“ Ayant donc ces promesses, bien-aimés, purifions-nous de toute souillure de la chair et de l’esprit, achevant la sainteté dans la crainte de Dieu.” — 2 Cor. VII, 1.
Il ne nous faut pas comprendre l’apôtre comme s’il voulait nous dire de nous purifier de la condamnation originelle du péché. Paul et tous les écrivains du N. Testament, à plusieurs reprises et de plusieurs manières, déclarent que par les œuvres de la loi nul ne peut être justifié devant Dieu. Cela signifie que de tout ce que nous pouvons faire, rien ne nous rendra capables de vivre une vie parfaite, même si le péché originel ne nous était plus imputé: à plus forte raison nous serait-il impossible de nous accumuler des mérites qui effaceraient pour nous la part que nous avons dans la transgression originelle. Au contraire, les livres des Ecritures d’une voix unanime disent que seulement par l’effusion de sang il y a pardon du péché — que “c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris” et que “l’Eternel a fait venir sur lui [Jésus] l’iniquité de nous tous”. “Christ a souffert pour les péchés, le juste pour les injustes, afin qu’il nous amenât à Dieu”: grâce à ce sacrifice nous sommes rendus agréables à Dieu et notre condamnation, comme membres de la race d’Adam, est annulée, pour que nous puissions commencer une nouvelle vie (Hébr. 9:22; Esaïe 53:5-6; 1 Pierre 3:18). Mais Dieu a voulu faire plus encore. Sachant que dans notre chair déchue n’habite point le bien, il a gracieusement pourvu à ce que toutes nos faiblesses héréditaires soient couvertes, sauf, bien entendu, celles que nous aimons, les fautes que nous commettons avec intention. Nous avons ainsi ce que les Ecritures dénomment: la justification par la foi au moyen de la grande propitiation faite par la mort de Jésus.
C’est à cette classe de justifiés “par la foi en son sang” (Rom. 3 25) que l’apôtre adresse les paroles de notre texte — les engageant à se purifier de toute souillure de la chair et de l’esprit. Que veut-il dire? Car on peut objecter: Si par la foi en Christ nous avons été purifies, pourquoi croire à l’efficacité de nos propres efforts pour notre purification? Nous répondons que la justification par la foi nous fut accordée comme base de notre consécration à Dieu, en qualité de disciples de Jésus, de “ceux qui suivent l’Agneau”. Nul n’a été ainsi accepté si auparavant il ne s’est détourné du péché, désirant être en harmonie avec Dieu et avec sa justice. Si nous nous sommes consacrés à Dieu après avoir été justifiés, non seulement nous nous sommes détournés du péché, mais nous nous sommes unis à Jésus de tout notre être, enrôlés au service du Prince de notre salut (Hébr. 2:10), pour combattre le bon combat contre le péché sous toutes ses formes en dedans et au dehors de nous. Maintenant si après notre engagement nous recherchons l’aisance et ne combattons pas contre le péché, soit en nous ou autour de nous, cela indiquerait que nous n’avons pas l’Esprit de Christ, qui nous rappelle la déclaration de Paul : “Si quelqu’un n’a pas l’Esprit de Christ, celui-là, n’est pas de lui.” —Rom. 8:9.
Combattre le bon combat.
Nous distinguons donc clairement la volonté de Dieu à Savoir: Faire plus que renoncer au péché dans nos pensées: il nous faut donner notre cœur à Jésus, chercher la communion avec lui: il nous faut être imbus de son esprit d’opposition au péché, pour pouvoir combattre le bon combat de la foi contre l’Adversaire, l’esprit égoïste du monde et les faiblesses, défauts et tendances au péché de notre propre corps mortel. Ce furent là les conditions de notre enrôlement grâce auxquelles nous fûmes acceptés du Seigneur, mais à présent il nous faut combattre le bon combat de la foi, si nous voulons saisir la vie éternelle, si jamais nous voulons obtenir avec notre Chef la grande récompense de gloire, d’honneur et d’immortalité.
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Notre texte ne fait pas mention de la résistance à opposer au Diable et au monde, mais se borne à montrer notre conduite avec nous-mêmes: c’est évidemment la première chose, celle qui nous touche de plus près: —celui, dit Salomon, qui gouverne son esprit et ses pensées, est un plus grand soldat, un plus grand héros que celui qui prend une ville dans un combat. — Prov. 16: 32.
L’Eternel s’attend à une telle démonstration de vie et d’activité de notre part pour réfréner les agissements du péché dans notre chair et dans nos pensées, comme une preuve que la nouvelle créature est consciente de la responsabilité de sa conduite en qualité de soldat du Crucifié. Il a en effet déterminé que nul ne fera partie du petit troupeau de cohéritiers avec son Fils, s’il ne prouve sa loyauté au Père et à la justice par son opposition au péché, démontrant ainsi Sa conformité de cœur avec Jésus. Car nous sommes “prédestinés à être conformes à l’image de son Fils” (Rom. 8 : 29). Celui qui refuse ou néglige le développement de cette ressemblance au caractère à l’esprit et aux dispositions de Christ, rejette les seules conditions à la suite desquelles il ose espérer affermir sa vocation et son élection et prétendre à une place dans la classe du Royaume. En vue de cela, quel zèle ne devrions-nous pas déployer pour répondre aux exhortations pressantes de l’apôtre — combien plus d’ardeur et d’amour en faveur de la justice, de la vérité et de toutes les voies du Seigneur devrions-nous montrer, nous opposant au péché tout particulièrement dans notre propre corps et notre esprit.
Souillure de l’esprit.
La purification de notre entendement est beaucoup plus importante et laborieuse que celle de notre chair; nous pourrions avoir passablement de succès en nous purifiant des souillures de la chair tandis que nos pensées pourraient rester impures. C’est le cas de rappeler ici les pharisiens auxquels le Seigneur reprochait de ne nettoyer que le dehors de la coupe et du plat pendant qu’au dedans ils étaient pleins de rapine et d’incontinence (Mat. 23: 25) “C’est du coeur des hommes que sortent les mauvaises pensées” (Marc 7 : 21) et ces mauvaises pensées, ces viles conceptions sont les instigatrices des souillures de la chair. C’est donc spécialement à la purification de l’esprit que Dieu dans sa Parole s’adresse, durant l’ère chrétienne. Il nous invite avant tout à devenir purs de cœur, à avoir notre volonté bien disposée laissant cette nouvelle volonté gouverner nos pensées. Seulement alors par l’esprit purifié la nouvelle volonté peut agir librement et efficacement en vue de la purification de la chair.
Si nous étions parfaits, petite serait la difficulté de gouverner nos pensées et notre corps aussitôt la volonté orientée du côté de la justice. Mais 6000 ans de chute, loin de notre divin Créateur ont causé en nous tous un mal incroyable. Aussi l’apôtre déclare-t-il: “En ma chair il n’habite pas de bien.” “Nous ne faisons pas ce que nous voudrions” (Rom. 7:18; Gal. 5 : 17). Et Jésus dit: “A la vérité, l’esprit [la nouvelle créature, le nouvel entendement] est de prompte volonté, mais la chair [le vieil homme, au mental et au physique] est faible” (L. Matth. 26 : 41) Cette contradiction entre la nouvelle volonté (le nouvel esprit) et l’esprit charnel (la chair elle-même) tous deux reconnus comme morts, mais en réalité toujours vivants — demande une vigilance continuelle pour les soumettre en accord avec les intentions de la “nouvelle créature”. C‘est un véritable combat: une lutte dans laquelle on peut et l’on doit remporter la victoire, et c’est la victoire dans ce combat que le Seigneur veut récompenser de bénédictions et d’honneurs spéciaux offerts durant l’âge de l’Evangile.
Point n’est besoin de montrer en détail les diverses formes par lesquelles cette souillure de l’esprit se manifeste — c’est l’égoïsme, les viles pensées, les tendances vers le bas, tout un vieil homme opposé aux résolutions et aux voeux du nouvel homme. L’égoïsme la préoccupation du moi, ce monstrueux défaut, si généralement répandu, est souvent si abject qu’on en a honte, qu’on tâche d’en couvrir les conséquences sous les prétextes de générosité, d’œuvres charitables, dons, etc. Les corollaires naturels de cet instinct bestial sont la jalousie, la convoitise et l’ambition. Il nous faut regarder les souillures, suivant l’apôtre, comme originaires du mal, des oeuvres du diable et de la chair. La lasciveté ou la sensualité est une autre partie de cette souillure. La nouvelle créature devrait être en opposition ouverte contre de telles mauvaises dispositions de l’esprit, les méprisant, les combattant jusqu’à extermination.
Souillure de la chair.
Si, selon notre Seigneur, une purification extérieure de la chair, un nettoyage du dehors de la coupe ne prouve pas encore la pureté intérieure de l’esprit et du cœur, par contre, une souillure extérieure indique une souillure de l’entendement, parce que c’est l’esprit qui domine et que s’il est purifié le résultat en est la purification extérieure. Nous pouvons en effet, être sûrs que le désir d’être approuvés par autrui conduirait presque tous à faire en sorte que la conduite soit jugée sinon supérieure du moins à la hauteur de son esprit. Il est plus facile de purifier la chair que l’esprit. L’exhortation urgente de l’apôtre est que nous nous purifions à la fois de toute souillure de la chair et de l’esprit.
Un frère nous disait jadis: “Comment se fait-il que la lecture de l’Aurore du Millénium eut un tel effet sur ma vie et mes habitudes comme aucun autre livre? Je buvais avec modération, mais je fumais immodérément et àl’occasion je jouais aux cartes avec le pasteur de mon église, je chiquais du tabac et occasionnellement je me servais de mots grossiers dont j’ai honte maintenant. Mes amis me firent part de brochures et de traités sur le tabac et sur les liqueurs enivrantes, mais je leur disais en substance: Balayez devant votre porte et je balaierai devant la mienne. Mais après avoir lu l’Aurore il se fit un changement. J’ai abandonné toutes ces choses dont je n’avais aucune honte auparavant. Elles m’apparurent sous un tout autre jour, c. à d., indignes d’un fils de Dieu, d’un disciple de l’Agneau: et ce qui m’étonne c’est que je n’aie rien trouvé dans la série des Aurores qui condamne les choses auxquelles j’ai renoncé. Dites-moi donc comment il se fait que le livre qui ne soufflait mot sur ce sujet a eu sur moi une si puissante influence, tandis que d’autres ouvrages traitant beaucoup de ces questions n’en eurent aucune?
Nous lui répondions: L’Aurore est simplement un exposé, une interprétation de la Bible “dispensant comme
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il faut la parole de la vérité”. Par suite, cet ouvrage ne nous demande pas d’ébrancher de ci de là, mais nous suggère d’abattre tout l’arbre par les racines, de faire mourir le vieil homme en nous montrant que la “nouvelle créature” ne vivra, ne fleurira et n’atteindra finalement la perfection qu’en maîtrisant la vieille nature, pour ainsi devenir “plus que vainqueurs” et être considérés dignes de participer au Royaume en nous étant modelés sur le caractère du Seigneur. — Luc 3 9.
On pourrait objecter qu il faut quand même une grande force de caractère, une forte volonté pour purifier ainsi notre chair et notre esprit. Oui, en effet, et c’est la vertu que le Seigneur cherche à développer en nous. Tous ses cohéritiers du Royaume seront trouvés être de forts caractères et cela justement par le développement actuel du caractère dans le combat contre la chair. On pourrait dire aussi qu’avec les faiblesses de la chair une telle victoire est impossible. A la vérité l’apôtre n’indique pas non plus que la chair puisse devenir entièrement pure et parfaite. Il pense qu’elle peut être purifiée de ses souillures, au point que toutes choses grossières, vilaines et malhonnêtes en pensées et en actions doivent fuir de nous. Mais nous ne pouvons obtenir du coup cette condition désirable et bénie, nous n’y arrivons pas subitement, mais graduellement. Notre purification doit commencer tout au début de notre vie spirituelle et continuer jusqu’au dernier souffle, car si nous pouvons et devenons vite purs de cœur, d’intention, de volonté, il faut certainement du temps pour accomplir la purification de l’esprit et de la chair. Le pouvoir qui dirige cette purification et qui est agréable à Dieu, c’est la nouvelle volonté et ce combat en règle contre le péché et les souillures fortifie la volonté de telle sorte que chaque victoire la rend plus capable et mieux préparée pour les attaques et les surprises futures. C’est en l’exerçant que notre volonté se fortifie. Cela ne demande donc pas seulement une entière consécration dès le début: il faut aussi nous souvenir que la volonté petit toujours, toujours être ferme, prompte et résolue; par suite notre loyauté peut demeurer sincère envers Dieu, c’est à dlire envers la vérité, la justice, la sainteté et l’amour.
”Cest Dieu qui opère on vous.”
D’accord avec ce qui précède l’apôtre nous engage à “travailler à notre propre salut avec crainte et tremblement: car c’est Dieu qui opère en vous et le vouloir et le faire selon son bon plaisir” (Phil. 2:12,13). Nous venons de voir comment nous devons travailler à notre salut, comment le nouvel esprit doit maintenir son influence prédominante sur l’esprit charnel et le corps afin d’obtenir la victoire finale. Il nous reste à voir comment Dieu opère en nous le vouloir et le faire. Dieu fortifie notre nouvel entendement, notre volonté consacrée, en nous révélant de plus en plus clairement la signification des grandes et précieuses promesses de sa Parole. La puissance de Dieu s’exerce donc envers nous au moyen de sa Parole, de sa providence et des frères dans lesquels il a déjà agi et dont une partie de leur travail spirituel, comme représentants du Seigneur, est de s’édifier l’un l’autre sur la très sainte foi et de s’entr’aider dans le nettoiement de l’esprit et de la chair.
Cette pensée est renfermée dans les versets suivants: “Quelle part a le fidèle avec l’incrédule? et quelle convenance a le temple de Dieu avec les idoles? Car vous êtes le temple du Dieu vivant, selon ce que Dieu a dit: J’habiterai parmi eux et j’y marcherai: et je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple. C’est pourquoi, sortez du milieu d’eux [des incrédules, des impurs] et vous séparez, dit le Seigneur, et ne touchez à aucune chose impure et je vous recevrai. Et je vous serai pour père, et vous, vous me serez pour fils et pour filles, dit le Seigneur, (le)Tout-Puissant.” — 2 Cor. 6: 15—18.
“Ayant donc ces promesses, bien-aimés, purifions-nous de toute souillure.” Il y a, en effet, une promesse dans ces paroles: “la puissance de Dieu pour le salut de tout croyant” — la puissance de Dieu, aussi profondément qu’elle est reçue dans des cœurs sincères opérera en eux non seulement de vouloir mais aussi de faire ce qui est juste et conduira ainsi au nettoiement tant de l’esprit que de la chair. Celui qui peut comprendre ce que c’est qu’être membre de la classe du saint temple de Dieu, doit réaliser dans sa conduite le caractère sacré, la sainteté, la pureté de tout ce qui en fait partie. St. Jean dit très bien: “Quiconque a cette espérance en lui se purifie, comme lui-même est pur.” — 1 Jean 3 : 3.
La pensée d’être acceptés en fils et filles de Dieu, fera une impression plus ou moins profonde suivant la façon dont on apprécie ce plus grand des honneurs de Dieu envers les fils des hommes. Aucun croyant n’ira jusqu’à songer que le Dieu trois fois saint puisse avoir communion quelconque avec ce qui est impur et souillé. Et si nous savons que l’Eternel couvre par les mérites de Jésus tous nos défauts et toutes nos faiblesses involontaires, que pouvons-nous demander de plus? Il serait déraisonnable de penser que ce sacrifice de Jésus couvrira aussi des fautes et faiblesses facilement évitables ou même la lenteur volontaire que nous apporterions à nous purifier de toute souillure de la chair et de l’esprit.
Achevant notre sainteté.
Si nous sommes regardés de l’Eternel comme parfaits, comme saints depuis le moment où nous sommes acceptés comme membres de sa famille, c.à d., couverts par la précieuse robe de la justice de Christ, il attend de nous, comme nous venons de le voir, une manifestation d’énergie en combattant les mobiles du péché dans la chair et en achevant la sanctification de notre être. Pour Dieu il n’y a qu’une seule mesure, c’est celle de la perfection de la sainteté: “Soyez parfaits, comme votre Père céleste est parfait” (Matth 5 : 48). Certes, notre Seigneur sait en même temps très bien, qu’avec notre corps mortel et dans les conditions actuelles il serait tout à fait impossible à aucun de ces disciples d’arriver à la perfection au même degré que le Père. Néanmoins il convenait que Jésus donnât la mesure parfaite de la sainteté, le modèle, non pas dans l’attente que nous réussirions jamais à en devenir des copies parfaites, mais, comme écoliers, faisant de leur mieux pour y arriver. Le Seigneur désire que nous nous efforcions continuellement à copier sa perfection et à ne reconnaître aucun autre modèle. C’est pourquoi la déclaration de notre texte: achever notre sanctification, ne peut sous-entendre davantage que cela: nous devons faire notre possible pour parvenir à la mesure de la perfection en sainteté du Seigneur
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— y parvenir aussi près que possible, tous les jours un peu plus.
Notre texte dit que cette parfaite sainteté est à obtenir par la révérence envers l’Eternel — par l’appréciation de Sa grandeur, de ses perfections. Le chrétien qui selon la chair n’est pas enclin à la vénération aura ici plus de difficulté que celui qui y a des penchants naturels beaucoup plus prononcés. Une grande inclination pour Dieu et les choses saintes certainement aide beaucoup à apprécier la grandeur, la sagesse, la puissance, la justice et l’amour de Dieu: et plus nous l’admirerons, plus nous estimerons le noble exemple placé devant nous et plus nous réussirons à le copier et à le suivre. Une personne qui au naturel a peu de révérence pour Dieu et les choses sacrées et a plus d’amour-propre, aura aussi beaucoup plus de peine à affermir sa vocation et son élection. Celle-là aura d’autant plus besoin de se rappeler de son insuffisance, de cultiver la révérence du Seigneur et de s’humilier: “Quiconque s’élèvera sera abaissé et quiconque s’abaissera sera élevé.” — Matth. 23:12.
En vue de ces choses nous exhortons tous les enfants de Dieu consacrés à Lui, à prendre la nouvelle résolution de suivre les conseils de l’apôtre et de laisser agir les promesses et espérances divines puissamment sur nos cœurs, pour la purification de toute souillure de nos pensées et de notre chair et pour l’achèvement de notre nouvelle nature en sainteté, dans la crainte de l’Eternel.