PARDONNE-NOUS NOS OFFENSES

Listen to this article

« Pardonne-nous nos offenses, comme nous aussi nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés »

– Matthieu 6 : 12 –

La première chose que nous exprimons dans cette demande est la reconnaissance de notre imperfection, du péché, de nos fautes. Nous ressentons que notre condition de péché, nos écarts journaliers involontaires par rapport à sa loi, constituent une sorte de barrage entre nous et le Père céleste. Nous Le prions donc pour qu’Il nous manifeste sa miséricorde, et qu’Il nous pardonne gracieusement nos erreurs journalières. Cela ne concerne en aucun cas le péché originel (qui est venu sur nous par la chute de nos premiers parents), car ce péché Dieu ne peut le pardonner par la prière, mais par la foi en l’œuvre de réconciliation accomplie par notre Seigneur Jésus-Christ. Les paroles de cette prière se rapportent à nos chutes involontaires de chaque jour, accomplies après notre consécration au service de Dieu.

La parole de Dieu nous assure que « Dieu sait de quelle nature nous sommes », et « que la perfection n’habite pas dans nos corps ». Sachant tout cela, Il a mis en place une disposition pour notre purification et la justification de nos péchés. Toutefois, Dieu veut que nous ressentions et comprenions le besoin de sa miséricorde et de sa grâce, pour que nous profitions de ses généreuses dispositions en Christ Jésus en nous présentant chaque jour devant le trône de la grâce, « afin d’obtenir miséricorde et de trouver grâce, pour être secourus dans nos besoins » – Hébreux 4 : 16.

Il y a toutefois lieu de remarquer que la demande du pardon de nos offenses devant le trône de la grâce divine est subordonnée à des conditions que nous exprimons nous-mêmes par les termes « comme nous pardonnons », et selon lesquelles nous voulons que Dieu nous pardonne. Si ces paroles reflètent la réelle condition de notre esprit et de notre cœur et si nous pardonnons effectivement de tout notre cœur à ceux qui nous ont offensés dans une mesure plus ou moins grande, soit en paroles, soit en action, alors nous faisons bien. Notre demande est alors logique, véritable, et nous avons toutes les raisons de nous attendre à ce que Dieu nous écoute. Si nous manifestons notre miséricorde et notre générosité à notre prochain, alors Dieu se montrera miséricordieux à notre égard, et nous pardonnera généreusement, tout comme nous l’avons fait, le faisons et le ferons encore envers ceux qui nous offensent.

Intervient toutefois une question très importante : Nous trouvons-nous dans la condition de cette demande, c’est-à-dire pardonnons-nous effectivement à tous ceux qui nous ont offensés ? Dans la négative, il serait souhaitable de ne pas prier ainsi, car s’approcher de Dieu en disant : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous aussi nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés », et dans le même temps nous rétracter, voudrait dire prier Dieu afin qu’Il ne nous pardonne pas. Nous pouvons être certains qu’Il ne nous pardonnera pas, si nous ne sommes pas prêts à pardonner à tous ceux qui nous ont causé un certain préjudice.

Connaissant la nature humaine, son égoïsme et son ressentiment, Jésus savait que cette prière serait très souvent mal comprise ou ignorée. Toutefois, afin qu’aucun de ses disciples n’ait l’impression de pouvoir se soustraire à cette condition, et penser qu’il n’a pas besoin de pardonner aux autres et qu’il peut s’attendre quand même au pardon divin, le Seigneur a insisté sur cette demande plus que sur aucune autre de toute la prière, quand Il dit : « Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera aussi ; mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous pardonnera pas non plus vos offenses » – Matthieu 6 : 14, 15.

Combien claire et catégorique est cette déclaration ! Il semblerait que face à de telles paroles, tous ceux qui s’approchent de Dieu et qui désirent bénéficier de sa miséricorde, seront prompts, peut-être même à l’extrême, à pardonner les faiblesses des autres, pour bénéficier du pardon divin.

Malheureusement, il n’en est pas ainsi ! La vertu du pardon des faiblesses des autres est très rare parmi les êtres humains, mais aussi parmi ceux qui prétendent être le peuple de Dieu. Combien de petites incompréhensions, de fautes involontaires certains portent au crédit des autres pendant des semaines entières, des mois, voire des années ! Combien il y a de rancœur, de disputes, de paroles méchantes, d’accusations réciproques et de reproches parmi ceux qui devraient s’aimer mutuellement et pardonner, comme Dieu a pardonné en Christ (Ephésiens 4 : 32) ! Combien de fois il nous arrive de constater que la cause de telles accusations ou de reproches faits les uns aux autres n’est pas réelle mais supposée, par manque de compréhension ou de confiance !

Il va de soi que le pardon au fautif doit se faire selon le principe de la justice. Ce qui veut dire que le fautif doit reconnaître sa faute et cesser le mal qu’il commet. Nous soulignons ici que cette procédure doit avoir sa place seulement lorsque le préjudice dont nous avons été victimes est réel, et dans une certaine mesure conscient et délibéré. Par contre, dans les choses de moindre importance où il ne s’agit que de différence d’opinion, et où personne n’a subi de préjudice, nous devrions être prompts à pardonner avec largesse, sans rechercher l’importance de la faute, un aveu quelconque ou une satisfaction personnelle.

Christ a dit : « Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde » (Matthieu 5 : 7). Ne serait-il donc pas plus sécurisant pour nous d’être trop miséricordieux, plutôt que pas assez ? Il semble que Dieu ne considérera pas comme péché le fait de pardonner même à celui qui ne le mérite pas. Toutefois, nous pécherions très certainement si nous entretenions la colère ou la haine injustement, ou si nous imputions à quelqu’un une faute plus lourde que ce qu’elle est en réalité (qu’elle soit réelle ou imaginaire) et n’étions pas disposés à pardonner. « Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera aussi ».

Périodique Straz 1937-12-178 ; 1938-2-18.