avec supplication à être retenu comme esclave afin que son frère Benjamin soit libre : « Permets donc, je te prie, à ton serviteur de rester à la place de l’enfant, comme esclave de mon Seigneur et que l’enfant retourne avec ses frères. Comment pourrais-je remonter vers mon père si l’enfant n’est pas avec moi ? Ah que je ne voie point l’affliction de mon père ».

Ici preuve est faite, preuve d’un changement de cœur satisfaisant pour Joseph autant que pour nous tous.

Joseph ne jugea pas ses frères selon leurs actions passées envers lui, mais selon les sentiments de leur cœur au moment présent. Les frères de Joseph eurent déjà à souffrir pour leurs mauvaises actions envers leur frère et ils reconnurent que leurs diverses épreuves provenaient de ce grand péché commis antérieure­ment.

Quelles leçons pouvons-nous retenir de ces faits ?

1) Devons-nous considérer que le monde est to­talement dépravé et le qualifier avec des mots exces­sifs sous la poussée d’une aversion extrême ? Devons-nous regarder notre prochain avec un œil méfiant, étant incité par une pensée intérieure disant que tout est « mauvaisdans ce monde », qu’il n’y a plus rien de bon ?

Remarquons donc de quelle façon Joseph consi­déra ses frères. Les a-t-il regardés au travers du filtre des évènements du passé qui les montrent méchants, égoïstes ? Ou les a-t-il regardés avec un autre œil, cherchant à découvrir de meilleurs sentiments ?

Celui qui considère que le monde est totalement dépravé s’approche de ses semblables d’une bien mauvaise façon. En recherchant ce qui est mal, ce qui est dépravé, on ne trouve évidemment que ce qui ne va pas. En recherchant les mauvais côtés, on perd de vue le bien qui reste dans le cœur de l’homme.

D’ailleurs, la Bible affirme que tous les hommes sont corrompus (et Elle ne se trompe pas), que per­sonne n’est parfait, non pas un seul, que tous ont pé­ché, tous ont leur part des suites du péché originel ; en conséquence personne ne répond à l’attente de la gloire de Dieu qui fut montrée dans la perfection d’Adam. La pensée biblique est donc que Dieu ne peut accepter dans sa communion que ceux qui sont par­faits. Il ne peut donner sa faveur et la vie éternelle qu’à ceux qui sont complètement en harmonie avec sa pro­pre perfection, tous les hommes étant des pécheurs par la chute, tous ont besoin d’une rédemption ; tous ont besoin d’une réconciliation. Et le plan de Dieu a été mis en œuvre dans ce but.

Le point que nous voulons faire ressortir ici, est que Dieu ne dit nulle part que l’homme est totalement dé­pravé, mais Il dit qu’Il ne peut tolérer le moindre degré d’imperfection. L’arrangement divin par Jésus, le Ré­dempteur et Restaurateur, est qu’Il comblera tous les défauts, les manquements, qu’ils soient en petit nom­bre ou en grand nombre, grands ou petits, de chacun de nous par le grand Rédempteur sans le sacrifice et l’aide duquel le recouvrement de la perfection et l’admissibilité auprès du Père seraient impossibles.

2) Le rôle bénéfique des expériences.

Quand nous considérons le changement si radical qui s’est opéré chez les frères de Joseph nous prenons conscience de l’efficacité des expériences de la vie et du rôle qu’elles jouent pour nous enseigner des leçons profitables.

Nous sommes convaincus qu’une grande partie du péché, de la bassesse, de la cruauté du temps présent peuvent être attribués à l’héritage des faiblesses et aux expériences non prises en considération (celles dont les leçons n’ont pas été emmagasinées). Nous croyons que les expériences de chaque jour servent à nous rendre plus sympathiques et à développer notre ca­ractère. Sachons, nous qui sommes consacrés, retenir les leçons que notre bon Père céleste nous enseigne en nous permettant de vivre certaines situations qui peuvent être parfois douloureuses mais ô combien en­richissantes.

Même dans chaque membre de la race humaine il reste actuellement suffisamment de ressemblance à Dieu pour lui permettre d’apprécier de temps en temps ce qui est bon, vrai, noble et pur. C’est le péché et l’égoïsme qui éloigne l’homme de Dieu. Ainsi dans l’âge Millénaire, quand les influences du mal seront écartées, l’homme se rapprochera de Dieu par les ex­périences qui lui seront données.

Les expériences de la vie actuelle, bonnes et mau­vaises, auront une influence sur la mise à l’épreuve future du monde, mais ne permettront pas de trancher la cause de personne. En effet, quelques-uns entreront dans la vie future et ses épreuves de jugement dans des conditions relativement désavantageuses par suite du mauvais emploi qu’ils ont fait des faveurs et des connaissances qui leur ont été accordées. Ces désa­vantages seront les coups de fouet et les châtiments pour leurs fautes actuelles. D’autres ayant fait des ex­périences salutaires en passant par les épreuves et les afflictions de la vie, deviendront plus doux, plus sym­pathiques, plus justes, plus aimables sous l’influence de leurs précédentes épreuves, comme cela eut lieu avec les frères de Joseph ; ils seront ainsi mieux pré­parés pour entrer dans la période des épreuves du grand « Jour du jugement » du royaume messianique.

De même que Joseph ne jugea pas ses frères selon leurs actions passées mais selon leur condition de cœur présente, de même il en sera lors du jugement futur du monde ; il sera surtout tenu compte de l’état du cœur des hommes à ce moment-là, bien plus que de leurs mauvaises dispositions antérieures. Le principe de justice suit néanmoins son cours : celui qui pèche doit souffrir. Les frères de Joseph eurent à souffrir pour leurs mauvaises actions envers leur frère et ils recon­nurent que leurs diverses épreuves provenaient de ce grand péché commis antérieurement ; il en sera de même pour l’humanité en général. Tous les péchés, toutes les transgressions recevront une juste rétribu­tion et non un châtiment injuste ou les tourments éter­nels.

Les bonnes et les mauvaises actions de l’humanité ont toutes une influence sur la mentalité et le caractère humains et cette mentalité et ce caractère ne sont point perdus dans le sommeil de la mort. Il y aura une résurrection de tous ceux qui sont dans la tombe. Tous entendront la voix du Fils de l’homme et en sortiront chacun selon son rang. Les saints ressuscitent pour la perfection de vie afin d’être les juges du monde. Ceux du monde ressusciteront de même pour être amenés à la connaissance de la vérité. Ces derniers auront la possibilité d’utiliser leurs expériences passées et les leçons qu’ils ont apprises ; ils seront éclairés par la lu­mière glorieuse du royaume du Messie qui sera de­venu universel, cette lumière dissipera toute ignorance, toute superstition, toutes les ténèbres et illuminera la voie du retour à la communion avec Dieu et à la vie éternelle.

Chapitre 45 : Joseph se fait connaître.

Lorsque Joseph vit que ses frères avaient changé, il ressentit de la sympathie pour eux. Quand il vit qu’ils se repentaient de leurs mauvais procédés à son égard, qu’ils comprenaient la désapprobation divine et qu’ils en étaient affligés, il eut pitié d’eux. Lorsqu’il vit les égards qu’ils témoignaient à leur vieux père et leur dé­sir de ne rien faire pour hâter sa mort, par des actes ou des paroles malveillantes, il fut rempli de compassion à leur égard. Il désira cependant que les Egyptiens ne fussent pas présents lorsqu’il se fit reconnaître à ses frères. Sentant l’émotion le gagner, il ordonna à tous les Egyptiens de quitter la salle ; il se fit alors connaître disant : « Je suis Joseph, votre frère, que vous avez vendu pour être mené en Egypte ».

Nous pouvons nous représenter aisément la stu­peur de ses frères. Ils avaient eu l’impression jusque-là que leurs épreuves et leurs difficultés avaient aug­menté et que, directement ou indirectement, Joseph y était pour quelque chose. Le voir en ce moment devant eux, entendre sa parole sans l’intermédiaire d’un inter­prète, dans leur propre langue, leur disant qu’il était Joseph ; quelle ne fut pas leur stupéfaction !

Joseph se hâta de les rassurer en leur manifestant toute sa sympathie et sa miséricorde. Il ne leur adressa aucune menace, il ne leur infligea aucun châtiment pour leur méfait, il ne les blâma même pas de leurs torts ; au contraire, comprenant que leur péché avait déjà apporté son châtiment, Joseph les consola di­sant : « Ne vous affligez pas et ne soyez pas fâchés de m’avoir vendu pour être conduit ici, car c’est pour vous sauver la vie que Dieu m’a envoyé devant vous…, pour vous faire subsister dans le pays et pour vous faire vi­vre par une grande délivrance. Ce n’est donc pas vous qui m’avez envoyé ici, mais c’est Dieu ».

Quelle magnifique vengeance ! Joseph accordait à ses frères un pardon non sollicité et leur exprimait toute sa sympathie. Hélas, combien peu de chrétiens auraient agi aussi noblement dans de telles circonstan­ces ! Cependant les chrétiens ont beaucoup d’avantages de toute sorte sur Joseph car ils ont été engendrés de l’Esprit saint et possèdent les enseigne­ments des Ecritures. Comme Joseph symbolise splen­didement Christ et son Esprit ! Combien les croyances des âges ténébreux nous ont égarés, lorsqu’elles nous ont enseigné que tous les Juifs, les frères de Christ étaient voués aux tourments éternels pour L’avoir cru­cifié au lieu de L’accepter et d’être ses disciples.

Maintenant que la lumière éclaire chaque page de la Bible, les enfants de Dieu voient que le Messie, au lieu de vouer les Juifs aux tourments éternels, veut au contraire leur permettre d’obtenir la miséricorde et le pardon divins. Cette miséricorde leur sera accordée aussitôt après l’établissement du royaume du Messie selon les indications de l’apôtre Paul en Romains 11 : 25-33 : « Ils obtiendront miséricorde par la miséricorde qui vous a été faite ». La même pensée est exprimée par le prophète Zacharie disant d’Israël : « Ils tourne­ront les regards vers moi, celui qu’ils ont percés, ils pleureront amèrement sur lui » (Zacharie 12 : 10). Ils éprouveront un grand chagrin, une grande douleur lorsqu’ils verront quel forfait ils ont commis près de vingt siècles auparavant. Au lieu de leur infliger les tourments éternels, Dieu leur fera miséricorde, comme Il le dit : « Je répandrai sur eux l’esprit de grâce et de supplication ». Quelle magnificence et combien elle est en harmonie avec l’étude symbolique que nous fai­sons. Les dix frères de Joseph personnifient évidem­ment Israël ; les Egyptiens représentent les nations ; Benjamin symbolise la grande multitude. Joseph lui-même illustre les élus, ceux qui font corps avec le Messie dont Jésus est la tête et l’Eglise triomphante les membres du corps.

Il y a aussi ici une leçon intéressante qui nous est enseignée par le pardon complet accordé par Joseph à ses frères. L’assurance qui leur fut donnée de n’avoir été que les instruments choisis par Dieu pour accomplir ses desseins correspond parfaitement avec le mes­sage qui fut transmis aux Juifs dans la suite : à savoir, que la crucifixion du Messie n’était que l’accomplissement des desseins de Dieu qui étaient de répandre ses bénédictions sur toutes les familles de la terre. Les paroles de l’apôtre Pierre à la Pentecôte confirment pleinement la chose ; s’adressant à quel­ques Juifs repentants, il leur expliqua complètement ceci en disant : « Je sais que vous avez agi par igno­rance ainsi que vos chefs » (Actes 3 : 17). L’apôtre Paul nous dit : « Car s’ils l’eussent connu, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de gloire ». – 1 Corinthiens 2 : 8.

L’attitude de Dieu envers les Juifs représentés par les frères de Joseph est clairement indiquée dans le livre prophétique d’Esaïe. La prophétie qui nous inté­resse s’applique spécialement à la fin de l’âge de l’Evangile. Nous sommes persuadés qu’elle est le message destiné actuellement aux Juifs. Ce message ne renferme pas un mot relatif aux tourments éternels, il est au contraire parfaitement conforme à la déclara­tion de l’apôtre Paul indiquant le retour de la faveur divine aux Juifs, à la fin de l’âge actuel ; cette faveur leur sera transmise par Israël spirituel qui est le corps du Messie et dont Jésus est la tête. Nous lisons en ef­fet : « Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu. Parlez au cœur de Jérusalem et criez-lui que sa servi­tude est finie, que son iniquité est expiée, qu’elle a reçu de la main de l’Eternel au double [la deuxième partie] de tous ses péchés. » – Esaïe 40 : 1, 2.

Joseph fut longtemps incompris.

Les frères de Joseph ne le comprirent pas, tant étaient grandes les différences de caractère qui les séparaient, même après qu’ils eussent éprouvé des sentiments de sympathie et de tendresse pour lui. Ils conservaient une certaine méfiance et une certaine crainte à son égard ; s’ils avaient occupé la place de Joseph, ils auraient certainement pris leurs dispositions pour que, de toutes manières, des châtiments eussent été infligés. C’est donc avec une profonde surprise qu’ils entendirent les paroles affectueusement frater­nelles et cordiales de Joseph ; ils ne pouvaient croire à sa parfaite sincérité, ils en conclurent qu’ils étaient ac­cueillis aimablement par égard pour leur père Jacob.

En effet, quelques années après, à la mort de Ja­cob, les dix frères furent en émoi à la pensée que Jo­seph pourrait enfin se venger d’eux. Ils se rendirent auprès de lui et le supplièrent de continuer à leur par­donner. Joseph leur dit : « Soyez sans crainte, car suis-je à la place de Dieu ? Vous aviez médité de me faire du mal : Dieu l’a changé en bien, pour accomplir ce qui arrive aujourd’hui, pour sauver la vie à un peu­ple nombreux. Soyez donc sans crainte ; je vous entre­tiendrai vous et vos enfants et il les consola en parlant à leur cœur. » – Genèse 50 : 19-21.

Joseph avait reçu les enseignements de Dieu.

Quelle que fut la manière dont il apprit ces ensei­gnements, il est évident que Joseph les reçut de Dieu. Il ne voulut exercer aucune vengeance sur ses frères. Tous les châtiments que ces derniers devaient recevoir pour leurs péchés ne devaient pas venir de sa main, mais de celle de Dieu. Ces châtiments, ils les éprouvè­rent évidemment pendant de nombreuses années par les remords, les craintes et les pressentiments qui les obsédèrent. Joseph ne voulut pas empiéter sur les at­tributions de la justice divine qui punit toutes les mau­vaises actions. Son devoir était de se montrer géné­reux, aimable, affectueux, d’être semblable au grand Rédempteur et digne de son royaume messianique.

Il observa les mêmes principes dans toutes ses af­faires ou expériences personnelles. Nous remarquons avec étonnement que cet homme qui avait reçu si peu d’enseignements spirituels avait une compréhension remarquable de l’esprit de vérité qui est l’esprit de Christ. Nous qui sommes engendrés du Saint esprit et qui avons les exemples et la parole de Jésus et des apôtres, ainsi que l’histoire du passé, nous pouvons encore nous asseoir aux pieds de Joseph pour l’écouter et être étonnés de la profondeur avec laquelle il se pénétra des enseignements de Dieu ; nous pouvons tirer de cet exemple des leçons analogues pour nous-mêmes. Il n’éleva pas un murmure, pas un gémissement contre la destinée amère qui avait été son lot. Dans toutes ses paroles et en toutes choses, il rend témoignage de la bonté, de la sagesse, de l’amour et de la puissance de Dieu. Il comprit qu’un seul change­ment ou une seule modification survenue aux épreuves qu’il avait endurées aurait compromis les desseins de Dieu dans leur ensemble, et lui-même n’en aurait pas retiré les enseignements de la vie qui lui étaient néces­saires.

Oh ! Combien les disciples de Jésus doivent regar­der à leur Seigneur dans toutes leurs épreuves ! Com­bien nous devons tous conserver et exercer notre foi en Dieu, qui connaît, qui voit, qui peut et veut faire concourir toutes choses à notre bien, parce que nous L’aimons, parce qu’Il nous a appelés selon ses des­seins et parce que nous nous efforçons d’affermir cet appel et cette élection en développant notre caractère pour le rendre digne « d’avoir part à l’héritage des saints dans la lumière » et semblable à celui de notre Rédempteur.

Jacob en Egypte.

Joseph avait projeté de faire venir en Egypte son père Jacob et toute sa famille pour les cinq dernières années de disette. Il songea à la contrée appelée Go­sen qui se prêtait très bien à son dessein, car c’était une contrée de pâturages pour le bétail. Pharaon plei­nement d’accord avec son premier ministre Joseph qui avait si bien administré le pays pour assurer sa prospé­rité, ratifia ce choix. Il ordonna même d’envoyer des chariots égyptiens pour chercher Jacob déjà très âgé, ainsi que les femmes et les enfants qui ne pouvaient voyager à dos d’âne ou de chameau. Joseph prépara pour ses frères des provisions et des aliments de tout premier choix pour ce voyage, ainsi que divers menus présents pour témoigner de son affection. Il les char­gea d’un message spécial pour son père : « Racontez à mon père toute ma gloire en Egypte et tout ce que vous avez vu ; et vous ferez descendre ici mon père au plus tôt. » Il les congédia ensuite en les embrassant et en leur disant : « Ne vous querellez pas en chemin ».

Joseph était évidemment un profond observateur de la nature humaine. Beaucoup de personnes eus­sent estimé superflue cette recommandation à ses frè­res en de telles circonstances. Beaucoup d’autres au­raient dit : Leurs épreuves se sont terminées par une telle surabondance de bénédictions divines que leur amour fraternel prévaudra contre tout et qu’aucune dispute ne naîtra entre eux. Cependant, c’est le contraire qui a lieu le plus souvent. Quand la prospérité vient, c’est alors que s’élèvent des querelles dans le partage du butin, c’est alors que l’envie et l’égoïsme se manifestent plus ou moins.

Si les frères avaient été dans leur premier état d’esprit, ils auraient éprouvé de la jalousie pour Benja­min à cause des attentions spéciales dont il avait été l’objet de la part de Joseph et particulièrement à cause des trois cents pièces d’argent qu’il avait reçues. Ils n’auraient pas manqué de se dire : Quelles seront les libertés qui nous seront accordées dans le pays de Gosen. Ils n’eussent pas manqué d’imaginer qu’ils se­raient alors à la merci de Joseph qui favoriserait évi­demment Benjamin. La recommandation de Joseph, « ne vous querellez pas en chemin » était donc parfai­tement appropriée.

Nous avons vu qu’il en fut de même dans des cir­constances analogues avec les frères en Christ. Dans leurs afflictions, ils imploraient Dieu du fond de leur cœur mais, dans la prospérité, ils n’étaient que trop enclins à murmurer les uns contre les autres, à mani­fester leur envie et leur jalousie contre les bénédic­tions, les privilèges et la prospérité qui étaient échus à d’autres. Combien une telle erreur est grande ! Chacun doit se rappeler que l’œil du Maître voit les progrès qu’il accomplit en suivant l’exemple de Christ ; chacun doit également se rappeler que l’amour fraternel est une des manifestations qui déterminent le mieux la valeur du caractère.

Cette vérité n’est que trop constatée, car souvent, les frères en Christ nous donnent plus d’ennuis que tous les autres. Nos rapports très intimes, la parfaite connaissance que nous avons les uns des autres ne nous fournissent que trop d’occasions de critiquer, de faire de mauvaises suppositions, ce que nous ne fe­rions pas à l’égard d’autres personnes. Il serait bon que tous les enfants de Dieu acceptent les recomman­dations de Joseph : « Ne vous querellez pas en che­min ». C’est d’ailleurs le chemin que nous impose le Seigneur ; c’est une voie étroite, difficile, pleine d’embûches contre la chair, d’épreuves et de témoignages de l’esprit. L’amour, la sympathie, le travail en commun et l’aide mutuelle devraient se manifester en proportion de ces épreuves.

Le caractère de Joseph est remarquable.

Analysant rétrospectivement toutes ses expériences Joseph aurait pu développer beaucoup d’orgueil. Il au­rait pu se dire qu’il avait beaucoup de chance, qu’il était naturellement intelligent, brillant, habile et que c’était là la raison de son succès ; que c’était également pour cela que son père l’avait préféré aux autres. Il aurait pu penser également que bien qu’il ait été vendu comme esclave, c’est grâce à ses qualités qu’il avait été acheté par un riche maître nommé Potiphar ; que sa supério­rité était la raison de son élévation dans la maison de Potiphar ; que ces mêmes raisons avaient permis son élévation dans une position d’autorité au sein de la pri­son ; que son intelligence lui avait permis d’interpréter les songes ; et d’une manière générale que tout cela l’avait positionné bien au-dessus des autres hommes. Cependant, s’il avait développé une telle vanité, nous pouvons être sûrs qu’elle l’aurait mené à la chute car Dieu n’aurait pas continué à le bénir, à le faire prospé­rer et à l’élever. Nous pouvons être sûrs aussi que, s’il avait développé un tel esprit d’orgueil et de vanité, sa conduite avec ses frères aurait été très différente de ce qu’elle a été. Il n’aurait pas manqué de leur rappeler leur mauvaise conduite à son égard, les aurait mal­traités afin de leur montrer sa puissance, et se serait révélé être un homme beaucoup plus petit que ce que son attitude convenable rapportée dans les écrits bibli­ques nous montre.

Il était un grand homme, et sa grandeur se mani­festa, non seulement dans sa gestion financière de l’Egypte, mais particulièrement dans sa confiance en Dieu, dans sa prise de conscience que la promesse et la bénédiction de Dieu, exprimées à son arrière grand-père Abraham, à son grand-père, Isaac, et à son père Jacob, reposaient sur lui d’une certaine façon, et que tout ce qui lui arrivait allait dans ce sens.

La postérité spirituelle d’Abraham que nous som­mes peut tirer des leçons valables de ce récit. S’il était approprié que Joseph reconnût le Seigneur en tant que donateur de toutes les bénédictions terrestres et tem­porelles qu’il avait reçues, combien plus la postérité spirituelle d’Abraham devrait admettre que les béné­dictions spirituelles reçues proviennent de la main de notre bon Père céleste et reconnaître que chaque fa­veur et occasion de service nous vient de Dieu. Nous devrions certainement être toujours conscients pour réaliser et confesser que c’est le Seigneur qui agit.

Mais au contraire, nous sommes parfois attristés par le fait de trouver certains enfants de Dieu enclins à considérer que la connaissance de la vérité qu’ils ont pourtant reçue du Seigneur et la faveur dont ils bénéfi­cient sont le fruit mérité de leur propre travail, un cer­tain honneur leur étant dû.

D’un autre côté, l’israélite spirituel devrait être beaucoup plus compatissant que Joseph. Il devrait se rendre compte que les persécutions qu’il reçoit, de ses frères et des autres, ne sont que de simples épreuves passagères permises par Dieu en vue de le préparer pour de prochaines bénédictions et pour son élévation. Il devrait apprécier, par l’œil de la foi, que plusieurs de ses progrès spirituels sont venus en raison des persé­cutions provenant du monde et des faux frères. Comme Joseph, il devrait regarder avec une grande satisfaction sur tous ces divers moyens que Dieu em­ploie pour le faire grandir spirituellement, le perfection­ner en tant que « nouvelle créature », en vue d’être héritier de Dieu et cohéritier de Christ. Les obstacles qui nous empêchent de voir que notre avancement provient du Seigneur et non de nous-mêmes, sont un manque d’humilité et un manque de confiance dans la providence divine. Les seules choses qui nous empê­chent de manifester de la patience, de la sympathie et de l’amour à l’égard de ceux qui ont été employés pour nous éprouver, sont un manque d’esprit du Seigneur, d’esprit de miséricorde, et un manque d’aptitude à voir correctement quels agents l’Eternel peut employer pour contribuer au développement de notre caractère chrétien, que ces agents soient des frères ou qu’ils soient du monde, illustré par les égyptiens.

Lorsque nous lisons le verset 9 du chapitre 45 de la Genèse nous comprenons que les frères et le père de Joseph ne furent pas invités à venir en Egypte pour partager son trône et sa puissance, mais à venir y vivre et participer à toutes les bénédictions du pays.

De même, pendant l’âge millénaire, quand Christ, Tête et corps, représenté en Joseph, investi de gloire et de puissance sur le trône d’Egypte sera assis sur le trône céleste à la droite du Père – quand le royaume de Dieu sera pleinement établi sur la terre – tous ceux qui ont faim, qui aspirent au vrai pain du ciel, seront invités à venir et recevront de ses mains ce pain en abon­dance. Personne, cependant, de la classe terrestre ne sera invité à partager les honneurs du royaume, parce que la classe du royaume sera complète. Mais ils se­ront invités à bénéficier des bénédictions du royaume, sur les plans mental, moral et physique, de la santé et de la force, favorisés par le Roi des rois et Seigneur des seigneurs.

Genèse 50 montre la fin d’un homme remarquable.

17 ans après son arrivée en Egypte Jacob mourut (Genèse 47 : 28). Il fut enterré avec tous les cérémo­nials communs à la cour égyptienne, parce qu’il était un parent du représentant du Pharaon. Dès lors les frères de Joseph commencèrent à s’inquiéter. Ils pen­sèrent que Joseph était semblable à eux ; ils ne pou­vaient pas l’imaginer complètement généreux et misé­ricordieux, et bien qu’ils eussent reconnu sa bonté en­vers eux, ils se dirent qu’il était ainsi à cause de leur père Jacob. Maintenant que Jacob était mort, ils crai­gnirent que Joseph les traitât différemment. Animés de tels sentiments, ils envoyèrent un messager à Joseph puis se présentèrent devant lui pour implorer sa misé­ricorde et déclarer vouloir être ses serviteurs.

Il est frappant de constater que cette attitude illustre la condition de beaucoup de personnes qui viennent au Seigneur avec une foi insuffisante. Ils sont convaincus de sa miséricorde à leur égard, mais sont toujours craintifs. La véritable cause en est qu’ils ne Le connaissent pas ; ils L’imaginent animé des mêmes passions qu’eux, empreintes d’animosité. C’est une preuve de croissance en grâce quand, dans nos expé­riences, nous en arrivons à admettre notre propre culpabilité et notre propre indignité de faveur divine, néanmoins, devenant de plus en plus intime avec le Seigneur nous devons admettre avec une pleine assu­rance de foi sa déclaration affirmant que nos péchés sont pardonnés. Le Seigneur déclare en Jean 17 : 3 : « Or, la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. » Mais une telle connaissance ne s’obtient pas instantanément, elle est le résultat d’une croissance en grâce ; car nous nous développons dans la grâce à mesure que nous nous développons dans la connais­sance et inversement. La majorité de ceux qui sont ap­pelés du nom de Christ ne se développent pas simul­tanément dans la grâce et dans la connaissance et de ce fait n’atteignent pas cet état décrit par l’Apôtre sous l’expression « pleine assurance de foi ou pleine confiance », foi en sa bonté, en sa sagesse, en son amour, en ses soins providentiels dans toutes leurs affaires.

La réponse de Joseph à ses frères fut noble au plus haut point. Elle prouva que sa conduite n’était pas sim­plement une manifestation extérieure, mais le fruit d’un caractère établi. Il ne s’est pas dit en lui-même : « Mes frères m’ont mal compris, et bien que je leur pardonne, je vais néanmoins me servir de leur crainte pour affir­mer ma puissance au-dessus d’eux, et je leur dirai : je ne vous ferai aucun mal tant que vous me serez entiè­rement obéissants, tant que vous m’enverrez des pré­sents annuellement, tant que vous me donnerez la dîme de vos revenus, tant que vous viendrez me ren­dre honneur, et reconnaître à nouveau votre mal, et admettre ma générosité. » Non ; il avait un caractère trop noble pour penser ainsi ; il n’était pas du tout égoïste. Mais au contraire il leur répondit : « Ne crai­gnez rien ; car suis-je à la place de Dieu ? » La raison de sa bonne conduite à l’égard de ses frères était la vision correcte qu’il avait de lui-même ; il se considérait comme un simple serviteur de Dieu dans ses rapports avec ses frères, ainsi que dans toutes les autres cho­ses. Il remarquait la providence divine dans toute cette affaire.

Comment aurait-il pu agir autrement ? Il avait vu s’accomplir au cours de tous ces événements les rêves inspirés qu’il avait eus bien des années auparavant. Il avait remarqué comment la providence divine l’avait miraculeusement guidé dans toutes les étapes de sa vie, le conduisant de l’esclavage au trône d’Egypte. Conscient d’avoir été l’objet des soins de Dieu il ne pouvait pas agir ou penser mal à l’égard de ses frères qui avaient été des instruments que Dieu avait em­ployés pour le bénir. Il ne pouvait donc pas être déso­bligeant à leur égard et en même temps loyal et recon­naissant envers Dieu. C’est pourquoi il les encouragea et les réconforta avec ce raisonnement leur montrant que, quoiqu’ils aient eu l’intention de faire le mal et qu’ils l’avaient fait, néanmoins le résultat fut une bonne chose selon la volonté de Dieu. Il leur démontra ainsi qu’il y voyait la main de Dieu, qu’il considérait l’évolution de ces évènements comme une bénédiction divine et que de ce fait il n’y avait pas lieu de nourrir une quelconque animosité à l’égard de quiconque.

Quelle grande bénédiction ce serait pour les Israé­lites spirituels d’apprendre convenablement cette le­çon, à savoir que si nous acceptons que le résultat est bon, et que nous réalisons que nous avons été guidés par Dieu dans cette direction, nous ne devons pas être aigris à l’égard de ceux qui ont été les instruments vo­lontaires ou involontaires dans le cours des événe­ments qui nous ont affectés. Ceux qui sont capables de voir de cette façon les affaires et les forces qui agissent journellement dans leur vie sont à même de « toujours triompher dans le Seigneur » et ils ne trouvent ainsi aucune raison pour se plaindre ou nourrir de l’amertume contre qui que ce soit, que ce soit contre Satan ou contre l’un quelconque de ses serviteurs. Cela ne signifie pas qu’il faille considérer le mal comme quelque chose de bon mais plutôt considérer que puis­que nous sommes en permanence sous les soins et l’attention de Dieu, alors tout ce qu’Il permet est pour notre plus grand bien.

Puissent ces leçons que nous tirons de la vie de Joseph nous permettre de progresser à la ressem­blance du Maître et nous aider à affermir notre appel et notre élection. Amen.

Fr. H. P.

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