Volume 6 des Etudes des Ecritures
Le symbole commémoratif de notre Seigneur
Comme nous l’avons exposé précédemment (Voyez le Journal de Sion n° 6 de l’année 1968, n° 2 de l’année 1967), quand le Seigneur institua ce que l’on est convenu d’appeler la «Sainte Cène», c’était en réalité un symbole nouveau présentant certes une relation avec l’ancienne figure de la Pâque juive, bien qu’en en étant absolument distincte, une commémoration, un souvenir anniversaire de ce qui avait eu lieu. Nous lisons en effet « Il prit du pain et après avoir rendu grâce Il le rompit et dit : Prenez, mangez : ceci est mon corps qui est rompu pour vous (ceci me représente, moi l’Agneau réel, ceci représente ma chair). Faites ceci en mémoire de moi ». De toute évidence l’intention du Seigneur était d’inculquer dans la pensée de ses disciples le fait qu’Il était l’Agneau véritable des véritables premiers-nés et de la Maison de la Foi. Le « Faites ceci en mémoire de moi »impliquait que chez ses disciples, cette institution nouvelle devait prendre le pas sur l’ancienne, cette dernière devenant caduque pour la raison qu’elle était accomplie. « De même, après avoir soupé il prit la coupe disant : cette coupe est la Nouvelle Alliance en mon sang » — le sang de l’Alliance — le sang qui scelle la Nouvelle Alliance. «Faites ceci en mémoire de moi toutes les fois que vous en boirez ». Nous ne comprenons pas qu’il faille prendre ces emblèmes n’importe où et n’importe quand. Au contraire, quand cette coupe et ce pain sans levain sont pris dans l’idée d’une célébration de la Pâque, il faut le faire non pas comme une célébration de la figure, mais une célébration de la réalité. Et comme il n’aurait pas été conforme à la légalité juive d’observer la Pâque à aucun autre moment que celui fixé par le Seigneur, de même il ne convient pas de rappeler l’accomplissement à aucun autre moment qu’à son anniversaire. — 1 Corinthiens 11: 23 à 25.
L’Apôtre ajoute : « Car toutes les fois que vous mangez se pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne » (1 Cor. 11 : 26). Cette déclaration prouve que les disciples comprirent parfaitement qu’à partir de ce moment-là et pour tous ceux qui suivaient le Maître, la célébration annuelle de la Pâque revêtait une signification nouvelle : le pain rompu représentait la chair, le corps du Seigneur et la coupe représentait son sang. Bien que cette institution nouvelle ne fût pas imposée aux disciples comme une règle, et bien qu’aucune sanction ou pénitence ne s’attachât à la non observance de cette coutume, le Seigneur n’ignorait pas que tous ceux qui mettraient en Lui leur confiance et verraient en Lui leur véritable Agneau pascal, seraient heureux de commémorer le grand événement de la manière qu’Il leur avait suggérée. Et il en est encore ainsi de nos jours. La Foi continue à trouver son aliment — figuratif s’entend — dans ces humbles symboles « jusqu’à ce qu’il vienne »— non seulement jusqu’au moment de la «parousia» ou présence du Seigneur, dans la moisson ou fin de cet âge, mais jusqu’à ce que, l’un après l’autre, ses disciples aient été rassemblés auprès de Lui, au-delà du «Voile », pour y prendre part, dans un sens plus élevé encore et, comme l’a exprimé le Maître, pour le boire «nouveau dans le Royaume ».
Nous qui sommes plusieurs sommes un seul pain
«La coupe de bénédiction que nous bénissons n’est-elle pas une communion avec le sang du Christ ? Le pain que nous rompons n’est-il pas une communion avec le corps du Christ ? Il n’y a qu’un seul pain; de même, si nombreux que nous soyons, nous formons un seul corps; car tous nous avons notre part d’un seul et même pain ». —1 Corinthiens 10:16, 17.
Conduit par l’Esprit Saint l’Apôtre développe ici une pensée supplémentaire à propos du symbole commémoratif institué par le Seigneur. Il ne conteste pas, au contraire, il affirme que, tout à l’origine, le pain représentait le corps du Seigneur, rompu, sacrifié pour nous, tandis que la coupe représentait son sang, le sang qui scelle notre pardon. Or, maintenant, de surcroît, il établit que les Chrétiens — les membres de l’Ecclésia, les membres du Corps de Christ, les Premiers-nés en perspective, la Nouvelle Création, participent avec le Seigneur à sa mort, participent à son sacrifice, et, comme il l’exprime ailleurs, « achèvent dans leur chair, ce qui manque aux souffrances de Christ »(Colossiens 1: 24). L’idée qui se dégage ici est identique à celle qu’on retrouve dans l’expression: «Nous avons été baptisés dans sa mort ». Ainsi, tandis que la chair de notre Seigneur était le pain rompu en faveur du monde, les croyants de cet Age de l’Evangile, les fidèles, les élus, la Nouvelle Création, sont assimilés et font partie de ce pain, « membres du Corps de Christ ». C’est pourquoi, quand nous rompons le pain, non seulement nous y voyons le sacrifice du Seigneur, mais encore le co-sacrifice de l’Eglise entière, le co-sacrifice de tous ceux qui se sont consacrés et ont accepté de mourir avec Lui, d’être rompus avec Lui, d’avoir part à ses souffrances.
Telle est exactement la pensée que renferme le mot «communion» — commune-union commune-participation. Ainsi, lorsque, chaque année, nous observons cette Commémoration, non seulement nous reconnaissons que notre espoir repose dans le sacrifice de notre cher Rédempteur, mais nous rappelons et renouvelons notre propre consécration à «mourir avec lui afin de vivre avec lui », à « souffrir avec lui afin de régner avec lui ». Quelle signification majestueuse et profonde s’attache à cette célébration instituée par Dieu! Nous ne mettons pas les symboles en lieu et place de la réalité. Rien, assurément, n’était plus éloigné de la pensée du Maître et rien ne serait plus hors de propos si nous nous y laissions entraîner. La communion du cœur avec Lui, se nourrissant de Lui, la communion du cœur avec les autres membres du Corps, la prise en considération au plus profond de notre cœur de la portée de notre alliance par le sacrifice, telle est la réelle communion. Cette communion-là, si nous sommes fidèles, nous la garderons vivante jour après jour, pendant toute l’année; — jour après jour, brisés avec le Maître, nourris jour après jour de ses mérites, fortifiés en Lui et forts de sa force.
Quelle bénédiction accompagne la célébration de cette commémoration ! Quelle chaleur au cœur dans l’aspiration à croître en grâce et en connaissance, à prendre une part toujours plus active au service auquel nous sommes appelés, non seulement dans le présent mais encore dans l’avenir
On remarquera que l’Apôtre met également en cause la coupe pour laquelle nous bénissons Dieu. « N’est-elle pas la communion (commune union, commune-participation) au sang de Christ?» Quel élèvement de la pensée ! Ainsi, les consacrés véritables, le fidèle « Petit troupeau » de la Nouvelle Création, pendant tout cet Age de l’Evangile, ont formé le Christ dans la chair; la souffrance, les épreuves, l’ignominie, la mort de tous ceux que le Seigneur a acceptés et reconnus comme « membres de son Corps », sont toutes assimilées à son sacrifice parce qu’ils ont été unis à Celui qui est notre Chef, notre Souverain Sacrificateur! Qui donc ayant compris toute la grandeur de la situation, qui donc ayant apprécié l’invitation de Dieu à faire partie de cette Ecclésia, à avoir part à la mort par le Sacrifice maintenant et à l’œuvre glorieuse de l’avenir, ne se ré jouirait pas d’être estimé digne de souffrir l’opprobre pour le nom de Christ et déposer sa vie au service de la Vérité comme membre de sa chair et de ses os? Qu’importe à ceux-là que le monde ne les reconnaisse pas comme il ne L’a pas connu ! (1 Jean 3: 1). Que leur importe-t-il de perdre ce à quoi ils tiennent le plus ici-bas pourvu qu’ils soient jugés dignes d’avoir part avec le Rédempteur à sa gloire future!
A mesure qu’ils croissent dans la grâce, la connaissance et le zèle, ils sont mieux à même de peser les choses, de les juger à leur juste valeur et de rallier le point de vue de l’Apôtre qui considérait les avantages de cette terre comme «une perte et un préjudice ». «J’estime, en effet, que les souffrances d’à présent ne sont rien, en comparaison de la gloire qui doit un jour se révéler pour nous ». — Philippiens 3: 8; Romains 8: 18.
Une autre pensée se dessine dans le cadre de l’amour réciproque, de la sympathie et de l’intérêt qui doit exister entre tous les membres de ce « seul corps » du Seigneur. Selon que l’Esprit du Seigneur envahit et gouverne nos cœurs, nous éprouvons de la joie à faire du bien à tous les hommes suivant que l’occasion nous en est offerte, et plus particulièrement à la Maison de la foi. En même temps que nos sympathies iront à toute la race humaine, elles s’élèveront surtout vers le Seigneur et, par voie de conséquence, vers ceux qui sont animés de Son Esprit et suivent le même sentier. L’Apôtre précise que notre amour pour les frères, pour ceux qui appartiennent au même Corps, donne la mesure de notre amour pour le Seigneur. Si notre amour est tel qu’il nous permette de tout supporter de la part d’autrui, à combien plus forte raison devons-nous nous comporter de semblable manière lorsqu’il s’agit des autres membres du même Corps si étroitement unis à nous dans le même Chef ! Il n’est pas étrange que l’Apôtre Jean déclare que l’évidence la plus probante que nous sommes passés de la mort à la vie est notre amour pour nos frères (1 Jean 3 : 14). A la vérité, lorsque l’Apôtre Paul parle d’endurer ce qui manque aux souffrances du Christ, il ajoute: « pour Son Corps qui est l’Eglise ». — Colossiens 1 : 24.
La même pensée se retrouve dans cette autre parole: « Nous devons aussi donner notre vie pour les frères » (1 Jean 3 : 16). De quelle fraternité est-il question ? Où, ailleurs, pourrions-nous espérer trouver un amour si profond des frères qu’il aille jusqu’à sacrifier sa vie pour eux ? Nous ne discutons pas ici de la manière dont il plaira au Seigneur de faire application du sacrifice de l’Eglise représenté par le « bouc de l’Eternel » immolé le Jour de Propitiation (Voir Figures du Tabernacle). Nous ne faisons que noter, avec l’Apôtre d’ailleurs, qu’en ce qui nous concerne, notre sacrifice est orienté plus particulièrement vers les frères, à leur service. Le service pour le monde s’effectuera dans l’Age à venir: le Millénium. Dans les conditions actuelles, notre temps, talents, influence, etc…, sont plus ou moins hypothéqués par nos obligations vis-à-vis des autres (l’épouse, les enfants, les parents âgés ou autres personnes dépendant de nous) ; nous sommes encore obligés de nous pourvoir de «tout ce qui est nécessaire »«décent » et «honnête devant les hommes ». De telle manière qu’il nous reste au demeurant peu de chose à sacrifier pour les frères, et ce peu, le monde, la chair et le diable s’ingénient encore à le diminuer, à le distraire du sacrifice consenti.
Sans doute le Seigneur choisit-Il l’Eglise en un temps où le mal prévaut parce que les circonstances défavorables sont les meilleures pour donner la mesure de l’amour éprouvé pour Lui et les siens. Si notre amour est tiède, le monde, notre égoïsme et l’Adversaire auront toute facilité à accaparer notre temps, notre influence, notre argent. D’autre part, si notre amour pour le Seigneur est ardent, nous nous plairons à Lui sacrifier tout ce que nous pourrons. Non seulement nous donnerons au service des frères notre surplus d’énergie, d’influence ou de moyens quels qu’ils soient, mais l’esprit de dévouement au Seigneur nous portera à nous cantonner dans les strictes et raisonnables exigences de la maison et de la famille de façon à déposer le plus possible sur l’autel du sacrifice. Pendant trois ans et demi, Jésus rompit Son corps; pendant trois ans et demi Il donna Son sang, sa vie et ses sacrifices se consommèrent au Calvaire. Ainsi en est-il de nous: notre vie sacrifiée pour les frères envisage n’importe quelle forme de service, soit matérielle soit spirituelle. Le côté spirituel l’emporte bien sûr sur le côté matériel puisqu’il est de beaucoup le plus important; cependant, celui qui fermerait la porte de son cœur à son frère dans le besoin matériel donnerait la preuve que l’Esprit du Seigneur n’habite pas tellement en lui.
Qui peut y prendre part ?
Et tout d’abord personne ne devrait «communier » sans se confier au préalable dans le sang précieux de Christ répandu en sacrifice pour les péchés. Personne ne devrait «communier » sans avoir, sur les linteaux et les poteaux de son tabernacle terrestre, le sang d’aspersion qui nous parle de paix au lieu d’appeler la vengeance comme celui d’Abel (Héb. 12 : 24). Personne ne devrait prendre part à ces symboles s’il ne possède dans son cœur la réalité que ces derniers représentent; autrement dit, s’il n’a accepté le Christ comme Celui de qui procède sa vie. Personne ne devrait «communier » s’il ne fait partie du Corps unique, du Pain unique et s’il n’a donné sa vie, son sang, sacrifié avec celui du Seigneur, dans le même calice ou coupe. Ici surgit une ligne de démarcation très nette, non seulement entre les croyants et ceux qui ne le sont pas, mais entre ceux qui sont consacrés et ceux qui ne le sont pas. Cependant il appartient à chacun de déterminer pour son propre compte de quel côté de la ligne il croit se tenir, tant que sa conduite extérieure ne dément pas ce qu’il prétend être. Personne n’a le droit de juger autrui. L’Eglise elle-même n’a pas le droit de juger, sauf — comme il a été exposé précédemment — le cas d’espèce soumis à son jugement dans les formes prescrites. Autrement dit, les anciens ou représentants de l’Eglise doivent expliquer aux participants les conditions à réaliser, savoir : (1) la foi dans le sang de Christ et (2) la consécration jusqu’à la mort, au Seigneur et à son service. Ils doivent inviter tous ceux qui se trouvent dans ces dispositions d’esprit à rappeler la mort du Seigneur et leur propre mort avec Lui. Il importe d’éviter, à propos de cette commémoration, toute forme ou apparence même de sectarisme. Il convient au contraire d’accepter avec bienveillance tous ceux qui se proposent de prendre part aux emblèmes, quelle que soit la confession à laquelle ils appartiennent, même s’ils ne sont pas d’accord sur d’autres questions, dès l’instant qu’ils le sont sur les vérités fondamentales: la rédemption par le sang de Christ et la consécration complète jusqu’à la mort sur la base de cette justification.
(Volume 6 des Etudes des Ecritures, pages 526-535 et 539).