LA CHUTE D’UN TRÉSORIER INFIDÈLE

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– Matthieu 26 : 14-25, 47-50 ; 27 : 3-10 –

« Mais malheur à l’homme par qui le Fils de l’homme est livré ! » – Matthieu 26 : 24.

Judas était originaire du sud de la Palestine, tan­dis que les onze autres disciples de Jésus étaient Galiléens. On a conclu que c’est à cause de ses qua­lités commerciales supérieures que Judas fut établi trésorier du groupe des apôtres. Les amis de Jésus prenaient bonne note du fait que Lui et ses disciples devaient employer tout leur temps à la prédication du Royaume. Aussi, n’est-il pas étrange de lire que cer­taines personnes octroyaient des dons d’argent, pour subvenir à leur entretien.

Nous ne pouvons pas nous imaginer Jésus et ses apôtres demandant l’aumône, ou même faisant la quête pour une collecte. S’ils avaient agi de la sorte, ils n’auraient pas pris en considération la déclaration, émanant de Jéhovah et selon laquelle tout l’or, tout l’argent et le bétail paissant sur mille collines Lui ap­partiennent ; et cela aurait impliqué qu’Il éprouvait la nécessité de demander assistance. Contrairement à cette pensée, les Ecritures nous informent que cer­taines personnes contribuaient volontairement à l’entretien du Maître, comme, par exemple, Jeanne, la femme de Chuza, l’intendant d’Hérode, et plusieurs autres personnes (Luc 8 : 3). De tels dons volontaires justifiaient la désignation d’un trésorier commun, pour le groupe, et devant posséder un sens aigu des affai­res.

Nous n’avons aucune raison de croire que Judas était une mauvaise personne, au moment où Jésus le choisit pour être l’un des douze apôtres. Nous avons tout lieu de croire que son caractère changea et qu’il s’aigrit, même sous les influences les plus favorables, car il se trouvait en la compagnie constante de Jésus et des autres apôtres, et le message du Royaume ré­sonnait continuellement dans ses oreilles. Il y eut, ce­pendant, un commencement à son égarement, et les Écritures suggèrent que la tentation qu’il subit résulta de son avarice, de son égoïsme et de son amour pour l’argent.

« UNE RACINE DE TOUS LES MAUX »

Hélas, combien de personnes honnêtes n’ont-elles pas été détournées du chemin de la justice, par l’amour de l’argent ! Nous n’oublions pas que l’une des accusations sérieuses, formulées par Jésus à l’en­contre des Pharisiens, fut qu’ils aimaient l’argent. Il ne serait pas du tout étrange, s’il se révélait que la diffi­culté, éprouvée par beaucoup de Chrétiens au­jourd’hui, gravite autour de cette question de l’amour de l’argent. Il est toujours vrai que « l’amour de l’argent est une racine de tous les maux » (1 Timothée 6 : 10). L’Apôtre déclare qu’en raison de ce défaut trompeur, bien des gens se font grand mal – pas toujours aussi sérieusement, cependant, que Judas.

Judas aimait l’argent à tel point qu’il était prêt à tra­hir son Maître pour trente pièces d’argent, ce qui, en se basant sur le coût de la main-d’œuvre, corres­pondrait à une valeur de deux à trois cents dollars (ré­digé en 1914, trad.). D’autres ont aimé l’argent à tel point qu’ils ont vendu leur conscience pour faire for­tune. Certains ont vendu la Vérité pour de l’argent, croyant mieux prospérer dans les affaires en prônant l’erreur. Quelques-uns ont vendu l’Église pour de l’argent, étant disposés à prêcher ce en quoi ils ne croyaient pas eux-mêmes, pour gagner de l’argent et recevoir l’approbation des hommes. Et d’autres encore ont vendu les intérêts de leur nation pour de l’argent, en échange de leur patriotisme.

A coup sûr, il y a grand besoin pour tous de se mettre en garde contre l’influence insidieuse de l’amour de l’argent. Mais nous devrions distinguer, clairement, la différence entre l’argent et l’amour de l’argent ; en effet, c’est ce dernier qui cause la ruine, qui séduit l’âme et la fait tomber dans le piège. L’argent repré­sente le labeur, le travail pénible, l’accroissement et, en tant que tel, il devrait être apprécié pour le bien qu’il peut occasionner. Mais aimer l’argent, être à son ser­vice, en faire une idole et lui permettre d’éloigner nos cœurs de Dieu, cela, nous ne devrions pas le faire. N’oublions pas que ce fut cet amour de l’argent, qui fut la cause première de l’échec horrible de Judas.

LA RÉALISATION D’UNE PROPHÉTIE

Non pas au début, mais apparemment après, les disciples apprirent que Judas, qui portait la bourse du trésorier, était un voleur (Jean 12 : 6). Sans aucun doute, même quand il s’appropriait les dons affectés au soutien du petit groupe de disciples, Judas pouvait avoir quelque excuse valable ; le péché, en effet, est toujours trompeur. Il ne fait pas de doute qu’il aurait pu dire : « J’ai mis l’argent de côté, pensant que le jour viendrait où le Maître et nous (ses disciples, trad.) en aurions un plus grand besoin, et où ma prévoyance, réfléchie, serait appréciée. » C’est en ruminant sur le sujet que son désir d’argent s’accrût, ce qui poussa son sens aigu des affaires à ourdir le complot pour tra­hir Jésus.

Le récit indique que lorsque Judas s’aperçut que Jésus avait été condamné, il se repentit de son action et, souhaitant se racheter, rendit l’argent reçu aux prin­cipaux sacrificateurs. Ils se rirent de lui, déclarant que ce n’était pas leur affaire, mais la sienne, s’il avait livré du sang innocent. Comme l’argent remboursé était « le prix du sang », il n’était pas permis de le remettre dans le trésor sacré. En lieu et place, ils achetèrent avec cet argent un morceau de terre bon marché, le champ d’un potier, pour la sépulture des étrangers. Ainsi ils réalisè­rent, à la lettre même, une prophétie qu’ils avaient pro­bablement oubliée : « Alors s’accomplit ce qui avait été annoncé par Jérémie, le prophète : Ils ont pris les trente pièces d’argent, la valeur de celui qui a été es­timé, qu’on a estimé de la part des enfants d’Israël ; et ils les ont données pour le champ du potier, comme le Seigneur me l’avait ordonné. » – Matthieu 27 : 9, 10.

Le rapport suggère que Judas fut surpris, lorsqu’il apprit que Jésus avait été condamné. Apparemment, il présumait que Jésus, une fois amené à l’épreuve cru­ciale, ferait valoir ses droits de Messie et triompherait de ses ennemis. Il pensait donc, probablement, qu’il accélérerait l’établissement du Royaume, auquel il es­pérait avoir part. Comme excuse, il pourrait dire, fina­lement : « Nous avons une avance de trente pièces d’argent exactement, et vous pouvez me remercier d’avoir porté l’affaire à son dénouement final plus rapi­dement que d’une autre manière. » Ainsi, il aurait brillé comme un héros et démontré, en même temps, sa sa­gesse financière et les qualités requises pour le poste de Grand Trésorier du Royaume. Mais en plus de tout ceci, apparemment, il se fâcha quelque peu contre Jé­sus, parce que le Maître avait approuvé la conduite de Marie, à propos du nard (le parfum, trad.). Ce fut sous l’impulsion de ce ressentiment, qu’il alla voir les sacrifi­cateurs et les scribes pour la première fois, afin de né­gocier la trahison.

L’OUBLI – SANS ESPOIR DE RÉSURRECTION

Par là, nous ne suggérons pas des excuses pour Judas. Il ne peut y avoir d’excuse alléguée à bon droit pour la déloyauté envers Dieu et sa cause. Nous atti­rons simplement l’attention sur le fait que tout trans­gresseur doit d’abord consentir, dans son for intérieur, à sa mauvaise conduite. En d’autres mots, il faut que l’esprit et la conscience soient pervertis avant chaque pas dans le péché. C’est pourquoi, les paroles de Jé­sus sont entièrement justifiées : «… malheur à l’homme par qui le Fils de l’Homme est livré ! Mieux vaudrait pour cet homme qu’il ne fût pas né. » – Mat­thieu 26 : 24.

Une telle traîtrise, un tel empressement à livrer son Ami, son Maître, Celui qu’il avait accepté comme (étant) le Fils de Dieu, et grâce à qui il avait participé à l’attente du Royaume Messianique, étaient une perfidie de la pire espèce. Avec tous les autres Apôtres, Judas avait été appelé à marcher sur les traces de Jésus et à devenir son compagnon, dans les souffrances et les épreuves découlant de la fidélité à la Vérité. Il devait, lui aussi, être incompris du peuple et, s’il restait fidèle, avoir part avec son Maître au Royaume Céleste qui accordera le bonheur au monde entier. Judas, avec les autres Apôtres, avait prêché le Royaume, chassé des démons et guéri les malades, grâce à la puissance de Dieu qui opérait par le nom de Jésus. Il était, conti­nuellement, auprès du Sauveur et connaissait la pureté de sa vie et sa fidélité à Dieu. C’est là ce qui constituait sa responsabilité et sa culpabilité.

Le fait qu’il se suicida impliquait la réalisation des paroles de Jésus – que Judas souhaitait qu’il ne fût jamais né. Toute personne qui se suicide déclare la même chose. Pourtant, il peut y avoir de l’espoir pour d’autres suicidés, en raison de leur ignorance et parce que le Christ est mort pour tous ; il faut en consé­quence que ceux-là, ensemble avec d’autres, bénéfi­cient certainement de l’opportunité d’obtenir la vie éternelle.

Mais dans le cas de Judas, tout cela n’entrait plus en ligne de compte, en raison du fait qu’il avait déjà bénéficié de tels privilèges, opportunité et connais­sance, et qu’il avait péché contre la lumière et la connaissance. La déclaration affirmant qu’il se retira à sa propre place, à sa place appropriée, ne signifie pas que Judas, ou n’importe qui d’autre, doit être torturé éternellement, comme punition pour le péché. Sa place à lui était plutôt l’oubli, un oubli sans espoir, privé de la perspective d’une résurrection. Il mourut comme un animal sauvage dans son état naturel, et aucun argu­ment ne fut produit pour expliquer qu’un tel caractère, qui avait bénéficié de tels privilèges, devrait un jour bénéficier d’une opportunité nouvelle.

HARMONIE DE DEUX RAPPORTS

Quant au sort de Judas, un texte biblique nous dit qu’il « se retira et alla se pendre » (Matthieu 27 : 5). Un autre texte déclare que, du fait de son iniquité, il réalisa l’achat d´un champ, et qu´en tombant la tête la pre­mière, il « s´est rompu par le milieu du corps, et toutes ses entrailles se sont répandues » (Actes 1 :18). Faire concorder ces deux rapports est très simple. Les deux sont vrais. Pour se pendre, il choisit probablement un arbre avec une branche surplombant un précipice, ce qui devait lui permettre de réaliser facilement son but. Si, sous la tension, la corde se rompit, nous pouvons facilement comprendre comment cette chute, tête baissée, eut lieu.

Cependant, la question de sa mort est de peu d’importance. Ce qui importe, c’est de prêter attention à la manière dont son âme mourut, en ce sens qu’il perdit ses relations avec Dieu et avec le Christ et, par conséquent, tout espoir d’une vie future. Néanmoins, le Maître était doux avec lui jusqu’à la fin, lui donnant toute occasion de se laisser fléchir et de revenir sur ses pas, jusqu’à l’acte final.

Le fait que Dieu avait prévu, dès le commencement, que l’un des Douze trahirait Jésus et que l’achat du champ, au moyen du prix du Sang, avait déjà été pro­phétisé, n’entama pas la responsabilité de Judas à propos de sa propre chute. Ce ne fut pas la prescience divine qui causa du tort à Judas, mais sa propre mau­vaise conduite ; et il en est de même pour tous. Le fait que Dieu sache dès le commencement tout ce qui ad­viendra, n’a aucun effet sur nous, car, en ce qui nous concerne, Il sait simplement ce que nous allons faire de notre plein gré, ce que sera notre propre soumis­sion à l’avarice, au péché.

L’attestation, selon laquelle Jésus savait d’avance qui Le trahirait, ne prouve pas que Jésus le savait au moment où Il choisit Judas. Il savait que les Ecritures donnaient à entendre qu’un de ses disciples Le trahi­rait ; et, dès le début de la déviation de Judas vers le péché, vers l´avarice, Jésus savait qu´il devait être celui qui commettrait l’acte perfide ; cependant, dans aucun sens du mot, la conduite de Jésus n’amena Ju­das à accomplir le mal. Il s’efforça plutôt de le convain­cre du contraire.

WT1914 p5552

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