« Ne nous induis (abandonne) pas dans la tentation, mais délivre-nous du mal » – Matthieu 6 : 13.
Ces paroles constituent la fin de la prière du Seigneur ; elles expriment un souhait qui de l’avis de certains est double. Cette demande est plus explicite lorsqu’elle est prise dans son ensemble, mais nous allons la considérer en deux parties distinctes.
La première partie de cette demande, comme elle est mentionnée dans la majorité de nos traductions, exprime une demande qui ne s’avère pas très claire. L’expression « Ne nous induis pas dans la tentation », semblerait nous suggérer la pensée que Dieu conduit les hommes dans certaines tentations, et que Jésus demande à ses disciples de prier pour que l’Eternel les épargne et ne les induise pas dans ces tentations, c’est-à-dire qu’Il ne les y conduise pas. Une telle pensée contredirait le merveilleux caractère de Dieu décrit dans la pensée de l’apôtre : « Que personne, lorsqu’il est tenté, ne dise : C’est Dieu qui me tente. Car Dieu ne peut être tenté par le mal, et il ne tente lui-même personne » (Jacques 1 : 13). Il est vrai que dans certaines versions des Ecritures nous trouvons l’expression indiquant que Dieu tente certaines personnes, comme par exemple Abraham (Genèse 22 : 1). Toutefois, le contexte nous montre que Dieu ne tenta pas certaines personnes dans le mal, ou au mal, mais plutôt qu’Il permettait certaines expériences ayant pour but d’éprouver et de démontrer la fidélité de ces dites personnes. De telles tentations ne sont pas mauvaises, elles ne poussent pas au mal, mais ont pour but d’exercer et de préparer les élus en vue de « l’héritage des saints dans la lumière ».
Les saints ne désirent pas être libérés de telles épreuves, et ils ne doivent pas prier pour en être préservés. Les Ecritures nous donnent un merveilleux encouragement : « Mes frères, regardez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves auxquelles vous pouvez être exposés » ; « Heureux l’homme qui supporte patiemment la tentation ; car, après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que le Seigneur a promise à ceux qui l’aiment » – Jacques 1 : 2, 12.
Nous voyons donc que le mot « tentation » utilisé dans la Bible a une double signification. Il s’agit, premièrement, d’une épreuve ou d’une expérience de fidélité ou de transformation de notre caractère et, deuxièmement, d’une stimulation à l’égard du mal et du péché. Dans la dernière signification de ce mot (celle de notre texte), Dieu ne tente personne, c’est-à-dire qu’Il n’incite personne au mal ou au péché. C’est Satan qui, par son esprit, conduit l’humanité dans de telles tentations en utilisant ses influences qui agissent dans nos corps, dans ceux des autres et dans tout notre environnement corrompu.
Dieu a permis, Il permet et permettra encore jusqu’à un temps déterminé, que les influences mauvaises s’étendent sur la terre, ce qui ne signifie nullement qu’Il induit personnellement qui que ce soit dans de telles tentations. Bien au contraire, sa Parole nous assure qu’Il est prêt et capable d’arracher de toutes ces tentations ceux qui sont pieux, c’est-à-dire ceux qui croient, qui se consacrent et qui font appel à Lui pour qu’Il les défende – « Le Seigneur sait délivrer de l’épreuve les hommes pieux » – 2 Pierre 2 : 9.
D’après ces paroles, nous voyons donc que nous ne devons pas demander à Dieu de ne pas nous induire dans la tentation, car Il n’a jamais fait cela. Mais nous devons prier pour qu’Il ne nous abandonne pas lorsque, parfois, nous sommes piégés par le péché, ou involontairement exposés à la tentation. Prions Le pour qu’Il ne nous délaisse pas, mais qu’Il nous accorde la force nécessaire pour y échapper. C’est pourquoi, la pensée du texte original est correcte : « Ne nous abandonne pas dans la tentation ».
D’ailleurs, la deuxième partie de cette demande, nous montre que la première partie ne concerne pas l’induction dans la tentation, mais bien l’aide divine chaque fois que nous succombons au mal. Le mot « mal » utilisé dans le texte, n’est pas un adjectif mais un substantif, ce qui veut dire qu’il ne se rapporte pas au principe du mal mais plutôt à la personne qui fait le mal. Il en est souvent ainsi de Satan appelé « le malin », ou « le mauvais esprit », selon les Ecritures (Voir 1 Jean 2 : 13, 14 ; 5 : 18). En fait, et selon les nouvelles traductions, toute cette demande doit être exprimée comme suit : « Ne nous abandonne pas dans la tentation, mais délivre-nous du malin ».
Ceci nous explique que les tentations au péché sont provoquées par l’adversaire ; elles ne proviennent pas de Dieu qui ne nous induit pas au mal, dont la source principale est le tentateur « Satan, le méchant ». C’est lui qui fut la première cause, l’instigateur du péché qui entra dans le monde. Il a effectué sur terre la greffe du venin sur l’arbre du mal, dont les fruits amers indisposent toute la race d’Adam. Dans sa grande bonté, Dieu permit le mal pour une raison très importante ; ce fut afin qu’elle serve de leçon. Et celle-ci, lorsqu’elle se sera développée entièrement, qu’elle aboutira à son terme, et sera reconnue, étonnera toutes les créatures intelligentes, car elle mettra en relief, elle révélera la sagesse, la puissance, la justice et la bonté divine infinies et sera, pour les hommes de bonne volonté, source de profit durable inégalée.
Entre temps, pendant que le mal domine encore dans le monde, Dieu se choisit parmi les nations des personnes qui L’aiment de tout leur cœur, ainsi que la justice, au point de vouloir Le servir selon la justice et la vérité, même au prix de la persécution et de l’humiliation.
Ces personnes-là, par le contact avec le mal, combattant le bon combat de la foi dans des conditions défavorables, doivent développer leur caractère en vue d’un service glorieux dans l’avenir, et devenir au temps déterminé les représentants de Dieu avec Christ leur Tête. Leur rôle sera d’assainir le monde du péché et d’amener toutes choses à l’unité et la communion avec Dieu. – Ephésiens 1 : 9, 10.
C’est à eux, et eux seuls que la prière est destinée comme modèle. Ils ne doivent pas s’attendre à être préservés d’une manière miraculeuse des attaques et des tentations de l’adversaire, au contraire ils doivent comprendre que, du fait de leur rupture d’avec le mal, ils seront d’autant plus attaqués par l’adversaire, mais ils sortiront vainqueurs de ces attaques. Toutefois ils doivent se souvenir que, dans ce combat inégal, ils ne sont pas en mesure de vaincre de leur propre force, mais seulement en demeurant « dans le Seigneur et par sa puissance ».
C’est pourquoi, nous donnons à entendre, dans cette prière, que face à l’opposition de toutes les tentations et des attaques de l’adversaire, nous ne nous reposons pas sur nos propres forces, mais sur l’aide promise de Dieu. Luttons du mieux que nous pouvons, et que notre prière nous permette d’avoir confiance en Dieu, car « Dieu qui est fidèle, ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces ; mais avec la tentation il préparera aussi le moyen d’en sortir, afin que vous puissiez la supporter » – 1 Corinthiens 10 : 13.
Périodique Straz 1938-5-66 ; 1938-3-34.