Bien cher frère!
C’est avec grand plaisir que nous avons reçu carte et lettre. Merci pour tous les renseignements et nouvelles. Pour la Vedetta . . j’ai consigné aujourd’hui les dernières pages. Il faudra au moins en tirer 2000 exemplaires. . . . Le Seigneur nous fait assister à un mouvement qui me surprend moi-même. Le frère Bauchetti est toujours plus courageux et enthousiaste et même parmi les pasteurs nous avons des lecteurs de l’Aurore très intéressés. J’ai entendu de mes oreilles ici, à Pinerolo, devant la Commission qui visitait l’église vaudoise de P. l’ancien R., enthousiasmé de l’Aurora, faire aux pasteurs le reproche de prêcher une doctrine qui n’était pas biblique, celle des tourments éternels. Personne n’a protesté dans l’assemblée. Le jour après, M. R. avait à dîner tous les membres de la Commission, et il leur a prouvé qu’ils erraient en ne connaissant pas les Ecritures et que c’était de leur devoir de lire l’Aurore du Milléhum. Si j’avais du temps je devrais toujours être en visite pour donner des explications et étudier des sujets très importants. A la Tour le prof. F. est très intéressé et va publier une recension de l’Aurore. De Venise le frère List, qui est très actif et qui voit déjà des fruits de son activité, m’écrit tout fraîchement qu’un de nos frères, qui fréquentait encore une réunion de prière, a demandé au Seigneur d’ouvrir les yeux des pasteurs afin qu’ils cessent de prêcher sa haine et son courroux pour annoncer son amour et sa sagesse. Après cela on a bien brutalisé ce pauvre frère qui leur a répondu que maltraiter n’était pas répondre et que c’était un moyen de lui faire voir plus clairement son devoir de sortir de Babylone. Le prêtre de Ferrandina (dont il est question dans la lettre ci-après) marche bien, et nous avons bien d’autres signes que le Seigneur moissonne. Je suis tout à fait débordé et je renvoi à une autrefois d’autres nouvelles et certaines traductions de lettres et articles de journaux; aujourd’hui j’ai fait 11 paquets de 118 vols, de l’Aurore qui m’ont été requis. L’intérêt va croissant aussi ici et dans les alentours; et du sud je reçois de très bonnes nouvelles; fr. B. garde le silence depuis quelques temps, faute d’autres nouvelles probablement.
Chaque Dimanche après-midi je vais à St. Germano Chisone pour une réunion … où il y a cinq ou six personnes très intéressées dans la “ vérité présente.” …
Si tu écris au fr. Russell saluez bien ce frère de la part de nous tous de la Péninsule et présentez lui l’expression de notre reconnaissance. Envoyez-vous le Phare anglais à fr. Bauchetti? Que le Seigneur soit avec chacun de nous et nous conduise dans sa voie. Saluez tous les frères et soeurs et recevez nos meilleures salutations, votre très dévoué en Lui
Daniel Rivoire.
*
[Voici entre autres, l’essai de traduction d’une lettre de style rustique mais provenant d’un coeur droit et consacre. — ID. R.]Messieurs et frères en Jésus-Christ.
Après avoir relu plusieurs fois ,L’Aurore du Millénium je viens vous déclarer l’immense allégresse, la joie, la lumière et la persuasion que j’ai puisées dans un livre si précieux.
Les grandes difficultés et contradictions qui s’opposaient à la solution de plusieurs passages bibliques, sont maintenant dissipées comme les brouillards au lever d’un beau soleil. Loué soit l’Eternel qui a fait, par sa bonté, resplendir une lumière nouvelle!
Plusieurs riches, cependant, en sont extrêmement découragés par la pensée que l’épouvantable détresse surviendra. Même, dans quelques-uns, après la lecture de la Vedetta l’appréhension a été si grande et troublante qu’ils ont refusé de lire le divin Plan des Âges. Ils font comme l’autruche qui cache sa tète pour ne pas voir le danger, les pauvres gens.
A F. (pays de 7000 hab.) un prêtre surtout ne tarît pas tellement est grand son enthousiasme pour ces grandes vérités qui, dans aucune époque antérieure, ont été ni annoncées ni comprises par aucun ministre d’aucun parti. Le prêtre s’appelle iD. Donato Guiliani, il vous prie de vouloir l’aider de sortir de l’impie synagogue romaine, en expédiant à son adresse non seulement les N° arriérés de la Vedetta, mais d’autres brochures encore, et si possible le divin Plan des Âges.
Sachant donc que votre but est de répandre la lumière et moissonner le froment de Christ., je vous prie d’expédier au dit prêtre ce que vous jugez pouvoir lui être utile, afin que dans Ferrandina (pays de scandale au plus haut degré) on puisse voir un réveil positif, et un soi-disant ,,prêtre” exemplaire qui, après avoir vécu pendant tant d’années dans les ténèbres parvient à la lumière resplendissante de la vérité présente. la vérité d’aujourd’hui. J’ai fait mon possible pour encourager ce prêtre et j’ai confiance que vous l’aiderez dans la connaissance, gratuitement, car il est pauvre. — Quant aux journaux “ La Vedetta ” après en avoir répandus largement ici dans le pays, j’en ai aussi distribués à Ferrandina, Montescaglioso, Romarino, Grottale, Matera. J’en possède encore pour les donner à quelques occasions. Quant àl’Aurora, maintenant que ma famille s’en est imbue et restaurée, je la fais aussi circuler. Mais je ne puis pas contenter tout le monde en même temps. Et comme l’avis sur les journaux disait qu’on pouvait en avoir la lecture gratuite, les demandes dans ce sens sont par trop nombreuses. Mais vous savez quelle misère réelle il y a chez nous. Veuillez donc m’envoyer les volumes que vous pourrez. Ceux qui pourront s’empresseront certainement de les payer au moins en partie. — Si vous voulez, vous pourrez aussi me confier la vente des volumes. Pendant l’hiver je ne puis sortir du pays, mais je les exposerai sur la place publique et j’aurai ainsi l’occasion de parler au public. Quand je pourrai aller en tournée ce sera pour moi une grande consolation de porter la lumière et la vérité dans les alentours. Et devant y aller pour la vente de mes travaux, quelle magnifique occasion! pour un tel privilège je refuse nettement le tant pour cent. Vous pouvez disposer d’un serviteur et frère dévoué qui fera en proportion du don qu’il a reçu de Dieu. Enfin je vous remercie
118 Janvier –Mars 1905
de ce que sans me connaître vous avez bien voulu me fournir tant de choses précieuses qui m’ont enrichi de sublimes connaissances et d’éternelles vérités. Je remercie et je loue Dieu et le glorifie pour la bonne part que vous avez choisie pour vous mais que vous communiquez aussi à tous ceux qui aiment son avènement. Que par sa grâce il veuille répandre ses plus précieuses bénédictions sur vous et vos familles et sur tous ses enfants partout jusqu’à ce que vienne son Règne. A lui l’honneur, la louange et la gloire pour l’éternité. — Amen!
Votre frère dans la foi
M. (P . . .), 29 Janvier 1905.
A., armurier.
En lisant la lettre de ce brave vieillard je me disais:
,,Il est vrai, brave frère Coviello, que nous ne te connaissions pas, mais Dieu te connaissait.” Mais il y a ici une coïncidence étrange. Je connaissais A. Coviello depuis longtemps, et il y a huit ans, me trouvant alors dans la province de P., j’avais été appelé pour aller prêcher l’Evangile dans son pays. A cause d’un malentendu, un autre m’y avait précédé. Dieu réservait pour notre frère un message plus excellent que celui que j’aurais pu lui apporter alors [D. R., était dans ce temps-la encore au service d’une dénomination religieuse].
France.
Monsieur.
Un ami chrétien m’a remis quelques-unes de vos brochures que m’intéressent au plus haut point; pourriez-vous me prêter ou encore mieux me vendre “LE PLAN DES AGES”, vol. I de l’AURORE DU MILLENIUM, broché.
S’il vous plaît joignez-y quelques traités à distribuer, croyez que je le ferai en toute conscience.
Recevez cher Monsieur mes cordiales salutations S. B.
Massonnau, par Clairac (Lot et Garonne).
* * *
Cher Monsieur et frère en la foi,
Il y aura un an au mois de Mars qu’un jeune homme (Mr. Z. que vous connaissez) colportait “L’ AURORE DU MILLENIUM que nous lui avons acheté. Nous avions logé le dit colporteur, il nous paraissait un croyant ou enfant de Dieu et nous avons causé longuement la doctrine qu’il nous proposait; elle nous paraissait étrange, nous n’avions pas été enseignés ainsi. Il nous laissa aussi quelques brochures, sur l’enfer, les calamités, etc., je les ai toutes lues et en particulier l’AURORE.
Je ne voudrais pas faire erreur, je ne voudrais pas m’égarer de la vérité, j’ai beaucoup prié Dieu à ce sujet. Ce qui me paraît le plus difficile, c’est qu’il me semble que le N. Testament enseigne en gènéral que c’est maintenant le temps favorable, le jour de salut [oui, pour l’Eglise, l’Epouse de l’Agneau, qui est élue dans cet âge. Réd.].
Parmi plusieurs passages que je pourrais vous citer, je vous rappelle Jean 5 :29, où Jésus dit que ceux qui auront fait le mal ressusciteront pour la condamnation ( La version OSTERWALD trad. mal ici, c’ est jugement qu’il faut, voy. toutes les nouvelles traductions. — Réd.) Il semble que ce soit trop tard aprés, mais je ne sais pas comment cela doit s’entendre, je ne comprends pas.
Si vous voulez m’écrire quelque chose à ce sujet, je vous dirais dans l’humilité, que je suis un croyant et que je ne voudrais pas faire fausse route; que Dieu me garde. Je désire pour cela étudier la Bible et le souhaite ainsi à tout peuple de Dieu.
Je vous envoie frs. 2.— pour le Vol. Il. “LE TEMP EST PROCHE”; envoyez-moi aussi quelques brochures de celles que nous n’avons pas . .
Car cela m’occupe et je désire me rendre compte des chosesde la vérité, je désire être pour la vérité. — Recevez mes salutations en notre bien aimé Sauveur
B. par T. (Lot et Garonne). J., jardinier.
Michel Servet.
(..Le jour (du Seigneur, au seuil duquel nous nous trouvons! le fera connaître ”. “ Il met à découvert ce qui est caché dans les ténèbres. ” — 1 Cor 3:13; Job 12 :22.
Ortografe simplifiée.
Par une série d’articles publiés l’an dernier dans l’ECLAIREUR DE VIENNE, j’ai essayé d’atirer l’atencion sur cet noble figure que fut Michel Servet, dont le nom estimable est aujourd’hui tombé dans l’oubli.
J’ai en même temps demandé à mes concitoyens de réha biliter la mémoire de ce novateur en lui élevant un monu ment sur une place publique de Vienne.
Ma propozîcion a été bien acueillie. Je voudrais maintenan que tous les libres—penseurs de France, que tous les esprit lîbres en fussent informés, afin de leur permètre de coopére à l’oeuvre de réparacion que j’ai eu l’honeur de provoquer
C’est pourquoi je m’adrésse au REFORMISTE, avec lacertitude que le propagateur de l’ortografe simplifiée [Mr Jean S. Barès, Directeur du Réformistef reproduira mon apel et le fera conaitre aus quatre coins de notre pays.
Michel Servet naquit en 1511 à Tudelle—en-Navarre. C’est du moins ce qui ressort de l’interrogatoire que lui fitsubir à la prizon de Vienne le grand inquiziteur Mathieu Dry d’horrible mémoire.
D’après cet interrogatoire, et contrairement aus estimacion: de la plupart de ses historiens. Michel Servet qui, à quatorze ans, entendait parfaitement le latin, le grec et l’hébreu passa en 1526 en Italie à la suite de Quintaine, confesseur de Charles-Quint, et ne put, par conséquent, étudier le droit à Toulouse.
Il ne fut pas davantaje un disciple de Socin, puisque Socir (Lélius) ne vint au monde qu’en 1525. Il serait plus exact de regarder Servet come un précurseur et de dire que Socin fut un Servétiste, car le premier ouvraje de Servet contre la Trinité [Michel Servet avait une juste notion de Dieu, come jadis Arius (Jean 17 :3) fraternisait avec les anabatistes et tenait aux bones oeuvres, les fruits de l’Esprit. Il aura probablement entendu de son prédécesseur, l’iluminé Jean Denck, qui faisait voir publiquement le non-fondé des tourments éternels et qui come Servet avait été beaucoup persécuté. —Réd.] et les principaus dogmes de la relijion crétiéne [nominale], DE TRINITATIS ERRORIBUS, parut en 1531. Socin n’avait alors que six ans.
Après de nombreuzes disputes en Allemagne avec les chefs de la Réforme, Oecolampade, Capito, Bucer, Michel Servet vint en France, où il étudia à Paris la médecine sous Sylvius et Fernel. Nous le retrouvons ensuite à Lyon, en qualité de correcteur chez les frères Frellon, imprimeurs—libraires, et sous le nom de Michel Villeneuve. C’est là que l’archevêque de Vienne, Pierre Palmier, le rencontra et l’engaja a venir exercer la médecine dans l’anciène capitale Allobroje.
Servet accepta, et l’archevêque le loja près de son palais. Il y resta douze anées, chéri et estimé de toute la populacion. Voir les MEMOIRES de l’abé Gachet d’Artigny (Paris, De-bure, 1749), qui contiènent des renseignements fort intéressants sur Servet, notament les interregatoires qu’il subit à la prizon de Vienne et le texte complet du jujement écléziastique.
119 Janvier –Mars 1905
L’abé d’Artigny ayant eu à sa dispozicion au moment où il écrivait ses MEMOIRES, les archives alors intactes de l’archevêché de Vienne, a doné des détails précis qu’ont ignoré nombre d’autres historiens.
Le 3 janvier 1553, l’imprimeur viénois Balthazar Arnollet livra à Servet — conu à Vienne sous le nom de Villeneuve
— les 700 exemplaires de son dernier ouvraje, intitulé
CHRISTIANISMO RESTITUTIO.
Il n’en reste plus qu’un seul, qui est à la Bibliotêque nacionale.
Calvin conut cet ouvraje par le libraire Frellon. Il avait voué à Servet une haine implacable et il s’empressa de le dénoncer au cardinal de Tournon, archevêque de Lyon, lequel dépêcha à Vienne l’exterminateur des Vaudois, l’inquiziteur Mathieu Dry.
Michel Servet fut arrêté et incarcéré le 4 avril à la prizon de Vienne, d’où il s’échapa le 7 suivant.
Son procès fut néanmoins instruit. Condamné au bûcher come hérétique, par contumace, il fut brûlé en éfijie, place Saint-Martin, le 17 juin 1553.
Entre temps, Servet avait été arrêté à Genève. Un nouveau procès fut instruit sur l’ordre de Calvin, et le 27 octobre de la même anée, le bûcher de Champey fut alumé. Michel Servet resta deus heures au milieu des flames, sans vouloir rétracter aucune de ses doctrines. Il mourut courajeuzement en persistant dans ses afirmacions et ses négacions.
Ainsi donc, quèle destinée étranje fut cèle de Servet. Deus fois condamné au bûcher come hérétique, une fois à Vienne par les catoliques, une deuzième fois à Genève par les protestans. Deus fois brûlé, d’abord à Vienne, en éfijie, avec ses livres, ensuite à Genève, tout vif!
Le cas est unique, . . . l’illustre savant, à la fois médecin habile, téolojien émérite, écrivain, penseur, filozofe, a été persécuté aussi bien par les catoliques que par les protestans, en combatant leurs doctrines et en proclamant le ridicule de leurs dogmes.
Nule calomnie postune ne viendra ternir la réputacion de Servet, qui fut “ chéri et estimé de tous ”, dit l’Abé d’Artigny, chanoine de la catédrale de Vienne.
Honorer la mémoire de ce martir, de ce savant, de cète victime des relijions [erronées], c’est faire oeuvre de justice; c’est, dans la ville de Vienne livrée par le grand patronat à l’églize et à ses prêtres, faire une excélente propagande anticléricale.
J’aurai complété ce rapide expozé en rapelant que Servet, le premier, découvrit le principe de la circulacion du sang qui, plus tard, immortaliza Harvey.
<Réformiste du 15 Nov. 1904.>
Albert Monot. Réd. “ l’Eclaireur de Vienne.