LA MISÉRICORDE ET LA VÉRITÉ, ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS DU CARACTÈRE CHRÉTIEN

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« Que la miséricorde et la vérité ne t’abandonnent pas: lie-les a ton cou, écris-les sur la table de ton coeur» (O). «Ce que l’Eternel demande de toi, c’est que tu pratiques la justice, que tu aimes la miséricorde et que tu marches humblement avec ton Dieu.» — Prov. 3: 3; Michée 6: 8.

La miséricorde et la vérité sont de grands principes de justice. Nous pouvons dire que la vérité et la justice sont synonymes. Ce qui est juste est vrai et ce qui est vrai — ferme, fidèle, stable, réel — est ordinairement juste. Le texte ne dit pas que nous devons lier la justice à notre cou. La justice est une qualité qu’il ne nous est pas permis d’exalter trop hautement, excepté en notre cœur et en notre esprit comme un principe (du modèle) divin. Nous devons nous rappeler qu’il n’y a point de juste, pas même un seul — nul n’est parfait; c’est pourquoi notre conduite pour ce qui concerne la justice ne peut être la même que celle de notre Père céleste. Il ne reconnaît, pour la mesure de toutes choses, aucun idéal moins élevé que la justice.

Donne à la miséricorde et à la vérité une place en vue

Ce n’est que par la justice que nous pouvons être agréables au Père. Si nous n’avons pas de justice, nous devons l’obtenir de Christ, car Dieu n’accepte rien d’imparfait. Imparfaits en nous-mêmes nous devons arriver aussi près que possible du type de justice dans notre conduite personnelle, mais nous ne devons pas exiger l’entière justice des humains. Puisqu’ils n’ont personne pour les justifier, notre devoir est d’être bienveillants envers eux et de nous efforcer d’être miséricordieux comme notre Père céleste. Dans ses agissements, Dieu garda les qualités, justice et miséricorde, distinctement séparées mais nous ne pouvons agir de même.

La personne qui a toujours à l’esprit les principes de justice est une personne de toute intégrité qui se laissera gouverner par la vérité, la pureté et la bonté; celui qui gouverne simplement ces principes devrait cultiver de plus en plus les qualités de la miséricorde. On devrait les lier à son cou.

La pensée émise est celle d’un collier ou d’un ruban avec lequel on se pare. Les qualités du caractère sont des joyaux qu’on peut comparer a un bijou qu’un homme met à sa cravate, à la place la plus en vue. Donnons à ces qualités une place en vue, car elles nous aideront à devenir meilleurs et à être plus agréables au Seigneur.

C’est au cou que les joyaux paraissent le plus. Là, un joyau est bien visible comme ornement. Nous devrions donc attacher ces nobles Qualités du caractère où elles pourront être manifestées dans toutes les affaires de la vie. Que nous achetions ou que nous vendions, ou quoi que nous fassions, nous devrions porter ces ornements. Ils montreront à première vue, quel est notre caractère. On devrait les voir quand on nous rencontre. Il ne devrait y avoir en nous rien de vil, rien de méprisable, rien de mesquin.

Réimpression de la miséricorde et de la vérité dans le cœur

Plus que cela, nous devons graver en notre cœur la miséricorde et la vérité. Rappelons-nous qu’originellement Dieu écrivit la loi divine dans le cœur d’Adam. Dans le cœur et le caractère divins se trouvent la vérité et la miséricorde. Dieu est miséricordieux, bon et plein d’amour. Dieu possède ces traits de caractère et quand il fit l’homme à son image, à sa ressemblance, il le créa avec ces qualités dans le caractère, l’homme ne fut pas créé injuste et menteur.

L’homme tomba de sa perfection originelle. Avec les siècles de chute, d’imperfection d’esprit et de corps et avec tous les intérêts tendant à la satisfaction personnelle aux dépens des autres, ces principes de miséricorde et de vérité se sont grandement effacés de nos cœurs. Comme l’eau tombant constamment et goutte à goutte sur une pierre et l’usure du temps aidant, tendent à en effacer l’inscription de sorte qu’avec le temps on peut à peine déchiffrer les caractères qui y étaient inscrits ; ainsi en est-il de l’homme et des principes de miséricorde et de vérité Qu’il possédait, ils ont été grandement effacés de son cœur. On rencontre souvent des personnes qui ont perdu tout sens de justice, tout sens de miséricorde, presque toute notion de patience, de bonté, d’amitié fraternelle et d’amour. Toutes ces qualités inhérentes au cœur parce qu’elles y ont été placées à l’origine par Dieu, ont été plus ou moins effacées, — chez certains plus que chez d’autres.

Le but des providences de Dieu

Sous les conditions de la nouvelle alliance, et par le ministère du royaume de Christ, Dieu se propose de récrire dans le cœur de l’homme le caractère originel qui y était et qui fut effacé par l’égoïsme. « Voici, les jours viennent, dit l’Eternel, où je ferai avec la maison d’Israël et la maison de Juda une alliance nouvelle…, je mettrai ma loi au dedans d’eux, je l’écrirai dans leur cœur (Jér. 31: 31-33). «Je vous donnerai un cœur nouveau et je mettrai en vous un esprit nouveau; j’ôterai de votre corps le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair? ». — Ez. 36: 26.

La loi de Dieu est la loi de vérité et de miséricorde. La vérité comprend tout ce qui est juste envers Dieu et envers l’homme. La miséricorde comprend toutes les grâces du cœur. Le Millénium sera le temps de la réimpression de ces qualités dans le cœur. Cette œuvre de réimpression qui progressera bientôt dans le monde pendant mille ans a déjà commencé pour l’Eglise. Nous écrivons ces qualités dans notre propre cœur. L’entrée à l’école de Christ est volontaire et non forcée. Dans l’âge prochain les humains devront écrire ces qualités dans leur cœur par l’assistance du Médiateur. Des coups seront nécessaires pour ramener les hommes à la justice et si, intentionnellement, ils sont rebelles à l’obéissance aux lois de justice, ils seront détruits.

A présent, l’obéissance est une chose volontaire. Nous désirons avoir ces leçons écrites dans notre cœur et, pour arriver à cette fin, nous entrons à l’école et nous nous soumettons au grand Maître. Alors, par les différentes expériences de notre vie, le Seigneur nous montre en quel sens nous n’avons pas encore ces qualités gravées dans nos cœurs. Quand nous prions pour avoir la patience, il nous donne des leçons d’expérience qui engendreront cette qualité dans nos cœurs et la fortifieront de plus en plus. Quand nous prions pour avoir de l’amour, il nous donne des épreuves d’amour. Quand nous prions pour avoir la miséricorde, nous trouvons plus d’oppositions, ce qui développe la miséricorde. Ainsi Dieu nous donne des occasions pour écrire la vérité et la miséricorde dans notre cœur.

Nous devons atteindre la condition du cœur où nous aimerons la vérité et la justice et où nous haïrons l’iniquité et l’injustice. Comme peuple de Dieu nous avons maintenant la première occasion de développer ces traits. Si nous sommes trouvés fidèles dans l’étude de cette leçon, le Seigneur nous dit que son intention est de nous employer pendant le règne millénaire, de nous établir juges du monde — ses gouverneurs, ses instructeurs.

Utilité de la loi juive pour les chrétiens

Les paroles de notre second texte furent adressées au peuple hébreu et non aux chrétiens, car, naturellement il n’y avait pas de chrétiens en ce temps-là. Ces paroles ne semblent pas être prophétiques, mais une exhortation au peuple. Apparemment, les Juifs pensaient que l’Eternel demandait trop d’eux, et puisqu’il en était ainsi, ils pensaient qu’il n’y avait pas besoin de garder la loi trop sérieusement. L’Eternel semble ramener la chose à un résumé spécifique. Que vous est-il demandé d’autre que ces trois choses; pratiquer la justice, aimer la miséricorde et marcher humblement avec votre Dieu? Ceci semble renfermer toute la loi.

Le Seigneur s’attendait à ce que les Israélites vécussent autant que possible selon les exigences de la loi et il forma le dessein de leur donner, au propre temps, la nouvelle alliance promise qui enlèverait leur cœur de pierre et leur donnerait un cœur de chair, les rendant ainsi compatissants, mais si maintenant ils voulaient marcher le mieux possible selon les exigences de cette loi en agissant avec justice, en aimant la miséricorde et en marchant humblement avec leur Dieu, ils seraient bénis en conséquence.

Quoique cette loi fût donnée aux Hébreux seulement, les principes qui y sont inculqués sont applicables au monde entier. A quiconque veut avoir quelque rapport avec Dieu, il est demandé d’agir justement, d’aimer la miséricorde et de marcher humblement. Tout exposé de la loi est donc utile au chrétien, en ce qu’il lui donne une conception des types de Dieu. Il lui montre les types de perfection. L’idéal d’un chrétien s’élève plus haut que celui de la loi. La loi n’est qu’une amplification de la règle d’or — Fait à autrui, ce que tu voudrais qu’on te fît. Agis justement envers les autres si tu veux qu’ils agissent justement envers toi, et sois miséricordieux envers les autres si tu veux qu’ils soient miséricordieux envers toi.

En pensant à ces qualités et en considérant laquelle est la principale, nous constatons que, dans notre conduite envers autrui, nous ne pouvons penser un moment à donner moins que la justice; de plus, nous serons aussi miséricordieux que les circonstances le permettront, mais nous ne penserons qu’à la justice. Dans nos exigences des autres cependant nous ne devons pas — comme il est dit plus haut — attendre pleine justice. Rappelons-nous que la famille humaine entière est imparfaite. Si par la grâce de Dieu nous sommes capables d’être plus justes ou plus miséricordieux que la moyenne, c’est par l’Esprit de Dieu.

Le type divin d’une conduite juste

Marcher humblement avec l’Eternel, signifie être dans cette condition d’esprit dans laquelle nous pourrons être enseignés de lui, comprendre sa bonté et notre propre insuffisance, signifie que nous sommes disposés à recevoir les instructions qu’il envoie. Notre race fut créée à son image, mais nous avons perdu à un haut degré cette image, nous devons donc être humbles et dociles en toutes choses.

Comparant ce que Dieu exigeait d’Israël, selon notre texte, avec ce qu’il exige de l’Eglise, nous dirons que Dieu n’exige rien de plus de son Eglise que d’Israël; c’est là tout ce que la justice peut exiger de chaque créature. La position de l’Eglise est particulière en ce sens que Dieu n’exige rien d’elle, mais il lui accorde un privilège. Nous voyons dans l’Eglise un principe opérant, plus élevé que celui de la loi savoir, celui du sacrifice. Jésus aimait le Père, aimait la justice et sacrifia sa volonté, ses ambitions et privilèges terrestres, il nous donna un exemple afin que nous suivions ses traces. Il n’était pas demandé de lui qu’il fasse plus que ce qui est justice, mais il lui était permis de faire plus, ainsi en est-il de l’Eglise, il ne nous est pas demandé de faire plus que ce qui est juste, mais il nous est permis de faire davantage. Si nous présentons notre corps en sacrifice vivant et sommes fidèles jusqu’à la fin, le Père céleste nous comptera parmi ceux à qui il lui plaira de donner bientôt le glorieux Royaume, le Royaume pour lequel nous prions.

Différents degrés d’amour

Le fait d’être entrés volontairement dans cette condition de sacrifice constitue pour nous un asservissement, en ce que nous avons fait des vœux et que nous sommes liés par nos propres vœux. Nous avons fait le vœu de donner notre vie selon l’invitation suivante: « Rassemblez-moi mes fidèles qui ont fait alliance avec moi par le sacrifice », encore l’Eternel ne demande-t-il pas de nous plus que ce qui est justice, mais il attend et veille pour voir à quel degré nous serons fidèles au contrat de notre alliance. Si nous sommes co-sacrificateurs de Jésus, nous deviendrons héritiers avec lui. Lors de notre consécration nous avons pris son joug sur nous. Pourrions-nous retourner en arrière et reprendre les privilèges du rétablissement? Non, cela nous l’avons donné entièrement! La seule chose que nous avons à faire est d’accomplir notre alliance basée sur le sacrifice; la rébellion contre cette alliance signifierait la seconde mort, la destruction éternelle.

Il y a différents degrés d’amour. Le degré de l’amour auquel nous nous sommes consacrés est l’amour dans le sacrifice qui va au-delà de ce qui serait juste envers un frère, un voisin ou un ennemi. C’est là l’amour de Dieu, un amour qui l’emporte sur tout, le plus grand et le plus sublime amour.

Il sera admis par tous, que les exigences de nos deux textes sont très raisonnables. Il est évident que Dieu ne peut pas demander moins de ceux dont il fait l’éducation en vue du jugement futur du monde, toutes ces qualités spécifiées par le prophète sont comprises dans le seul mot —Amour. L’amour exige que nous agissions justement avec nos voisins, avec nos frères, avec notre famille, avec nous-mêmes, que nous nous efforcions de cultiver notre appréciation des droits d’autrui — leurs droits physiques, leurs droits moraux et intellectuels, leurs libertés et que, les appréciant, nous ne cherchions en aucun sens à les restreindre ou à les ignorer. Par-dessus tout, l’amour nous conduit à avoir l’esprit de sacrifice qui joyeusement laisse sa vie pour les frères.

(T.G. 12/1913)

Miséricorde vaut mieux que sacrifice

Genèse 45: 1 — 46: 7.

« Voici qu’il est bon et qu’il est agréable que des frères demeurent unis ensemble. » — Ps. 133: 1.

Lorsque Joseph vit que ses frères étaient changés, il ressentit de la sympathie pour eux. Quand il vit qu’ils se repentaient de leurs mauvais procédés à son égard, qu’ils comprenaient la désapprobation divine et étaient affligés, il eut pitié d’eux. Lorsqu’il vit les égards qu’ils témoignaient à son vieux père et leur désir de ne rien faire pour hâter sa mort, par des actes ou des paroles malveillantes, il fut rempli de pitié pour eux. Il désirait cependant que les Egyptiens ne fussent pas présents lorsqu’il se fit reconnaître à ses frères. Sentant l’émotion le gagner, il ordonna à tous les Egyptiens de quitter la salle; il se fit alors connaître disant: « Je suis Joseph votre frère, que vous avez vendu pour être mené en Egypte ».

Nous pouvons nous représenter aisément la consternation de ses frères. Ils avaient eu l’impression que leurs épreuves et leurs difficultés avaient augmentée que, directement ou indirectement, Joseph y était pour quelque chose. Le voir en ce moment devant eux, entendre sa parole sans l’intermédiaire d’un interprète, dans leur propre langue, leur disant qu’il était Joseph; quelle ne dut pas être leur stupéfaction!

Joseph se hâta de les rassurer en leur manifestant toute sa sympathie et sa pitié. Il ne leur adressa aucune menace, il ne leur infligea aucun châtiment pour leur méfait, il ne les blâma même pas de leurs torts; au contraire, comprenant que le péché leur avait déjà apporté son châtiment, Jo­seph les consola disant: « Ne vous affligez pas et ne soyez pas fâchés de m’avoir vendu pour être conduit ici, car c’est pour vous sauver la vie que Dieu m’a envoyé devant vous.., pour vous faire subsister dans le pays et pour vous faire vivre par une grande délivrance. Ce n’est donc pas vous qui m’avez envoyé ici, mais c’est Dieu ».

Quelle magnifique vengeance! Joseph accordait à ses frères un pardon non sollicité et leur exprimait toute sa sympathie. Hélas, combien peu de chrétiens auraient agi aussi noblement dans de telles circonstances ! Cependant les chrétiens ont beaucoup d’avantages de toute nature sur Joseph car ils ont été engendrés de l’Esprit saint et possèdent les enseignements des Ecritures. Comme Joseph symbolisa splendidement Christ et son Esprit! Combien nos croyances des âges ténébreux nous ont égarés, lorsqu’elles nous ont enseigné que tous les Juifs, les frères de Christ étaient voués aux tourments éternels pour l’avoir crucifié au lieu de l’accepter et d’être ses disciples.

Maintenant, que la lumière éclaire chaque page de la Bible, les enfants de Dieu voient que le Messie, au lieu de vouer les Juifs aux tourments éternels, veut au contraire leur permettre d’obtenir la miséricorde et le pardon divins. Cette miséricorde leur sera accordée aussitôt après l’établissement du royaume du Messie selon les indications de St. Paul dans Rom. 11: 25-33. « Ils obtiendront miséricorde par la miséricorde qui vous a été faite ». La même pensée est exprimée par le prophète, disant d’Israël: « Ils tourneront les regards vers moi, ce lui qu’ils ont percés, ils pleureront amèrement sur lui » (Zach. 12 : 10). Ils éprouveront un grand chagrin, une grande douleur lorsqu’ils ver­ront quel forfait ils ont commis plus de dix-huit siècles auparavant. Au lieu de leur infliger les tourments éternels, Dieu leur fera miséricorde, comme il le dit: « Je répandrai sur eux l’esprit de grâce et de supplication ». Quelle magnificence et combien elle est en harmonie avec l’étude symbolique que nous faisons. Les dix frères de Joseph personnifièrent évidemment Israël; les Egyptiens représentèrent les nations; Benjamin symbolisa la grande multitude. Joseph lui-même fut l’image des élus, de ceux qui font corps avec le Messie dont Jésus est la tête et l’Eglise triomphante les membres du corps.

Parlez au cœur de Jérusalem

La Bible reste conséquente avec elle-même dans son entier, elle conserve son caractère divin dans toutes ses parties. Toutes nos difficultés sont provenues des croyances que nous ont transmises les âges des ténèbres et auxquelles nous ajoutions foi. La Bible déclare, il est vrai, que personne ne peut faire partie d’Israël spirituel, si ce n’est en croyant à Jésus comme le Fils de Dieu, en s’associant avec lui par le renoncement à soi-même et par les souffrances endurées à notre époque, afin de devenir héritier du royaume à venir. La grande erreur fut d’ajouter à ce message si simple, que tous les autres humains étaient destinés à être livrés aux tourments éternels et de prêcher ce message au monde entier, les Juifs y compris.

Tout au contraire, nous voyons maintenant qu’Israël spirituel obtient le Royaume et qu’Israël selon la chair et le monde ne l’obtiennent pas dans ce sens, ils manquent leur but qui était d’atteindre cette gloire et cette bénédiction suprêmes. Nous voyons cependant que le but de Dieu, en créant ce royaume, est de répandre par lui ses bénédictions sur Israël selon la chair et, par ce dernier, sur le reste de l’humanité.

Voici donc la leçon qui nous est enseignée par le pardon complet accordé par Joseph à ses frères. L’assurance qui leur fut donnée de n’avoir été que les instruments choisis par Dieu pour accomplir ses desseins correspond parfaitement avec le message qui fut transmis aux Juifs dans la suite: à savoir, que la crucifixion du Messie n’était que l’accomplissement des desseins de Dieu qui étaient de répandre ses bénédictions sur toutes les familles de la terre. Les paroles de St. Pierre à la Pentecôte confirment pleinement la chose; s’adressant à quelques Juifs repentants, il leur expliqua complètement ceci en disant: « Je sais que vous avez agi par ignorance ainsi que vos chefs » (Actes 3:17). St. Paul nous dit: « Car s’ils l’eussent connu, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de gloire ».— 1 Cor. 2: 8.

L’attitude de Dieu envers les Juifs qui sont symbolisés par les frères de Joseph est clairement indiquée dans la prophétie d’Esaïe 40 :1, 2. Cette prophétie s’applique spécialement à la fin de l’âge de l’évangile. Nous sommes persuadés qu’elle est le message destiné actuellement aux Juifs. Ce message ne renferme pas un mot relatif aux tourments éternels, il est au contraire parfaitement conforme à la déclaration de St. Paul indiquant le retour de la faveur divine aux Juifs, à la fin de l’âge actuel; cette faveur leur sera transmise par Israël spirituel qui est le corps du Messie et dont Jésus est la tête. Nous lisons en effet: « Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu. Parlez au cœur de Jérusalem et criez lui que sa servitude est finie, que son iniquité est expiée, qu’elle a reçu de la main de l’Eternel au double [la deuxième partie] de tous ses péchés ».

Il est certain qu’Israël a dû boire la coupe de l’ignominie, de la honte et de l’affliction, pendant les dix-neuf siècles qui se sont écoulés depuis qu’il a livré son Rédempteur aux Romains pour être mis à mort. Nous sommes attristés en pensant que ces châtiments leur ont été infligés par ceux qui commirent l’erreur de se croire des disciples de Jésus. Nous sommes peinés également que les Juifs aient eu, par là même, de si nombreux motifs de ne pouvoir comprendre l’esprit de Christ. Ils pourront comprendre ces choses en se rappelant que, s’il y a de véritables et de faux Juifs, il y a de même de véritables et de faux chrétiens. « Si quelqu’un n’a pas l’esprit de Christ, il ne lui appartient pas ».

Joseph fut longtemps incompris

Les frères de Joseph ne le comprirent pas, tant étaient grandes les différences de caractères qui les séparaient, même après qu’ils eurent éprouvé des sentiments de sympathie et de tendresse pour lui. Ils conservaient une certaine amertume et une certaine animosité à son égard; s’ils avaient occupé la place de Joseph, ils auraient certainement pris leurs dispositions pour que, de toutes manières, des châtiments eussent été infligés. C’est donc avec une profonde surprise qu’ils entendirent les paroles affectueusement fraternelles et cordiales de Joseph; ils ne pouvaient croire à sa parfaite sincérité, ils en conclurent qu’ils étaient accueillis aimablement par égard pour leur père Jacob.

Nous voyons en effet, quelques années après, à la mort de Jacob, que les dix frères furent en émoi à la pensée que Joseph pourrait enfin se venger sur eux. Ils se rendirent auprès de lui et le supplièrent de leur continuer son pardon. Joseph leur dit: « Soyez sans crainte, car suis-je à la place de Dieu ? Vous aviez médité de me faire du mal:Dieu l’a changé en bien, pour accomplir ce qui arrive aujourd’hui, pour sauver la vie à un peuple nombreux. Soyez donc sans crainte; je vous entretiendrai vous et vos enfants et il les consola en parlant à leur cœur . » — Gen. 50: 19-21.

Joseph avait reçu les enseignements de Dieu

Quelle que fut la manière dont il apprit ces enseignements, il est évident que Joseph les reçut de Dieu. Il ne voulut exercer aucune vengeance sur ses frères. Tous les châtiments que ces derniers devaient recevoir pour leurs péchés ne devaient pas venir de sa main, mais de celle de Dieu. Ces châtiments, ils les éprouvèrent évidemment pendant de nombreuses années par les remords, les craintes et les pressentiments qui les obsédèrent. Joseph ne voulut pas empiéter sur les attributions de la justice divine qui punit toutes les mauvaises actions. Son devoir était de se montrer généreux, aimable, affectueux; d’être semblable au grand Rédempteur et digne de son royaume messianique.

Il observa les mêmes principes dans toutes ses affaires ou expériences personnelles. Nous remarquons avec étonnement que cet homme qui avait reçu si peu d’enseignements spirituels avait une compréhension remarquable de l’esprit de vérité qui est l’esprit de Christ. Nous qui sommes engendrés du St.-Esprit et qui avons les exemples et la parole de Jésus et des apôtres, ainsi que l’histoire du passé, nous pouvons encore nous asseoir aux pieds de Joseph pour l’écouter et être étonnés de la profondeur avec laquelle il se pénétra des enseignements de Dieu ; nous pouvons tirer de cet exemple des leçons analogues pour nous-mêmes. Il n’éleva pas un murmure, pas un gémissement contre la destinée amère qui avait été son lot. Dans toutes ses paroles et en toutes choses, il rend témoignage de la bonté, de la sagesse, de l’amour et de la puissance de Dieu. Il comprit qu’un seul changement ou une seule modification survenue aux épreuves qu’il avait endurées aurait compromis les desseins de Dieu dans leur ensemble, et lui-même n’en aurait pas retiré les enseignements de la vie qui lui étaient nécessaires.

Oh! combien les disciples de Jésus doivent regarder à leur Seigneur dans toutes leurs épreuves! Combien nous devons tous conserver et exer­cer notre foi en Dieu, qui connaît, qui voit, qui peut et veut faire concourir toutes choses à notre bien, parce que nous l’aimons, parce qu’il nous a appelés selon ses desseins et parce que nous nous efforçons d’affermir cet appel et cette élection en développant notre caractère pour le rendre digne « d’avoir part à l’héritage des saints dans la lumière » et à celui de notre Rédempteur.

Jacob en Egypte

Joseph avait projeté de faire venir en Egypte son père Jacob et toute sa famille pendant les cinq dernières années de disette. Il songea dans ce but à la contrée appelée Gosen qui se prêtait très bien à son dessein, car c’était une contrée de pâturages pour le bétail. Pharaon pleinement d’accord avec son premier ministre Joseph qui avait si bien administré le pays pour assurer sa prospérité, ratifia ce choix. Il ordonna même d’envoyer des chariots égyptiens pour chercher Jacob déjà très âgé, ainsi que les femmes et les enfants qui ne pouvaient voyager à dos d’âne ou de chameau, etc. Joseph prépara pour ses frères des provisions et des aliments de tout premier choix pour ce voyage, ainsi que divers menus présents pour témoigner de son affection. Il les chargea d’un message spécial pour son père: « Racontez à mon père toute ma gloire en Egypte et tout ce que vous avez vu; et vous ferez descendre ici mon père au plus tôt.» Il les congédia ensuite en les embrassant et en leur disant: «Ne vous querellez pas en chemin »

Joseph était évidemment un profond observateur de la nature humaine. Beaucoup de personnes eussent estimé superflue cette recommandation à ses frères en toutes circonstances. Beaucoup d’autres auraient dit: Leurs épreuves se sont terminées par une telle surabondance de bénédictions divines que leur amour fraternel prévaudra contre tout et qu’aucune dispute ne naîtra entre eux. Cependant, c’est le contraire qui a lieu le plus souvent. Quand la prospérité vient, c’est alors que s’élèvent des querelles dans le partage du butin, c’est alors que l’envie et l’égoïsme se manifestent plus ou moins.

Si les frères avaient été dans leur premier état d’esprit, ils auraient éprouvé de la jalousie pour Benjamin à cause des attentions spéciales dont il avait été l’objet de la part de Joseph et particulièrement à cause des trois cents pièces d’argent qu’il avait reçues. Ils n’auraient pas manqué de se dire: Quelles seront les libertés qui nous seront accordées dans le pays de Gosen. Ils n’eussent pas manqué de s’imaginer qu’ils seraient alors à la merci de Joseph qui favoriserait évidemment Benjamin. La recommandation de Joseph, « ne vous querellez pas en chemin » était donc parfaitement justifiée.

Nous avons vu qu’il en fut de même dans des circonstances analogues avec les frères en Christ. Dans leurs afflictions, ils imploraient Dieu du fond de leur cœur mais, dans la prospérité, ils n’étaient que trop enclins à murmurer les uns contre les autres, à manifester leur envie et leur jalousie contre les bénédictions, les privilèges et la prospérité qui étaient échus à d’autres. Combien une telle erreur est grande! Chacun doit se rappeler que l’œil du Maître voit les progrès qu’il accomplit en suivant l’exemple de Christ ; chacun doit également se rappeler que l’amour fraternel est une des manifestations qui déterminent le mieux la valeur du caractère.

Cette vérité n’est que trop constatée, car souvent, les frères en Christ nous donnent plus d’ennuis que tous les autres. Nos rapports très intimes, la parfaite connaissance que nous avons les uns des autres ne nous fournissent que trop d’occasions de critiquer, de faire de mauvaises suppositions, ce que nous ne ferions pas à l’égard d’autres personnes. Il serait bon que tous les enfants de Dieu acceptent les recommandations de Joseph: « Ne vous querellez pas en chemin.» C’est d’ailleurs le chemin que nous impose le Seigneur; c’est une voie étroite, difficile, pleine d’embûches contre la chair, d’épreuves et de témoignages de l’esprit. L’amour, la sympathie, le travail en commun et l’aide mutuelle devraient se manifester en proportion de ces épreuves. Les paroles prophétiques du psalmiste qui nous servent de texte dans cette étude, furent évidemment écrites pour l’Eglise, les frères du Seigneur: « Voici qu’il est bon et qu’il est agréable que des frères demeurent unis ensemble. »

Le psalmiste compare l’unité des frères, de l’Eglise, avec l’huile précieuse répandue sur la tête du roi et du souverain sacrificateur lorsqu’ils inauguraient leurs fonctions. Cette image indique évidemment que l’huile qui sert à oindre est un symbole du St.-Esprit; de même que cette huile descendait sur la barbe du souverain sacrificateur, jusqu’au bas de son vêtement même, et oignait tout son corps, de même en est-il de l’Esprit saint.

Le sacrificateur représente le sacrificateur royal, Jésus la tête et l’Eglise, son corps. L’onction du St.-Esprit qui descendit sur l’Eglise, le Corps de Christ, à la Pentecôte, s’est continuée pendant l’âge de l’évangile et cette onction est accordée à chacun des véritables membres de l’Eglise. Par cette onction, ses membres sont reconnus comme faisant un avec Christ: « Nous avons tous été baptisés d’un seul Esprit pour être un seul corps. » —1 Cor. 12: 13.

T. G. 1-2/1914