(Suite et fin.)
Joseph fut longtemps incompris
Les frères de Joseph ne le comprirent pas, tant étaient grandes les différences de caractères qui les séparaient, même après qu’ils eurent éprouvé des sentiments de sympathie et de tendresse pour lui, ils conservaient une certaine amertume et une certaine animosité à son égard; s’ils avaient occupé la place de Joseph, ils auraient certainement pris leurs dispositions pour que, de toutes manières, des châtiments eussent été infligés. C’est donc avec une profonde surprise qu’ils entendirent les paroles affectueusement fraternelles et cordiales de Joseph; ils ne pouvaient croire à sa parfaite sincérité, ils en conclurent qu’ils étaient accueillis aimablement par égard pour leur père Jacob.
Nous voyons en effet, quelques années après, à la mort de Jacob, que les dix frères furent en émoi à la pensée que Joseph pourrait enfin se venger sur eux. Il se rendirent auprès de lui et le supplièrent de leur continuer son pardon. Joseph leur dit : “ Soyez sans crainte, car suis-je à la place de Dieu? Vous aviez médité de me faire du mal : Dieu l’a changé en bien, pour accomplir ce qui arrive aujourd’hui, pour sauver la vie à un peuple nombreux. Soyez donc sans crainte; je vous entretiendrai vous et vos enfants et il les consola en parlant à leur cœur. – — Gen. 50 : 19-21.
Joseph avait reçu les enseignements de Dieu
Quelle que fut la manière dont il apprit ces enseignements, il est évident que Joseph les reçut de Dieu. Il ne voulut exercer aucune vengeance sur ses frères. Tous les châtiments que ces derniers devaient recevoir pour leurs péchés ne devaient pas venir de sa main, mais de celle de Dieu. Ces châtiments, ils les éprouvèrent évidemment pendant de nombreuses années par les remords, les craintes et tes pressentiments qui les obsédèrent.
Joseph ne voulut pas empiéter sur les attributions de la justice divine qui punit toutes les mauvaises actions. Son devoir était de se montrer généreux, aimable, affectueux; d’être semblable au grand Rédempteur et digne de son royaume messianique.
Il observa les mêmes principes dans toutes ses affaires ou expériences personnelles. Nous remarquons avec étonnement que cet homme qui avait reçu si peu d’enseignements spirituels avait une compréhension remarquable de l’esprit de vérité qui est l’esprit de Christ. Nous qui sommes engendrés du St-Esprit et qui avons les exemples et la parole de Jésus et des apôtres, ainsi que l’histoire du passé, nous pouvons encore nous asseoir aux pieds de Joseph pour l’écouter et être étonnés de la profondeur avec laquelle il se pénétra des enseignements de Dieu; nous pouvons tirer de cet exemple des leçons analogues pour nous-mêmes. Il n’éleva pas un murmure, pas un gémissement contre la destinée amère qui avait été son lot. Dans toutes ses paroles et en toutes choses, il rend témoignage de la bonté, de la sagesse, de l’amour et de la puissance de Dieu. II comprit qu’un seul changement ou une seule modification survenue aux épreuves qu’il avait endurées aurait compromis les desseins de Dieu dans leur ensemble, et lui-même n’en aurait pas retiré les enseignements de la vie qui lui étaient nécessaires.
Oh! Combien les disciples de Jésus doivent regarder à leur Seigneur dans toutes leurs épreuves! Combien nous devons tous conserver et exercer notre foi en Dieu, qui connaît, qui voit, qui peut et veut faire concourir toutes choses à notre bien, parce que nous l’aimons, parce qu’il nous a appelés selon ses desseins et parce que nous nous efforçons d’affermir cet appel et cette élection en développant notre caractère pour le rendre digne ‘ d’avoir part à l’héritage des saints dans la lumière ‘ et à celui de notre Rédempteur.
Jacob en Egypte
Joseph avait projeté de faire venir en Egypte son père, Jacob et toute sa famille pendant les cinq dernières années de disette. Il songea dans ce but à la contrée appelée Gosen qui se prêtait très bien à son dessein, car c’était une contrée de pâturages pour le bétail. Pharaon pleinement d’accord avec son premier ministre Joseph qui avait si bien administré le pays pour assurer sa prospérité, ratifia ce choix. Il ordonna même d’envoyer des chariots égyptiens pour chercher Jacob déjà très âgé, ainsi que les femmes et les enfants qui ne pouvaient voyager à dos d’âne ou de chameau, etc. Joseph prépara pour ses frères des provisions et des aliments de tout premier choix pour ce voyage, ainsi que divers menus présents pour témoigner de son affection. Il les chargea d’un message spécial pour son père : ” Racontez à mon père toute ma gloire en Egypte et tout ce que vous avez vu; et vous ferez descendre ici mon père au plus tôt. ” Il les congédia ensuite en les embrassant et en leur disant :
“ Ne vous querellez pas en chemin”‘
Joseph était évidemment un profond observateur de la nature humaine. Beaucoup de personnes eussent estimé superflue cette recommandation à ses frères en toutes circonstances. Beaucoup d’autres auraient dit : Leurs épreuves se sont terminées par une telle surabondance de bénédictions divines que leur amour fraternel prévaudra contre tout et qu’aucune dispute ne naîtra entre eux. Cependant, c’est le contraire qui a lieu le plus souvent. Quand la prospérité vient, c’est alors que s’élèvent des querelles dans le partage du butin, c’est alors que l’envie et l’égoïsme se manifestent plus ou moins.
Si les frères avaient été dans leur premier état d’esprit, ils auraient éprouvé de la jalousie pour Benjamin à cause des attentions spéciales dont il avait été l’objet de la part de Joseph et particulièrement à cause des trois cents pièces d’argent qu’il avait reçues. Ils n’auraient pas manqué de se dire : Quelles seront les libertés qui nous seront accordées dans le pays de Gosen. Ils n’eussent pas manqué de s’imaginer qu’ils seraient alors à la merci de Joseph qui favoriserait évidemment Benjamin. La recommandation de Joseph, “ne vous querellez pas en chemin ” était donc parfaitement justifiée.
Nous avons vu qu’il en fut de même dans des circonstances analogues avec les frères en Christ. Dans leurs afflictions, ils imploraient Dieu du fond de leur cœur mais, dans la prospérité, ils n’étaient que trop enclins à murmurer les uns contre les autres, à manifester leur envie et leur jalousie contre les bénédictions, les privilèges et la prospérité qui étaient échus à d’autres. Combien une telle erreur est grande! Chacun doit se rappeler que l’œil du Maître voit les progrès qu’il accomplit en suivant l’exemple de Christ; chacun doit également se rappeler que l’amour fraternel est une des manifestations qui déterminent le mieux la valeur du caractère.
Cette vérité n’est que trop constatée, car souvent, les frères en Christ nous donnent plus d’ennuis que tous les autres. Nos rapports très intimes, la parfaite connaissance que nous avons les uns des autres ne nous fournissent que trop d’occasions de critiquer, de faire de mauvaises suppositions, ce que nous ne ferions pas à l’égard d’au-
15 Février 1914
très personnes. Il serait bon que tous les enfants de Dieu acceptent les recommandations de Joseph : “Ne vous querellez pas en chemin. ” C’est d’ailleurs le chemin que nous impose le Seigneur; c’est une voie étroite, difficile, pleine d’embûches contre sa chair, d’épreuves et de témoignages de l’esprit. L’amour, la sympathie, le travail en commun et l’aide mutuelle devraient se manifester en proportion de ces épreuves. Les paroles prophétiques du psalmiste qui nous servent de texte dans cette étude, furent évidemment écrites pour l’Eglise, les frères du Seigneur : “ Voici qu’il est bon et qu il est agréable que des frères demeurent unis ensemble”
Le psalmiste compare l’unité des frères, de l’Eglise, avec l’huile précieuse répandue sur la tête du roi et du souverain sacrificateur lorsqu’ils inauguraient leurs fonctions. Cette image indique évidemment que l’huile qui sert à oindre est un symbole du St-Esprit; de même que cette huile descendait sur la barbe du souverain sacrificateur, jusqu’au bas de son vêtement même, et oignait tout son corps, de même en est-il de l’Esprit saint. Le sacrificateur représente Melchisédec, le sacrificateur royal, Jésus la tête et l’Eglise, son corps. L’onction du St-Esprit qui descendit sur l’Eglise, le Corps de Christ, à la Pentecôte, s’est continuée pendant l’âge de l’évangile et cette onction est accordée à chacun des véritables membres de l’Eglise. Par cette onction, ses membres sont reconnus comme faisant un avec Christ : ” Nous avons tous été baptisés d’un seul Esprit pour être un seul corps.” -1 Cor. 12 : 13.