M A N A S S É

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Aujourd’hui, nous allons parler d’un roi dont la vie et les expériences donnent à réfléchir. Il s’agit de Manassé, le fils du roi Ézéchias, connu pour avoir été « bon ».

Manassé avait douze ans lorsqu’il devint roi et il régna cinquante-cinq ans sur Juda. Son histoire est relatée en 2 Rois 21 : 1-9 et en 2 Chroniques 33 : 1-20. Il est écrit qu’il fut le pire de tous les rois qui montèrent sur le trône de Juda. Un enfant de douze ans est-il capable de gouverner un pays ? Non, assurément. En conséquence, il eut certainement un tuteur et des conseillers qui prirent les responsabilités à sa place, jusqu’à ce qu’il soit en âge de diriger les affaires du royaume – comme ce fut le cas du roi Joas et de Jehojada. – 2 Rois 12 : 2.

Peut-on faire d’un enfant un criminel ? C’est possible. Cependant, rien n’est dit en ce sens à propos de Manassé. On peut se rendre compte d’après les récits au sujet de la situation de Juda – avant son règne et même sous Ézéchias – que la population était moralement délaissée, et que les classes supérieures étaient ambitieuses, dépravées et idolâtres. Est-il donc étonnant qu’ils entraînèrent le jeune roi sur une voie qui servit leurs intérêts ? Ainsi, sous la royauté de Manassé, Juda sombra sur le plan religieux et moral plus bas que jamais auparavant et que par la suite.

Il paraît étonnant que Dieu ait permis à cet homme de gouverner et de faire régner la terreur pendant cinquante-cinq ans – le plus long règne de l’histoire de Juda.

Nous sommes effrayés à la lecture des transgressions qu’il a commises. Mais beaucoup de choses ont facilité ses mauvaises actions. Bien qu’Ézéchias ait renversé les hauts lieux, la population resta fidèle aux anciens lieux saints du pays et considérait comme une restriction gênante de ne pouvoir sacrifier que dans le Temple à Jérusalem. Manassé ne trouva donc aucune opposition lorsqu’il fit rétablir les hauts lieux qu’avait détruits son père.

Mais, plus grave encore, le culte païen des idoles devint officiel. Baal régna comme aux jours d’Athalie. De surcroît, des magiciens, des devins, des voyants et des gens évoquant les esprits exerçaient leur magie noire sous la protection des autorités. Les autels de la vallée des fils de Hinnom (2 Rois 23 : 10) fumaient des abominables sacrifices d’enfants, dans lesquels Manassé entraîna le peuple – comme son grand-père Achaz autrefois.

En plus de ces anciennes abominations cananéennes, le peuple adopta l’idolâtrie assyrienne et babylonienne. La dépendance politique de Juda aux Assyriens a eu certainement une incidence, car en adorant les dieux de Ninive, Manassé voulut s’assurer la bienveillance du puissant roi assyrien. Déjà du temps d’Achaz, le culte babylonien des étoiles avait trouvé place à Jérusalem ; sur les toits plats des maisons où l’on pouvait contempler le ciel librement, furent érigés des autels pour le culte des idoles. – 2 Rois 23 : 12 ; Sophonie 1 : 5.

Manassé alla encore plus loin : il introduisit le culte du soleil dans le temple. A l’entrée du temple, il fit installer des chars attelés de chevaux consacrés au soleil (2 Rois 23 : 11), et dans le parvis se trouvaient des autels pour les armées célestes. Il y avait aussi une statue d’Astarté et l’impudicité liée à son culte entra même dans le temple, dont les chambres furent aménagées en cellules pour les agissements abominables des prostituées. Il semble même que les femmes de Jérusalem adoraient le dieu assyrien-babylonien Thammuz, le beau fiancé de la déesse Ishtar. (Ézéchiel 8 : 14). Avec l’introduction du culte des idoles, les conducteurs de l’État judaïque voulaient se mettre au même niveau que les païens et supprimer la différence qu’il y avait entre eux et les autres nations.

Pourquoi Dieu permit-Il cela ? Pourquoi autorisa-t-Il cet homme à laisser son peuple s’enfoncer dans la déchéance et l’horreur ?

L’histoire de Manassé montre que Dieu permet souvent le mal, plus particulièrement au sein de son peuple, pour donner l’occasion à ceux qui souffrent à cause du mal, de se révolter et de porter haut la bannière du grand Dieu d’Israël.

Lorsque Manassé fit ériger des statues et des autels pour les dieux de Baal, lorsqu’il pria « toute l’armée des cieux » et ordonna au peuple d’en faire autant – oui, même lorsqu’il fit passer son fils par le feu pour Moloch, il n’y eut aucun prêtre, aucun Lévite, pour s’opposer à ces forfaits, comme cela se passa encore au temps d’Ozias.

Mais Esaïe et Michée n’ont pas vécu pour rien. Venant probablement de l’entourage d’Esaïe, de l’armée de martyrs « pauvres, malheureux et débonnaires », confiants en Dieu, si souvent mentionnés dans les Psaumes, ces voix prophétiques se sont élevées contre les abominations de Manassé, ont témoigné sans peur et ont annoncé l’intervention de la justice divine. Manassé voulut faire taire ces voix indésirables par la violence, en faisant assassiner sans ménagement les prophètes et leurs disciples – comme Jézabel autrefois. « Manassé répandit aussi beaucoup de sang innocent, jusqu’à en remplir Jérusalem d’un bout à l’autre… » (2 Rois 21 : 16). Un ancien manuscrit signale qu’Esaïe, après plus de soixante ans d’activité, mourut en martyr au temps de Manassé, sur l’ordre duquel il aurait été scié. (cf. Hébreux 11 : 37).

Le repentir et la conversion de Manassé.

Cependant Manassé fit une expérience salutaire. Lors d’une bataille, il fut fait prisonnier par les Assyriens qui l’emmenèrent jusqu’à Babylone. Ils lui mirent des chaînes et le battirent de verges. Ils humilièrent profondément ce roi, qui auparavant bénéficiait d’une position élevée.

Là, il arriva quelque chose de spécial. On aurait pu croire que les Assyriens, le peuple le plus cruel de l’Antiquité, auraient tué le prisonnier de quelque manière atroce, mais Dieu dirigea les évènements de telle sorte que Manassé fut libéré et retrouva son trône en Juda.

Manassé comprit la leçon que Dieu voulait lui enseigner. Grâce à ses terribles expériences, il apprit l’humilité et la crainte du Dieu d’Israël. Dès son retour en Juda, il donna l’ordre de détruire tous les autels des idoles et les hauts lieux qu’il avait fait ériger auparavant. Le peuple apporta tous les objets du culte païen jusqu’à la vallée du Cédron, où il les brisa et les jeta.

Mais, dans la courte période de vie qui lui resta, le roi Manassé n’a pas pu réparer tout le mal qu’il avait fait. Il avait commis trop de terribles choses pour pouvoir tout expier avant sa mort. Pourtant, jusqu’à la fin, il essaya de toutes ses forces de faire le bien, se rendant compte qu’il ne pourrait faire oublier toutes les atrocités commises.

Nous avons ici un exemple de la mauvaise influence d’un souverain sur tout un peuple. Malgré sa conversion et une sincère repentance, malgré tous les efforts entrepris dans la bonne direction, la mauvaise semence répandue en si grande quantité ne pouvait plus être déracinée.

« Et Amon, son fils, régna à sa place… Il fit ce qui est mal aux yeux de l’Éternel, comme avait fait Manassé, son père… Et il ne s’humilia pas devant l’Éternel, comme s’était humilié Manassé, son père. » – 2 Chroniques 33 : 20, 22, 23.

En quoi consiste la leçon ?

N’est-ce pas curieux, qu’un peuple tel que les enfants d’Israël se soit constamment laissé entraîner dans l’idolâtrie ? Un peuple qui a vu tant de miracles, qui a reçu tant de bénédictions de la part du Créateur vivant du ciel et de la terre, tel qu’aucun autre peuple au monde ? « J’ai tendu mes mains tous les jours vers un peuple rebelle, qui marche dans une voie mauvaise, au gré de ses pensées. » (Esaïe 65 : 2). Quel autre peuple peut se vanter de bénéficier de la sollicitude et de la miséricorde du Tout-Puissant ?

Les enfants d’Israël semblent avoir, de tout temps, considéré leur élection comme une charge, même de nos jours. Disons, la plupart d’entre eux. Pour cette raison ils ont cherché, tout au long de leur histoire, à ressembler aux autres peuples. « On ne verra pas s’accomplir ce que vous imaginez, quand vous dites : nous voulons être comme les nations, comme les familles des autres pays, nous voulons servir le bois et la pierre. » (Ézéchiel 20 : 32). Ces efforts leur ont-ils apporté la paix, le bonheur et la grâce divine ?

Ne voyons-nous pas aussi le rapprochement de la chrétienté nominale avec un monde qui n’est pas « le monde de Christ » ? Ce procédé lui a-t-il apporté paix, bonheur et grâce divine ?

Et nous, qu’avons-nous à voir avec cette ancienne histoire ? Pratiquons-nous l’idolâtrie ? Avons-nous des amulettes autour du cou, adorons-nous des statues faites de mains d’homme ou des monuments, nous assemblons-nous dans de magnifiques bâtiments, etc. ? Pourquoi l’apôtre Jean mettait-il en garde, déjà à son époque : « Petits enfants, gardez-vous des idoles. » ?

Les idoles d’aujourd’hui prennent d’autres formes. Elles ne sautent pas aux yeux, certaines ont même l’air inoffensives. Nous posons donc la question : quelles sont ces idoles ?

N’est-ce pas idolâtre de chercher notre intérêt personnel plus que notre amour, notre attachement pour notre Créateur et notre Sauveur ? La devise de notre société est : « Je n’ai pas le temps. » Se pourrait-il que l’idole « ne pas avoir le temps » intervienne aussi dans notre vie et voudrait nous détourner de notre désir le plus important ? Soyons honnêtes : si notre amour pour Dieu et pour notre Sauveur se situe réellement à la première place dans notre vie, ne sommes-nous pas prêts à LE servir d’abord, « en temps et hors de temps », même si nous « n’avons pas le temps » ?

Une autre leçon.

Que pouvons-nous retenir de l’histoire de Manassé ? Que Dieu possède tant de patience et de miséricorde qu’Il donne au plus invétéré pécheur une occasion de revenir à LUI, dans la mesure où IL constate chez lui un véritable repentir.

Manassé, après s’être humilié, a essayé de réparer les crimes qu’il avait commis ; mais ils étaient trop nombreux. Le temps lui a manqué, avant sa mort, pour tout redresser. Une mauvaise influence a de profondes et durables répercussions.

Manassé est-il pour autant un « enfant de la mort », un damné éloigné éternellement de Dieu ?

Jésus-Christ est aussi mort pour lui ; lui aussi aura droit à la résurrection « pour le jugement », comme en témoigne Jean 5 : 29. « Ce que je désire, est-ce que le méchant meure ? dit le Seigneur, l’Eternel. N’est-ce pas qu’il change de conduite et qu’il vive ? » (Ézéchiel 18 : 23 ; 33 : 11). Manassé pourra poursuivre son chemin inverse, interrompu par la mort, et bénéficier du sang de réconciliation de notre Sauveur dans le royaume de Christ, comme il est écrit en Ézéchiel 18 : 21, 22 : « Si le méchant revient de tous les péchés qu’il a commis, s’il observe toutes mes lois et pratique la droiture et la justice, il vivra, il ne mourra pas, toutes les transgressions qu’il a commises seront oubliées ; il vivra à cause de la justice qu’il a pratiquée. »

N’est-il pas écrit : « Car, lorsque tes jugements s’exercent sur la terre, les habitants du monde apprennent la justice. » – Esaïe 26 : 9.

TA – Juillet-Août 1997

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